Une filière d’avenir

Depuis deux ans, les cours sont repartis à la hausse. Une bonne nouvelle pour les grands producteurs africains, notamment la Côte d’Ivoire.

Publié le 28 mai 2007 Lecture : 3 minutes.

Après une baisse continue de 2003 à 2005, les cours du cacao sont depuis sur une pente ascendante. Fin 2006, le prix a culminé à 1,591 dollar le kilo. Le pic atteint en 2002, avec une moyenne de 1,779 dollar, n’a pas encore été égalé. Mais le dernier rapport Cyclope 2007 (document exclusivement consacré aux matières premières) estime à 13 % le renchérissement des cours en 2007. L’engouement pour le chocolat est passé par là. Ce qui est de très bon augure pour la Côte d’Ivoire (39 % de la production mondiale), le Ghana (21 %), le Nigeria (5 %) et le Cameroun (5 %). Ces quatre pays représentent ainsi quelque deux tiers du marché mondial, alors que certains nouveaux venus, comme le Vietnam, n’ont pas vraiment décollé. Par ailleurs, malgré la crise, la Côte d’Ivoire demeure en la matière un géant qui pèse lourd.
Selon les dernières estimations, la campagne principale, d’octobre 2006 à mars 2007, s’est élevée à 930 000 tonnes, soit un recul de 30 000 tonnes par rapport à l’année dernière. Quant à la campagne intermédiaire, d’avril à septembre 2007, elle devrait s’établir à 310 000 tonnes, contre 380 000 tonnes un an plus tôt. « Ce sont des baisses peu significatives qui s’expliquent essentiellement par une pluviosité insuffisante. Mais, fondamentalement, les niveaux n’ont jamais été aussi élevés. C’était inespéré il y a encore cinq ans avec la partition du pays », assure un spécialiste. Aux pires heures de la crise, les acheteurs internationaux étaient en effet persuadés que les fèves n’allaient pas pouvoir être acheminées vers les ports d’Abidjan et de San Pedro du fait de l’insécurité, entraînant mécaniquement une contraction de l’offre. Cette crainte a provoqué une brutale hausse des cours en 2002. Mais les opérateurs ivoiriens ont finalement tenu bon.
Plus déterminant encore, les paysans, attirés par une augmentation des prix entre 2002 et 2003, ont renouvelé leurs vergers et massivement investi dans les intrants. Les effets se font encore sentir aujourd’hui. Parallèlement, le taux de transformation est passé de 16,5 % en 2001 à 21,5 % en 2006, contre environ 14 % sur la période 1998-2001. De quoi valoriser la cabosse ivoirienne, d’autant que les capacités industrielles de broyage sont de 350 000 tonnes.
Abidjan, qui a libéralisé le secteur cacao, gagnerait cependant à observer avec attention ce qui se passe chez le voisin ghanéen, où le rôle de l’État a été, au contraire, réaffirmé. Premier producteur mondial dans les années 1960 et 1970, le Ghana a connu une chute des récoltes durant les années 1980. Mais depuis 2000, Accra a inversé la tendance. La moyenne des trois dernières campagnes a été de 692 300 tonnes, contre 340 000 tonnes entre 2001 et 2002. Quant au niveau de transformation, en constante progression, il s’élève à plus de 30 %. C’est là le fruit d’une stratégie clairement établie. Le prix payé aux producteurs a quasiment triplé depuis 2001. L’État garantit aux paysans de percevoir au moins 70 % des revenus tirés des ventes à l’exportation, soit 9,15 millions de cédis (494 000 F CFA) par tonne cette année. Les pouvoirs publics ont également lancé un programme de lutte contre les maladies, accordé des bourses destinées aux cultivateurs qui reprennent le chemin de l’école, financé la construction de logements et octroyé des crédits pour l’achat de véhicules.
En Côte d’Ivoire, en revanche, la colère gronde. Le 5 mai, l’Union européenne (UE) a dénoncé dans un audit commandé par le gouvernement la gestion opaque des quatre structures – Autorité de régulation du café et cacao (ARCC), Bourse du café et du cacao (BCC), Fonds de régulation et de contrôle (FRC) et Fonds de développement et de promotion des activités des producteurs de café et de cacao (FDPCC) – qui ont succédé à la Caistab, démantelée en 1999. Ces conclusions européennes n’étaient pas vraiment une surprise, mais leur publication a traduit l’agacement de Bruxelles devant l’inertie d’Abidjan. « Ce ne sont pas les structures qui sont en cause, mais leur fonctionnement. Elles devaient apporter plus de transparence et coûter moins cher. C’est le contraire qui s’est produit, au détriment des paysans », explique un observateur, qui estime aussi que les prélèvements fiscaux de l’État sur la filière sont trop élevés. Cette année, le prix d’achat a été fixé à 400 F CFA/kg alors que les planteurs réclamaient 600 F CFA. Au Ghana, il avoisine 500 F CFA.

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