[Tribune] Jeunesse guinéenne, engage-toi !
En 2030, les moins de trente ans représenteront 70 % de la population guinéenne. Une richesse à bien des égards pour un pays qui va fêter les soixante ans de son indépendance et qui a du mal à décoller.
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Baba Hady Thiam
Avocat aux Barreaux de Guinée et de Paris
Publié le 2 octobre 2018 Lecture : 3 minutes.
Guinée : soixante ans d’indépendance
1958-2018. Soixante ans plus tard, le pays de Sékou Touré et d’Alpha Condé renoue avec les espoirs de l’indépendance.
Cette jeunesse devra néanmoins vite faire un choix entre reproduire le modèle et les codes de la société actuelle ou servir de force de rupture et de transformation. Alors on pourra mesurer l’impact qu’elle aura dans l’Histoire.
Comme le disait le physicien Albert Einstein : « La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent. » Si elle veut marquer un virage positif, la nouvelle génération devra donc faire attention à ne pas reproduire les erreurs de ses aînés.
Car ces jeunes, qui n’ont pas connu les deux premières républiques guinéennes, constituent la seule force à même de permettre le décollage du pays, l’histoire nous ayant démontré que, quelles que soient ses ressources, le développement d’un État dépend avant tout de ses femmes et de ses hommes.
La jeunesse devra être consciente que certaines choses ne sont pas inéluctables et normales
Les maux qui gangrènent aujourd’hui la société – repli identitaire, omniprésence de la corruption, court-termisme, injustice et impunité, non-renouvellement des élites, individualisme exacerbé, faiblesse de l’État, manques criants dans l’éducation, clientélisme, etc. – sont bien connus de tous. Cela ressort clairement du sondage effectué par l’initiative « Penser la Guinée de demain » à l’occasion du soixantenaire de l’indépendance : près des deux tiers des personnes interrogées affirment être pessimistes sur l’avenir du pays à moyen terme.
Le salut ne viendra que d’une franche rupture avec les codes de la société actuelle, qui résultera d’un profond désir de changement, une volonté inébranlable de vivre et d’agir ensemble. Dans cette perspective, la jeunesse devra respecter une condition sine qua non : être exigeante envers elle-même et envers ses élites, et ne pas accepter la fatalité.
Elle devra être consciente que certaines choses ne sont pas inéluctables et, surtout, ne sont pas normales, comme le fait que la corruption imprègne le quotidien, que la médiocrité soit récompensée au détriment de la méritocratie, que l’opacité règne dans la gestion de la chose publique, qu’une petite frange de la population s’enrichisse de manière illicite sur les deniers publics, que certaines décisions de justice ne soient pas exécutées, que les partis politiques et les coordinations régionales poursuivent une ethno-stratégie, etc.
Ne jamais oublier que, au-delà des ethnies et des religions, nos destins sont intimement liés
Pour y mettre bon ordre, les citoyens disposent de nombreux outils tels que les réseaux sociaux, les enquêtes parlementaires, judiciaires ou journalistiques et, surtout, le vote. En ce sens, la nouvelle génération a toutes les cartes en main et est le vrai maître du jeu.
Elle pourra aussi s’appuyer sur les nombreux atouts de son temps (ouverture sur le monde, études, formations et séjours à l’étranger, accès à l’information, etc.) pour apporter une contribution unique au développement, présent et futur, du pays.
Elle devra également tirer les leçons du passé et ne jamais oublier que, au-delà des ethnies et des religions, nos destins sont intimement liés. Elle doit d’ores et déjà s’élever contre leur utilisation au service de la division. Enfin, elle devra se refuser à revenir sur les représentations d’hier. Il y a eu des combats, il y a eu des erreurs, des fautes et des malheurs. Il y a eu des réalisations, des histoires heureuses et de belles choses. Elle ne devra pas rester enfermée dans ce passé.
Cette jeunesse pleine de ressources, de talents et de créativité porte donc en elle une grande partie de la solution pour la Guinée de demain, qu’elle sera un jour amenée à gouverner, et est un atout majeur pour le développement du pays. Les mêmes causes produisant nécessairement les mêmes effets, gageons qu’elle servira de force de changement de la société guinéenne.
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Guinée : soixante ans d’indépendance
1958-2018. Soixante ans plus tard, le pays de Sékou Touré et d’Alpha Condé renoue avec les espoirs de l’indépendance.
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