« Le prix des appels va baisser »
Ron Allard, directeur de MTN Cameroon.
Le Canadien Ron Allard dirige depuis avril 2002 MTN Cameroon, filiale du sud-africain Mobile Telephone Networks. Il évoque l’extension de la téléphonie cellulaire en Afrique et ses projets pour le Cameroun. Le groupe MTN a été créé en 1994 à Johannesburg. Il est actuellement présidé par Cyril Ramaphosa, 51 ans, un des dirigeants historiques de l’African National Congress (ANC).
Jeune Afrique/l’intelligent : Existe-t-il des différences importantes de développement du cellulaire entre l’Afrique anglophone et francophone ?
Ron Allard : Oui. Le niveau de consommation me semble plus élevé dans les pays anglophones. En outre, ces pays constituent des marchés plus importants en termes de population, ainsi du Nigeria, avec ses 120 millions d’habitants. L’Afrique du Sud et l’Ouganda sont aussi des marchés très porteurs, en raison de leurs liens étroits avec le Commonwealth. Les compagnies de télécommunications ont sans doute également une culture commerciale plus dynamique, comme l’a prouvé notre groupe, MTN, originaire d’Afrique du Sud.
J.A.I. : Le téléphone cellulaire n’est-il pas trop cher pour les Africains ?
R.A. : Une fois assurées leurs dépenses de base, comme l’alimentation et le logement, les Camerounais consacrent 20 % de leurs dépenses à la téléphonie. Est-ce trop ou trop peu ? Cela correspond à des besoins réels de communication. Par ailleurs, le cellulaire entame en Afrique sa quatrième année, alors qu’il en compte une douzaine dans les pays développés. Quand les grands investissements d’implantation seront amortis, les prix baisseront, comme ce fut le cas en Asie, en Europe et en Amérique.
J.A.I. : Où en est votre conflit commercial avec les « call boxes » (« cabines d’appels »), ces abonnés qui sous-louent vos services de téléphonie à des non-abonnés ?
R.A. : Cela s’arrange. Avant tout, il s’agissait d’un problème de vide juridique, et le Cameroun est en train de se doter d’une réglementation qui va permettre l’organisation de la profession de « call box ». L’ART, l’Autorité de régulation des télécoms au Cameroun, veut s’assurer que cette nouvelle profession répond à des normes de qualité et assure une sécurité des services aux consommateurs. Jusqu’à présent, notre licence d’exploitation au Cameroun ne nous permettait pas la revente de services à de tierces parties.
J.A.I. : Quels sont vos projets de développement au Cameroun ?
R.A. : Nous augmentons la capacité des grands centres de commutation et nous élargissons les zones de couverture dans le pays, alors que nous couvrons déjà 60 % de la population dans les dix provinces. Les services de base, comme l’audio-conférence et l’accès à l’international, étant déjà disponibles, nous allons lancer de nouveaux services adaptés aux besoins des populations. Par exemple, une bonification en points sur la base de l’utilisation quotidienne nous paraît plus utile qu’un service d’information sur les courses de chevaux. MTN va aussi améliorer la disponibilité des services sur l’ensemble du territoire, à partir de ses huit mille points de vente, des magasins spécialisés en high-tech jusqu’au « boutiquier ».
J.A.I. : Quelle est votre rentabilité actuelle ?
R.A. : Nous réalisons de bons profits ! (Rires.) Ne m’en demandez pas plus !
Le management du groupe est en outre décentralisé. Chacune des six entreprises sur le continent doit devenir un « centre d’excellence » dans un domaine particulier. Au Cameroun, nous sommes têtes de file pour les questions d’évaluation et de rémunération des salariés.
J.A.I. : Vous faites des actions de mécénat sportif et dans d’autres domaines aussi. Pourquoi ?
R.A. : C’est très important pour nous. Nous ne cherchons pas à faire des profits rapides, notre démarche est celle du développement durable. Cela commence par le fait de payer nos impôts et celui d’assurer des emplois. Mais nous sommes aussi les grands sponsors de la Ligue de football de première division, avec 450 millions de F CFA versés par an. Nous soutenons également l’organisation des jeux universitaires de Yaoundé, permettant à près de deux mille jeunes athlètes de se mesurer dans de bonnes conditions. MTN participe aussi aux actions de lutte contre le VIH-sida. C’est une responsabilité normale pour une entreprise africaine si on réfléchit à l’avenir du continent.
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