L’Afrique, base de repli de Total ?

En difficulté au Kazakhstan, le pétrolier français a revu à la baisse ses objectifs. Mais il réaffirme que le continent, qui représente près du tiers de sa production, reste une terre d’exploration de premier plan.

Total, deuxième producteur de brut en Afrique – derrière l’italien ENI – extraie 30 % de son Brut sur le continent. DR

Total, deuxième producteur de brut en Afrique – derrière l’italien ENI – extraie 30 % de son Brut sur le continent. DR

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© Vincent Fournier pour JA

Publié le 6 octobre 2014 Lecture : 4 minutes.

L’annonce n’a été qu’une demi-surprise. Le 22 septembre, à Londres, où ils s’adressaient à leurs investisseurs, les dirigeants de Total ont revu à la baisse leur objectif de production à l’horizon 2017. Le groupe français, deuxième producteur de brut en Afrique derrière l’italien Eni, tablait jusqu’ici sur 3 millions de barils par jour. Désormais, il n’en vise que… 2,8 millions.

Cette nouvelle prévision ne vient que confirmer ce qui se dessinait depuis le début de cette année, lorsque le pétrolier, dirigé par Christophe de Margerie, a présenté ses résultats 2013. En février, le groupe, qui a vu son bénéfice net sur cet exercice baisser de 20 %, à 8,4 milliards d’euros, avait déjà laissé entendre qu’il allait réduire sa voilure en matière d’investissements dans l’exploration et la production.

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Déboires

Pourtant, jusqu’en novembre 2013, Jacques Marraud des Grottes, le directeur Afrique exploration-production (aujourd’hui remplacé par Guy Maurice), maintenait dans un entretien à Jeune Afrique les prévisions initiales du groupe. De même que sa ferme volonté d’investir sur le continent. Que s’est-il passé depuis ?

Total mise sur ses projets en Angola, au Congo et au Nigeria pour relancer sa production.

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C’est d’abord en Asie, en mer Caspienne, qu’il faut chercher les principales raisons de cette révision à la baisse. Précisément au Kazakhstan, où l’immense projet offshore Kashagan a pris du retard. Ce gisement est considéré comme l’un des plus importants découverts au cours de ces quarante dernières années, avec 13 milliards de barils de pétrole récupérables. Mais Total n’a pas cessé d’accumuler les déboires.

Plusieurs fois repoussée, son exploitation avait enfin commencé en septembre 2013 avant d’être arrêtée au bout de quelques semaines en raison de problèmes techniques. Et elle ne devrait pas redémarrer avant 2016. Pourtant, le groupe français entendait y pomper quelque 300 000 barils/jour.

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Outre le Kazakhstan, Abou Dhabi, qui représente jusqu’à présent 6,5 % de la production du groupe (avec 160 000 b/j), devrait voir sa contribution baisser puisque la concession de Total expirera en 2015.

Armada

En Afrique, où le pétrolier français puise environ 30 % de son brut et où il affiche depuis l’année dernière une tendance baissière (- 7 %, à 650 000 b/j), les interrogations se multiplient depuis l’annonce des dirigeants du groupe. D’autant que depuis trois ans Total y mène une politique d’exploration qu’il estime lui-même « très audacieuse ». Sans grand succès toutefois.

De l’est à l’ouest du continent, de la Mauritanie à la Côte d’Ivoire en passant par l’Afrique du Sud, le Mozambique, l’Ouganda ou le Kenya, le groupe a intensifié le forage des puits d’exploration en mer très profonde. Des zones « géologiquement risquées », avait admis Jacques Marraud des Grottes. Il a ainsi explosé son budget global d’exploration, le faisant passer de 1,8 milliard à 2,8 milliards de dollars entre 2010 et 2013. Mais, à Londres, le groupe a concédé n’avoir pas trouvé les « éléphants » qu’il cherchait. À l’exception de ses découvertes, plutôt modestes, en Côte d’Ivoire.

Toutefois, depuis la tour en verre qui héberge la direction du groupe à la Défense, le quartier des affaires situé en région parisienne, on assure que le continent ne sera pas affecté par le nouveau virage que négocie le groupe. « Bien évidemment, nous serons beaucoup plus vigilants sur nos coûts, et beaucoup plus disciplinés dans nos investissements d’exploration. Mais il n’est pas question de réduire nos activités en Afrique », soutient un cadre.

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Selon lui, des pays comme l’Angola, le Congo, le Gabon ou encore la Côte d’Ivoire restent importants pour le pétrolier. Pour preuve, il affirme qu’une dizaine de FPSO [Floating Production, Storage and Offloading Unit, navire utilisé dans l’industrie pétrolière et gazière pour le traitement et le stockage des hydrocarbures] vont être mobilisés lors des quatre prochaines années sur le continent.

De l’est à l’ouest du continent, de la Mauritanie à la Côte d’Ivoire en passant par l’Afrique du Sud, le Mozambique, l’Ouganda ou le Kenya, le groupe a intensifié le forage des puits d’exploration en mer très profonde.

D’ici là, le groupe devrait annoncer, début 2015, une nouvelle stratégie pour son activité d’exploration et de production. Et c’est le Canadien Kevin McLachlan, qui remplace Marc Blaizot à la direction de cette activité, qui la mettra en place et la pilotera. L’homme a fait ses armes chez Murphy Oil mais aussi chez Nexen, Mobil et Exxon.

Quant à la baisse de la production observée l’année dernière, « elle est liée au retard de certains projets sur lesquels Total n’est pas le seul opérateur. Mais aussi à la cession de certains actifs », explique notre cadre, qui affirme que le démarrage de certains projets en cours devrait permettre de redresser la barre. Comme en Angola, où les champs Clov (500 millions de barils), détenus à 40 % par le groupe français, sont entrés en production cette année.

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Quelque 160 000 barils devraient sortir du sous-sol marin quotidiennement. Au Congo, le projet Moho Nord doit démarrer au premier trimestre 2015. Le groupe table sur l’extraction de 485 millions de barils pour un investissement de 10 milliards de dollars. Et au Nigeria, un autre grand projet FPSO devrait démarrer à Egina à la mi-2017, avec un potentiel de plus de 500 millions de barils.

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