Racistes, les Marocains ?

Le témoignage d’un cadre malien sur la xénophobie dont sont victimes les Subsahariens au royaume chérifien a suscité des réactions passionnées.

Publié le 29 juin 2004 Lecture : 2 minutes.

Faut-il s’en étonner ? La publication, dans J.A.I. n° 2266, du témoignage douloureux d’un cadre malien résidant au Maroc sur le racisme dans le royaume a suscité de la part de nos lecteurs un abondant – et virulent – courrier. L’auteur de ce témoignage, Zoubeïrou Maïga, a eu le courage de signer de son nom. Il raconte ce qu’il vit, ce qu’il a vécu et ce que subissent trop souvent nombre de ressortissants originaires d’Afrique subsaharienne, de Tanger à La Gouéra. On peut certes, ainsi que le font certains de nos correspondants, continuer de se voiler la face, laisser le tabou là où il sommeille, nier les faits et prétendre que tout cela n’est que pure invention. Attitude hélas ! fréquente, qui revient à dire que le Maroc, en vertu d’on ne sait quelle exception culturelle et historique, serait le seul pays au monde où le racisme n’existe pas. On peut aussi voir, dans la publication de ce témoignage, une sorte de sombre complot destiné à ternir l’image d’un royaume enchanteur où la couleur de la peau n’aurait pas plus de visibilité que celle du paysage. On peut enfin tenir pour quantité négligeable, voire pour l’expression d’une frustration personnelle, ce texte cru venu de l’autre côté du miroir et qui décrit de l’intérieur une réalité que, par commodité, paresse ou inconscience, nombre de Marocains, intellectuels compris, se refusent à voir. Donc à dire.
Tout cela, bien sûr, n’a aucun sens. Oui, les phénomènes d’exclusion et de racisme existent bel et bien au Maroc. Non, y consacrer un article dans J.A.I. ne relève pas de la malveillance, mais du devoir d’informer et d’alerter. En aucun cas, cher Aziz Belayachi, avocat marocain résidant en France, vous qui nous jugez « irresponsables et indignes » pour avoir publié des « propos orientés susceptibles de salir tout un peuple », nous ne nous sentons coupables d’insultes à l’égard d’un grand pays et d’un peuple fier, dont J.A.I. a maintes fois, en quarante-quatre ans d’existence, soutenu les combats, célébré la richesse humaine et culturelle exceptionnelle. Où avez-vous lu que Zoubeïrou Maïga appliquait aux Marocains le principe de la responsabilité collective ? Dénoncer les réflexes, les mots, les attitudes racistes en France, à l’encontre des émigrés marocains par exemple, signifie-t-il pour autant que tous les Français soient à mettre dans le même sac de la xénophobie ? Assurément non. Pourquoi donc vous sentez-vous visé, vous qui ne l’êtes pas ?
Ce journal, une fois de plus, n’est ni marocain, ni tunisien, ni camerounais, ni ivoirien, ni français, ni du nord, ni du sud du Sahara. Il appartient à ses lecteurs, où qu’ils soient, et ceux qui le font, d’où qu’ils viennent, ont en commun le refus absolu du racisme et de la xénophobie, le culte de la tolérance et le respect des différences. C’est au nom de cette charte morale, non pas pour blesser quiconque, que nous avons publié ce témoignage – et que d’autres suivront, sur le même sujet, à propos des autres pays du Maghreb. Puissent-ils aider, une fois surmontés les haut-le-coeur, à combattre ce mal qui est en nous.

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