[Chronique] Bénin : une grève pour le droit de grève ?
À l’issue d’une plénière des parlementaires béninois, le droit de grève des fonctionnaires pourrait être limité à une durée de dix jours par an…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 1 septembre 2018 Lecture : 2 minutes.
La « cour Holo » – du nom de Théodore Holo, ancien président de la Cour constitutionnelle béninoise – a peut-être sauvé la mise aux fonctionnaires du Bénin.
Alors que des voix s’élevaient pour réclamer la suppression du droit de grève des employés de l’État, l’institution a suggéré un recadrage plutôt qu’une suppression. Cela ne devrait pas empêcher le législateur de rogner la marge de manœuvre des potentiels grévistes dès la troisième session extraordinaire en cours de l’Assemblée nationale.
À l’exception de Guy Mitokpè, du parti «Restaurer l’Espoir», les députés membres de la commission des lois, de l’administration et des droits de l’homme ont adopté, le 29 août 2018, une proposition de loi modifiant et complétant la loi n°2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Bénin.
À lire aussi >>> Bénin – Alain Dossou : « Le droit de grève n’est pas absolu »
Au regard de la configuration politique actuelle du Parlement, une plénière devrait bientôt confirmer la modification…
Sauf amendement inattendu, et selon les dispositions de l’article 13 de ladite proposition de loi, la durée totale des grèves des travailleurs de l’État ne pourrait plus excéder 10 jours au cours d’une même année (soit 0,83 jours par mois en moyenne), 7 jours au cours d’un même semestre et 2 jours au cours d’un même mois.
En outre, quelle qu’en soit la durée, la cessation de travail au cours d’une journée serait considérée comme un jour entier de grève. Conscient qu’un tel coup de canif au contrat social pourrait en appeler d’autres, Noël Chadaré, secrétaire général de la Confédération des organisations syndicales indépendantes du Bénin, ne peut que dénoncer un reflux formel du droit des fonctionnaires, reflux qu’il qualifie de « recul démocratique ». Il invite les députés à associer les partenaires sociaux à la suite des débats.
Bien sûr, rares sont les fonctionnaires qui souhaitent engager des bras de fer excédant une dizaine de jours par an. Pourtant, lorsque la cessation du travail tente d’influencer les décideurs en incommodant les usagers, la perspective d’une reconduction de la grève est une arme fondamentale dans la guerre des nerfs. Même en retenant le principe d’une grève perlée économisant et planifiant le quota de jours, les militants devront désormais surveiller leur solde de journées « grévables », comme la batterie d’un vieux téléphone portable de contrefaçon. Les « victimes » de la grève, elles, n’auront qu’à serrer les dents en se disant que leur gêne prendra fin à l’issue d’un compte à rebours supportable. Le jeu d’échecs de la grève deviendra-t-il un jeu de dupes ?
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