[Tribune] Un héritage démocratique ambivalent
À l’indépendance, les pays africains francophones ont hérité de cette anomalie française qu’est l’hyperprésidentialisation. Au Cameroun, lors de la campagne électorale pour la présidentielle, des affiches de Paul Biya étaient visibles à tous les grands carrefours.
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Fred Eboko
Directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), à Paris.
Publié le 12 octobre 2018 Lecture : 4 minutes.
Dans le cadre de la campagne électorale pour la présidentielle du 7 octobre au Cameroun, des affiches de Paul Biya trônent à tous les grands carrefours. Avec seulement deux déplacements prévus à l’intérieur du pays – dont une première visite avortée en zone anglophone, en pleine crise –, ce sont les seuls actes de campagne pour ce candidat-président, qui a annoncé, par un simple tweet il y a trois mois, son intention de briguer un septième mandat.
Paul Biya n’a pris part à aucun débat, n’a tenu aucune conférence de presse… Et la traduction anglaise de son slogan de campagne, approximative – « La force de l’expérience » / « The force of experience » –, témoigne de l’insolente assurance d’un exécutif qui avance bille en tête. Tout cela résulte d’un travers politique majeur : la concentration des pouvoirs entre les mains de l’exécutif, au Cameroun comme dans bon nombre de pays africains, notamment francophones. Et ils ont de qui tenir.
Dans Le Bon Gouvernement, Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, critique ainsi le recul progressif du pouvoir législatif au profit de l’exécutif dans les démocraties occidentales : « Nos régimes politiques peuvent être dits démocratiques, mais nous ne sommes pas gouvernés démocratiquement. C’est le grand hiatus qui nourrit le désenchantement et le désarroi contemporains. »
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