Dassault fait main basse sur la presse
Deux armes sont désormais entre les mains de Serge Dassault : le Rafale et la presse. Le capitaine d’industrie, âgé de 79 ans, a officiellement racheté, le 22 juin, la Socpresse, ancien empire de Robert Hersant, dont il détenait déjà 30 % du capital depuis janvier 2002. L’avionneur ne cache pas ses intentions : les médias doivent servir à « diffuser des idées saines ». Une vision qui ne manque pas d’inquiéter la rédaction du Figaro, fleuron de la Socpresse, et celle de L’Express-L’Expansion. Déjà, le nouveau magnat de la presse française a déclaré que le grand quotidien national (360 000 exemplaires), qu’il avait convoité sans succès en 1999, « a des présentations qui ne [lui] plaisent pas trop ». Pour y remédier, il souhaiterait par exemple que figure en première page une liste des sujets traités à l’intérieur. Il a également indiqué qu’il préférait les bonnes nouvelles à l’actualité triste rapportée par tous les médias, qu’il fallait donc « parler des choses qui vont bien ». Provocation ou réelle volonté d’instrumentaliser les rédactions ? s’interrogent les journalistes concernés.
Quant aux autres titres du groupe, soixante-dix environ, principalement des quotidiens régionaux, ils tremblent pour leur avenir. Pour racheter la Socpresse, Serge Dassault a déjà été obligé de promettre à la Commission européenne de vendre l’un de ses magazines économiques, La Vie financière, de manière à ne pas se trouver en position dominante vis-à-vis des annonceurs de ce marché. Une fois le feu vert de Bruxelles obtenu pour ce rachat, le 18 juin, l’entrepreneur a annoncé qu’il se débarrasserait également des titres déficitaires. Mais, comme le note une représentante du syndicat CFDT du groupe, interrogée par un confrère, « s’ils vendent tout ce qui n’est pas rentable, ils ne vont pas garder grand-chose ».
Pour l’heure, Serge Dassault peut se réjouir d’être le numéro un de la presse en France. La Socpresse enregistre un chiffre d’affaires estimé à 1,5 milliard d’euros. Son principal concurrent n’est autre que Hachette Filipacchi Médias (HFM), propriété de Lagardère depuis 1981. Pour le seul Hexagone, HFM (Elle, Paris-Match, etc.) avance un chiffre d’affaires de 1 milliard d’euros.
Au niveau mondial, en revanche, le groupe de Lagardère dépasse largement la Socpresse avec un chiffre d’affaires de 2,2 milliards d’euros. Dassault et Lagardère, les deux patrons ennemis, vont donc désormais s’affronter dans deux domaines : l’aéronautique et la presse.
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