Le Maroc dément avoir renforcé sa vigilance vis-à-vis du Liban
La diplomatie marocaine réfute le déménagement contraint de son ambassade à Beyrouth et le durcissement des contrôles pour les Libanais souhaitant se rendre sur son sol. Elle contredit ainsi de récentes rumeurs, quatre mois après les violentes accusations portées contre le Hezbollah lors de la rupture de ses relations avec l’Iran.
« L’ambassade a effectivement changé d’adresse il y a quelques mois, mais ce déménagement était en projet depuis trois ans. En 2016 déjà, une commission s’était rendue sur place et des budgets avaient été débloqués pour permettre ce changement », explique à Jeune Afrique une source autorisée au sein du ministère marocain des Affaires étrangères et de la coopération internationale (Maeci).
À Beyrouth, le déplacement de la représentation du quartier chiite de Bir Hassan à celui de Starco, dans la zone commerciale du centre-ville, avait surpris la petite communauté marocaine installée au Liban. En effet, certains l’avaient perçu comme une conséquence directe de la montée des tensions entre le royaume et le mouvement chiite du Hezbollah, accusé début mai d’avoir « armé, financé et formé » les indépendantistes sahariens du Front Polisario. « Le timing n’est que pure coïncidence », assure notre interlocuteur.
Des rapports peu développés mais chaleureux
Certains résidents marocains et autres spécialistes, ainsi que la presse marocaine, faisaient aussi état d’une modification de la procédure d’attribution des visas pour les ressortissants libanais, désormais traités à Rabat afin d’effectuer des vérifications plus poussées. Le Maeci infirme de nouveau ces assertions. « Comme dans tous les autres pays où nous sommes représentés, les demandes de visa sont automatiquement adressées par voie électronique à la Direction des affaires consulaires et sociales à Rabat », détaille le ministère, ajoutant que « les cas les plus douteux sont ensuite analysés par les services sécuritaires ». L’allongement des délais constaté ces derniers temps serait uniquement justifié par des « mutations et des départs en vacances ».
Les contacts politiques entre le Maroc et le Liban ont toujours été bons », selon Jawad Kerdoudi
« Même s’il n’y a jamais eu beaucoup d’échanges économiques ni de fortes diasporas entre le Maroc et le Liban, leurs contacts politiques ont toujours été bons », affirme Jawad Kerdoudi, président de l’Institut marocain des relations internationales (Imri). Selon cet analyste, les griefs récemment formulés par le royaume ne concernent pas l’État libanais mais seulement le Hezbollah, surtout depuis l’arrestation en mars 2017 à Casablanca de l’un de ses grands argentiers africains, Qassim Mohammed Taj al-Din.
Signe de ces bons rapports, des représentants libanais ont assisté à la réception donnée fin juillet par l’ambassade à l’occasion de la fête du Trône, d’après une invitée présente ce jour-là. Début avril dernier, le roi Mohammed VI s’était également affiché dans un restaurant parisien aux côtés du Premier ministre Saad Hariri et de Mohamed Ben Salmane, le prince héritier saoudien, pour un selfie qui avait été abondamment commenté. Même le couac du vote du Liban pour le rival nord-américain à l’organisation de la Coupe du monde de football 2026 semble avoir été le fait de la seule Fédération, alors que le ministère des Sports avait officiellement apporté son soutien à la candidature marocaine.
Le Hezbollah et le Polisario nient
Le 1er mai dernier, le ministre marocain des Affaires étrangères, de retour d’une visite à Téhéran, annonçait la rupture des liens diplomatiques avec l’Iran, « en réponse à son implication claire avec le Hezbollah dans une alliance avec le Polisario pour cibler la sécurité nationale et les intérêts du royaume ». « Des preuves solides, des noms et des faits spécifiques confirment le soutien du Hezbollah au Polisario pour cibler les intérêts supérieurs du Maroc », avait renchéri Nasser Bourita.
>>> A LIRE – « La rupture entre le Maroc et l’Iran est aussi une conséquence de la crise du Golfe »
Le diplomate avait notamment accusé un agent de l’ambassade de la République islamique à Alger d’avoir joué pendant deux ans le rôle de « facilitateur », permettant à des instructeurs du Hezbollah de former les soldats du Front à la « guérilla urbaine et à des attaques contre le royaume du Maroc ». Selon lui, des missiles Strela et anti-aériens de fabrication russe SAM-9 et SAM-11 ont également été livrés par l’organisation libanaise, qualifiée de terroriste par plusieurs administrations occidentales.
Des arguments « niés » et « totalement rejetés » par le Hezbollah, jugeant « regrettable que le Maroc, sous la pression américaine, israélienne et celle de l’Arabie saoudite, profère des fausses accusations ». Quant à Mohamed Haddad, porte-parole du Polisario, il avait qualifié ces allégations de « mascarade » et de « grand mensonge », jurant n’avoir jamais entretenu de « relations militaires ni reçu d’armes, que ce soit avec l’Iran ou le Hezbollah ».
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