Partage des tâches

Ali Fassi Fihri, directeur général de l’Onep marocain, souligne le rôle fondamental de l’État dans la planification, la production et l’aide à l’investissement.

Publié le 29 janvier 2007 Lecture : 3 minutes.

Ali Fassi Fihri, 52 ans, est directeur général de l’Office national de l’eau potable (Onep) depuis 2001. Il est également, entre autres responsabilités, membre du comité exécutif de l’International Water Association (IWA) et gouverneur au Conseil mondial de l’eau.

Jeune Afrique : Le Maroc a la réputation de bien gérer son alimentation en eau potable. Quels chiffres en rendent compte ?
Ali Fassi Fihri : Deux indicateurs sont particulièrement significatifs. Le taux national d’accès à l’eau potable d’abord, passé de 57 % en 1994 à 90 % fin 2006. Le montant des investissements ensuite : pas moins de 2 milliards d’euros ont été consacrés au secteur durant la dernière décennie.
La situation n’est pourtant pas uniforme sur l’ensemble du territoire
Si 100 % des citadins ont accès à l’eau potable depuis la fin des années 1990 – dont 92 % par branchement individuel à domicile -, il est vrai que ce n’est pas encore le cas en milieu rural. Je tiens néanmoins à souligner qu’un saut spectaculaire a été effectué, dans la mesure où 90 % des ruraux seront couverts à la fin 2007, contre 14 % seulement en 1994.
Pensez-vous que le Maroc remplira les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ?
Pour l’eau potable, cela ne fait aucun doute. S’agissant de l’assainissement, en revanche, le royaume accuse un retard encore important : le taux d’épuration n’est que de 8 %. Mais l’Onep a mis en place un programme ambitieux. Il prévoit d’intervenir dans près de 280 municipalités, soit 4,6 millions d’habitants, à l’horizon 2015, contre 41 villes et 1,7 million d’individus aujourd’hui.
Comment fonctionnent les institutions ?
Il existe trois niveaux d’intervention. Il y a d’abord un Conseil supérieur de l’eau et du climat, présidé par le roi, qui émet les grandes orientations stratégiques. Depuis 2002, la planification des moyens destinés à atteindre les objectifs fixés est confiée au ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Eau et de l’Environnement, avec lequel l’Onep travaille en étroite collaboration. Enfin, au niveau opérationnel, des opérateurs interviennent aussi bien sur le créneau de la production et de la distribution de l’eau potable que sur celui de l’assainissement.
Quelle répartition des tâches entre le public et le privé ?
Avec plus de 80 % de part de marché, l’Onep est le principal producteur national d’eau potable. En approvisionnant quelque 460 agglomérations marocaines, il est aussi le premier distributeur. Mais d’autres acteurs interviennent. Il y a des régies municipales dans treize villes et des concessionnaires privés qui assurent le service dans les agglomérations de Casablanca, Rabat, Tanger et Tétouan. Cette configuration laisse clairement apparaître une logique de consolidation du service public : à travers l’Onep, la planification et la production restent dans le giron de l’État pour garantir la sécurisation de l’approvisionnement et une gestion globale du système tarifaire. En revanche, la distribution, qui est un service purement opérationnel dans lequel l’efficacité technique et commerciale est la règle, reste ouverte aux opérateurs privés.
Quelles sont les particularités de l’Onep par rapport aux structures similaires en Afrique ?
L’Onep fait partie des rares institutions qui planifient, produisent et distribuent en même temps. Cette position privilégiée lui permet d’avoir une vision intégrée du secteur.
Serait-il possible d’appliquer cette « recette » à d’autres pays ?
Naturellement, la « recette » peut être transposée, mais cela implique plusieurs conditions. Tout d’abord, la mise en place des infrastructures indispensables à une bonne gestion de la ressource. Seuls l’édification de barrages, la réalisation de forages et le recours au dessalement de l’eau de mer ont permis au Maroc de construire un système fiable d’approvisionnement en eau potable. Enfin, il ne faut pas négliger non plus le rôle de la puissance publique dans la planification, la production, l’aide à l’investissement et la mise en place d’un arsenal juridique réglementant le secteur, tout en partant du principe que tout ce qui est purement opérationnel est propre à être délégué.

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