Premières élections multiraciales en Afrique du Sud

27 avril 1994

Publié le 28 avril 2008 Lecture : 3 minutes.

Le 27 avril 1994 au matin, les Sud-Africains se pressent dans d’interminables files d’attente conduisant aux bureaux de vote. Blancs, Noirs, Indiens, Métis, tous mélangés, ils sont convaincus de vivre un moment historique en participant aux premières élections non raciales de l’histoire du pays. Si l’organisation du scrutin a donné lieu à bien des ratés – des bureaux ont été déplacés à la dernière minute, d’autres n’ouvrent qu’à la mi-journée, ici ou là des bulletins manquent -, le vote se déroule sans entraves majeures pendant trois jours, du 26 au 28 avril. La journée du 26 ayant été réservée aux malades, aux handicapés, aux personnes âgées ainsi qu’aux personnels de la police et de l’armée.

On pouvait pourtant craindre le pire. Certaines fractions de la population blanche ont du mal à admettre qu’après trois siècles et demi de domination sans partage, le pouvoir est en train d’échapper à leur minorité. À la veille de la consultation, une série d’attentats a fait 21 morts et plus de 150 blessés. Pour contrer cette vague de terrorisme, partiellement revendiquée par l’extrême droite, un impressionnant dispositif de sécurité a été mis en place : plus de 100 000 policiers ont été mobilisés pour surveiller les 9 000 bureaux de vote.
Tout a commencé avec l’accession à la présidence de Frederik De Klerk en septembre 1989. Jusque-là ardent défenseur d’un Parti national (NP), qui, en 1948, a érigé l’apartheid en système de gouvernement, le successeur de Pieter Botha a pris conscience que l’expérience de « développement séparé » a échoué. Sous son impulsion, les lois ségrégationnistes sont abrogées une à une, jusqu’à l’abolition totale de l’apartheid en juin 1991, tandis que les principaux dirigeants nationalistes du Congrès national africain (ANC) sont libérés en février 1990. Parmi eux, Nelson Mandela, détenu depuis vingt-sept ans. Les négociations entre le gouvernement et l’ANC peuvent commencer.
S’ouvre une période de relations tumultueuses entre De Klerk et Mandela, mais les deux hommes s’entendent sur l’essentiel : placer l’Afrique du Sud sur les rails de la démocratie. L’attribution conjointe du prix Nobel de la paix 1993 couronnera leurs efforts. Un accord de gouvernement entre le Parti national et l’ANC débouche sur l’organisation des élections d’avril 1994.
Du 26 au 28 avril, ce sont quelque 23 millions d’électeurs qui sont appelés à se rendre aux urnes. Il leur revient de désigner les membres des institutions – Parlement national et conseils provinciaux – qui gouverneront le pays pendant cinq ans. Sur les dix-neuf partis en lice, la plupart sont appelés à faire de la figuration. C’est le cas par exemple du Parti du droit chemin et de la simplicité (Kiss) et de l’Organisation sportive pour les contributions collectives et l’égalité des droits (Soccer). L’ANC remporte près de 63 % des voix et le Parti national de De Klerk 20 %. S’il obtient de bons scores au Natal, l’Inkhata Freedom Party (IFP) de Mangosuthu Buthelezi, parti dominé par les Zoulous, est balayé au plan national, ne recueillant que 10 % des suffrages.

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Deux semaines plus tard, le 9 mai, les quatre cents députés nouvellement élus portent Nelson Mandela à la présidence de la République. Du haut du balcon de l’hôtel de ville du Cap, celui-là même où il était apparu le 11 février 1990, deux heures après sa libération, il s’adresse aux dizaines de milliers de personnes venues l’acclamer : « Une ère nouvelle s’ouvre pour notre pays et pour notre peuple. »
Dans un premier temps, un gouvernement d’union nationale est formé. Thabo Mbeki hérite de la vice-présidence et Frederik De Klerk devient second vice-président. En mai 1996, l’adoption par le Parlement d’une nouvelle Constitution met fin à la période de transition. L’ANC règne désormais en seul maître.

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