Révolutionnaires, Black Panthers, mouvements de libération… la vie trépidante d’Elaine Mokhtefi à Alger

Dans « Algiers, Third World Capital », la journaliste américaine Elaine Mokhtefi raconte l’effervescence révolutionnaire de la capitale algérienne, devenue dans les années 1960 le point de rencontre entre les activistes africains-américains et les mouvements de libération du continent.

Couverture de l’ouvrage « Algiers, Third World Capital : Freedom Fighters, Revolutionaries, Black Panther » © Verso, 2018

Couverture de l’ouvrage « Algiers, Third World Capital : Freedom Fighters, Revolutionaries, Black Panther » © Verso, 2018

CRETOIS Jules

Publié le 19 septembre 2018 Lecture : 2 minutes.

Elaine Mokhtefi a déjà un éloquent passé de militante quand elle rencontre, au printemps 1969 à Alger, Leroy Eldridge Cleaver, ministre de l’Information du Black Panther Party.

L’Américaine – blanche – a la quarantaine. La rencontre avec le révolutionnaire africain-américain l’a « réuni avec le pays d’où [elle] venai[t] ». En effet, elle vit depuis plusieurs années en Algérie. Déjà une figure atypique de la jeune révolution anticoloniale algérienne, elle va devenir compagne de route des Panthers. C’est ce parcours qu’elle raconte dans son livre, paru début août chez Verso (en anglais) : Algiers, Third World Capital : Freedom Fighters, Revolutionaries, Black Panthers (Alger, capitale du tiers-monde : combattants de la liberté, révolutionnaires, Black Panthers).

la suite après cette publicité

>>> À LIRE – Quand Alger servait de refuge aux militants africains-américains

Étant elle-même juive, Mokhtefi a ressenti très tôt les discriminations de la société américaine. Devenue étudiante à Paris, elle rencontre de jeunes progressistes du monde entier, dont ceux des mouvements de libération africains. Des histoires d’amour se nouent, entre autres avec un jeune militant algérien qui lui fait découvrir son pays et sa cause. Accompagnée de ce dernier et du célèbre intellectuel Frantz Fanon, elle voyage notamment à Accra (Ghana) pour une rencontre internationale anticoloniale. Puis, à l’orée des années 1960, son petit ami lui fait découvrir l’Office algérien de New York, chargé d’assurer le contact avec les Nations unies. Elle intègre l’équipe et s’engage aux côtés de la nation nouvellement indépendante.

À peine sortis du maquis, les révolutionnaires qu’elles rencontrent ne sont pas encore des bureaucrates

De l’aventure…

Installée à Alger, elle est gagnée par l’effervescence qui agite toute une partie de la société. Elle fréquente de près des personnalités importantes de la révolution algérienne. À peine sortis du maquis, les hommes qu’elles rencontrent ne sont pas encore des bureaucrates. Journaliste à l’Algérie Presse Service (APS), elle interviewe le footballeur brésilien Pelé, couvre le festival panafricain de 1969, participe à des événements internationaux tiers-mondistes…

À l’époque, Alger est une plateforme. Angolais, Mozambicains, Sud-Africains… Des révolutionnaires de toute l’Afrique y transitent ou y résident. Un soir de 1969, le représentant local de l’Union du peuple africain du Zimbabwe, qui combat l’oppression blanche et la présence britannique, prend contact avec elle. Il lui apprend que Cleaver est aussi à Alger, et lui demande de jouer les entremetteuses. C’est d’ailleurs Elaine Mokhtefi qui négocie la prolongation du séjour de ce dernier et de sa famille, auprès de Slimane Hoffman – fils d’un légionnaire français et d’une Algérienne, ancien pilote de tank devenu intermédiaire entre le FLN algérien et les autres mouvements de libération à travers le monde.

la suite après cette publicité

… à l’expulsion

Les mémoires de Mokhtefi relèvent du roman d’aventure. Les personnages et les scènes qu’elle décrit sont hauts en couleur, à l’image des pirates de l’air africains-américains qui, enhardis par la présence des Panthers dans la Casbah, détournent des avions vers les tarmacs algériens. Une vie trépidante… un peu trop au goût des autorités de son pays d’accueil, qui finiront par demander à Mokhtefi de quitter le territoire.

Ce que raconte l’auteure est en grande partie connu. Mais ce qu’elle restitue est une ambiance. En redonnant chair à la période, elle la rend à la fois plus épique qu’un récit froid, et plus triviale que ce que le mythe laisse parfois entendre.

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Le président algérien Ahmed Ben Bella (au centre) à l’ouverture du Séminaire de solidarité économique Afrique-Asie, à Alger, le 22 février 1965. Parmi les personnalités présentes, Ernesto Che Guevara (2e rang, 2e à g.). © Cardenas/AFP

Alger des sixties, capitale mondiale des révolutionnaires

Contenus partenaires