Arrêt sur étages

Publié le 28 août 2006 Lecture : 2 minutes.

L’Immeuble Yacoubian, ou la chronique d’un succès annoncé Le roman éponyme a été un best-seller, son adaptation cinématographique un blockbuster, suscitant l’enthousiasme du public non seulement en Égypte, mais aussi dans le monde arabe et, désormais, dans le reste de la planète. Le livre d’Alaa el-Aswany a été vendu à plus de 100 000 exemplaires dans son pays d’origine. Quant au film, depuis sa sortie en juin au pays des pyramides, il a atteint des sommets de fréquentation, avec plus de 1 million de spectateurs. Il s’est également vu décerner le Grand Prix lors de la 8e Biennale des cinémas arabes organisée à l’IMA (Paris), du 22 au 30 juillet.
Comment expliquer un tel engouement ? Par un projet ambitieux : un casting réunissant les plus grandes stars nationales – telles que l’immense comédien Adel Imam, Yousra et Nour el-Sherif (deux acteurs fétiches de Youssef Chahine) -, sans oublier la Tunisienne Hind Sabry (remarquée notamment dans Les Silences du Palais, de Moufida Tlatli) ; un budget pharaonique de 3,5 millions de dollars, le plus gros de toute l’histoire du cinéma égyptien ! Et surtout par les tabous qu’il brise allègrement et le tableau sans concession qu’il dresse de la société égyptienne contemporaine. Homosexualité, fanatisme religieux, prostitution, pharisianisme, corruption politique, et autres plaies caractéristiques de l’Égypte Le tout agrémenté d’un parfum de scandale qui aura contribué à sa publicité, puisque le film a échappé de justesse à la censure : au Parlement, de nombreux députés ont appelé à son interdiction en vain. Locataires nantis ou pauvres, bons ou méchants, pacha déchu ou ouvrière aux airs de Cosette, toutes sortes de protagonistes se croisent dans cet authentique immeuble du centre du Caire, bâti dans les années 1930 par un riche Arménien, jadis luxueux, mais qui a subi les outrages du temps et les affres de l’Histoire, de la chute du roi Farouk au régime actuel en passant par la révolution nassérienne.
Appartements cossus aux étages, baraques misérables sur le toit, un ascenseur social bloqué, à l’image d’une société en butte à ses contradictions Pour son premier long-métrage, le jeune réalisateur Marwan Hamed (28 ans) a fait retrouver à la cinématographie égyptienne sa veine d’antan. Car avant de s’effondrer dans les années 1990, Le Caire était, il y a un demi-siècle, La Mecque du cinéma oriental ou, si vous préférez, une sorte de Hollywood sur le Nil. De par la double et prestigieuse filiation – le Nobel de littérature Naguib Mahfouz, le cinéaste Youssef Chahine -, dont il peut à juste titre se prévaloir, L’Immeuble Yacoubian est un phénomène aussi bien littéraire que cinématographique. Un Immeuble à louer, à voir, puis à lire – ou l’inverse.

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