Des économies qui coulent de source
La pénurie guette. Gestion durable, dépollution, innovation… L’État se démène sur tous les fronts.
S’il n’y prend garde, le royaume, déjà en état de stress hydrique, court à la pénurie. Elle toucherait 13 millions d’habitants à l’horizon 2020. Le scénario aurait pu être pire sans la politique de barrages lancée dans les années 1960, qui ont permis de mobiliser d’importantes réserves. Mais certains ouvrages sont devenus vétustes et menacés par l’envasement.
« On s’est concentré sur la quantité et non sur la qualité, commente Hakima el-Haite, directrice générale de la société Eau Globe, spécialisée dans l’environnement. Nous avons un immense retard en matière d’épuration. Nous ne traitons encore que 10 % à 15 % de nos eaux usées. » Face à ce nouveau défi, en 2000, l’Office national de l’eau potable (Onep), qui assure la quasi-totalité de la production nationale, s’est vu confier le développement d’un réseau de stations d’épuration. « Les investissements ont atteint 3,6 milliards de DH, précise Nabil Mosleh, directeur de la coopération à l’Onep, dont 2,1 milliards ont déjà été utilisés. Ce qui représente une quarantaine de stations opérationnelles. Nous prévoyons d’intervenir dans une dizaine de localités par an d’ici à 2015. » Les sociétés privées chargées de la distribution de l’eau dans les grandes agglomérations mettent aussi en place ce type d’unités.
L’accès à l’eau potable des populations rurales a considérablement progressé, son taux passant de 14 % en 1994 à 86 % en 2007. Avec néanmoins un bémol, selon Mehdi Lahlou, président de l’Association pour le contrat mondial de l’eau : « Ses chiffres se basent sur un mode de calcul purement marocain. L’ONU considère qu’une zone est desservie quand la ressource se trouve dans un périmètre de 500 mètres. Au Maroc, c’est un kilomètre. »
Côté réglementaire, la loi de 1995 a enfin permis de considérer la ressource en eau comme un bien public et a transféré sa gestion aux agences de bassin. Hélas, ces dernières n’ont pas les moyens de leurs ambitions. À défaut d’outils de contrôle et de sanctions, elles ont peu de poids face à certains propriétaires terriens qui usent et abusent des nappes phréatiques. C’est pourtant en milieu rural que le gaspillage est le plus important : sur les 10 milliards de m3 utilisés, quelque 6 milliards disparaissent dans la nature ! Polluées et surexploitées, les réserves sont mises à mal.
Pour éviter la catastrophe, le Maroc va devoir se battre sur tous les fronts : lutter contre la pollution, promouvoir des techniques d’irrigation plus économes et recourir aux moyens non conventionnels (dessalement, déminéralisation), endiguer l’envasement des barrages.« Le gouvernement a enfin pris conscience de l’urgence, reconnaît Mehdi Lahlou. Mais, jusqu’à présent, il n’y a pas de vision globale de cette problématique. La question de l’eau est aujourd’hui du ressort de plusieurs départements : le ministère de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement, le ministère de l’Intérieur, les Eaux et Forêts, etc. C’est impossible de mettre en place une politique intégrée avec autant d’intervenants. » Pourtant, le temps presse : le potentiel des ressources mobilisées est d’environ 730 m3 par habitant et par an, contre 2 600 m3 dans les années 1960. Et cette quantité devrait tomber à 570 m3 d’ici à 2020.
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