Cameroun-Nigeria : AK47, mercenaires et chalutiers, quand la crise anglophone prend la mer

La marine camerounaise a intercepté, dans la nuit du 6 au 7 septembre, trois navires nigérians, dans lesquels des armes ont été saisies. Depuis, l’enquête est en cours et les regards se tournent vers le port de Calabar, au Nigeria.

Armée camerounaise en patrouille au large de Bakassi. © Marine nationale du Cameroun

Armée camerounaise en patrouille au large de Bakassi. © Marine nationale du Cameroun

MATHIEU-OLIVIER_2024

Publié le 13 septembre 2018 Lecture : 2 minutes.

Un patrouilleur de la marine camerounaise, le Sanaga, croisait dans les eaux territoriales camerounaises, à la limite de la frontière maritime entre la région du Nord-Ouest du Cameroun et le Nigeria, aux alentours de la presqu’île de Bakassi, lorsqu’il a surpris trois chalutiers nigérians, baptisés Olokun 1, 3 et 13 (Olokun étant le dieu de la mer chez les Yoruba), dans une zone pourtant interdite à la pêche.

La marine camerounaise a alors décidé d’arraisonner les trois embarcations, sur la base de « renseignements fiables signalant plusieurs entrées éventuelles aux fins d’appuyer les sécessionnistes » ambazoniens, selon le colonel Didier Badjeck, porte-parole de l’armée.

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Olokun 1 ayant résisté et ayant fait l’objet d’un « abordage musclé », selon l’état-major de l’armée camerounaise, les deux autres navires ont préféré obtempérer. Les trois chalutiers ont alors été fouillés. Une quarantaine de mercenaires de nationalité étrangère ont été arrêtés, remis à la gendarmerie nationale et accusés de détention d’armes de guerre, pêche illégale et immigration clandestine.

« La livraison d’une commande » ?

De nombreuses armes et munitions – AK 47, fusils de chasse calibre 12 et cartouches de 7,62 mm -, ont également été découvertes, ainsi que d’importantes sommes d’argent. Les trois chalutiers ont ensuite été amenés au port de Limbe, où l’enquête, les interrogatoires des mercenaires et l’analyse de la provenance des navires se poursuit.

« Ces renforts envisageaient des attaques d’envergure prévues à partir du 15 septembre dans les deux régions anglophones en crise », croit savoir le colonel Badjeck. « Cela ressemble à la livraison d’une commande », précise une source sécuritaire.

Calabar, fabrique de mercenaires ?

Depuis le début de la crise anglophone, la région de Bakassi est redevenue un enjeu majeur en ce qui concerne la sécurité du Cameroun et du Nigeria. La presqu’île contrôle en effet l’accès au port de Calabar, au Nigeria, où de nombreux combattants ambazoniens parviendraient, selon des sources sécuritaires, à échanger des marchandises contre des armes.

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Fin juillet, Ben Ayade, le gouverneur nigérian de l’État de Cross River, où se situe Calabar, avait déjà tiré la sonnette d’alarme. « Il y a un afflux de personnes [vers la région de Calabar] à travers plus de 27 itinéraires illégaux et elles introduisent des marchandises de différentes sortes, les vendent et les utilisent pour acquérir des armes et recruter nos jeunes hommes et femmes mercenaires pour la guerre civile au Cameroun», avait-il dénoncé.

Outre les réfugiés camerounais au Nigeria, de nombreux ressortissants d’Afrique de l’Ouest affluent en effet vers le port, profitant de la libre circulation en vigueur au sein de la Cedeao. En février 2017 déjà, le ministre de la Justice nigérian Joe Abang avouait : « Calabar est devenu LE port de transit pour les trafiquants ». Depuis, la situation ne s’est guère améliorée.

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