Afrique du Sud : le gouvernement rejette la « vision étroite » de Donald Trump sur sa réforme agraire
Le gouvernement sud-africain a vivement reproché au président des État-Unis Donald Trump, d’alimenter les tensions raciales sur son sol. Une sortie qui fait suite à un tweet du président des États-Unis dénonçant des « expropriations » et des « meurtres de grande ampleur » visant selon lui les fermiers blancs sud-africains.
Donald Trump, le président américain, a enflammé le débat sur le projet de réforme agraire controversé qui agite l’Afrique du Sud avec un tweet mercredi 23 août.« J’ai demandé au secrétaire d’État [Mike] Pompeo d’étudier de près les saisies de terre et de fermes, les expropriations et les meurtres de grande ampleur de fermiers en Afrique du Sud », écrit le président américain. « Le gouvernement sud-africain saisit actuellement des terres appartenant aux fermiers blancs », a-t-il ajouté, manifestement après avoir regardé une émission sur l’Afrique du Sud diffusée sur la très conservatrice chaîne de télévision Fox News.
L’Afrique du Sud rejette totalement cette vision étroite qui ne vise qu’à diviser la nation
Pretoria n’a pas fait attendre sa réaction. « L’Afrique du Sud rejette totalement cette vision étroite qui ne vise qu’à diviser la nation et à nous rappeler notre passé colonial », a écrit le gouvernement sud-africain sur Twitter, avant de promettre que sa réforme agraire serait « prudente et inclusive ». Par ailleurs, la ministre sud-africaine des Affaires étrangères, Lindiwe Sisulu, a déploré les propos « malheureux », fondés « sur de fausses informations », tout en réclamant des « clarifications » à Washington.
« Menteur pathologique »
Julius Malema, le chef des Combattants pour la liberté économique (EFF, gauche radicale), soutien farouche de cette réforme, a également réagi. « Ne touchez pas aux affaires sud-africaines ! (…) Nous n’avons pas peur de vous », a-t-il lancé au président américain, le qualifiant de « menteur pathologique ».
Cette polémique a affecté le rand sud-africain, qui a perdu jusqu’à près de 2 % dans la matinée de jeudi 23 août par rapport au dollar américain, avant de se reprendre.
Cyril Ramaphosa, le président sud-africain, accédé au pouvoir début 2018, a promis d’accélérer la réforme de la terre pour « réparer l’injustice historique grave » commise à l’endroit de la majorité noire pendant la période coloniale et l’apartheid, officiellement aboli en 1994. En effet, cette réforme vise à rectifier les déséquilibres fonciers en Afrique du Sud, où la minorité blanche (8% de la population) possède 72 % des fermes, contre 4 % seulement aux Noirs (80 % de la population), selon les chiffres du gouvernement.
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La décision prise par le gouvernement sur la question a été d’exproprier de grands fermiers sans les dédommager. Une mesure quoi nécessite d’amender la Constitution. Et pour l’heure, le projet n’a pas encore été mis en œuvre. Le 22 août, le chef de l’État Cyril Ramaphosa a réaffirmé devant la Parlement son intention de procéder à des « expropriations sans compensation », mais rejeté toute nationalisation et promis de « renforcer les droits de propriété ».
Bras de fer
Les fermiers blancs craignent la répétition des expulsions violentes ordonnées au début des années 2000 au Zimbabwe voisin par le régime de l’ex-président Robert Mugabe. Une partie de la minorité blanche dénonce également les violences dont sont régulièrement victimes les agriculteurs dans les zones rurales du pays.
Une question très controversée. Entre 2016 et 2017, 74 fermiers ont été tués en Afrique du Sud, selon la police. Des Blancs dans leur quasi-totalité, selon l’organisation AfriForum, qui défend cette minorité. Mais cette organisation a été accusée de « répandre mensonges et rumeurs » en affirmant « à l’étranger que l’ANC voulaient procéder à des expropriations massives », a affirmé Cyril Ramaphosa le 22 août.
Son vice-président, David Mabuza, a renchéri jeudi, indexant « ceux qui déforment le sens de notre réforme agraire à l’étranger et répandent des contrevérités sur les fermiers blancs menacés par leur propre gouvernement ».
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Kallie Kriel, le chef d’AfriForum, dont une délégation a récemment effectué une tournée de promotion aux États-Unis, s’est réjoui de l’intervention de Donald Trump. « Nous avons besoin d’un soutien international (…) pour éviter une situation où nos dirigeants engageraient une politique économique catastrophique identique à celles que l’on a vues au Venezuela ou au Zimbabwe », a-t-il déclaré à l’AFP.
En mars 2018, la très sensible question de la terre avait déjà suscité une polémique entre l’Afrique du Sud et l’Australie. Un ministre du gouvernement de Canberra s’était attiré les foudres de Pretoria en offrant d’accueillir les agriculteurs sud-africains blancs « persécutés » dans leur pays, selon lui.
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