L’agriculture fait son aggiornamento
Lancement d’une ambitieuse réforme du secteur à l’occasion du troisième Salon international de l’agriculture du Maroc (SIAM), à Meknès.
Sur la route qui mène de Fès à Meknès, la vie rurale suit son train-train quotidien. Les femmes portent leurs fardeaux, les hommes conduisent leurs ânes, les gamins courent les champs, les blés poussent après le passage providentiel des dernières pluies. De temps à autre, on aperçoit un vieux tracteur tirant une charrette, un des rares signes d’entrée dans la modernité.
Le contraste est saisissant avec les moissonneuses batteuses dernier cri, les produits ethniques (huile d’olive, d’arganÂ), les dodus animaux de foire exposés au Salon international de l’agriculture du Maroc (SIAM), qui tient sa troisième édition du 23 au 28 avril 2008, au coeurde la vielle ville de Meknès. Une vitrine que les autorités aimeraient dupliquer à l’échelle des grandes régions du pays. Car, hormis quelques exploitations intensives (fruits, légumes, tomatesÂ) tournées vers l’Union européenne, l’agriculture marocaine reste dominée par la céréaliculture avec des rendements assez faibles et totalement dépendants des caprices du ciel. Malgré les différentes facilités accordées par l’État (subventions, incitations fiscalesÂ) au cours des vingt dernières années, les grands plans agricoles successifs n’ont pas permis de changer les choses.
Conscient du besoin de stabiliser les campagnes pour enrayer l’exode rural, le Palais compte sur l’homme d’affaires Aziz Akhannouch, patron du groupe Akwa, pour réformer le secteur. Nommé au lendemain des élections législatives de septembre 2007, le nouveau ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime a abandonné la présidence d’un empire évalué à 10 milliards de DH et emmené dans ses bagages quelques-uns de ses brillants directeurs formés en Europe et aux États-Unis. Il a également confié au cabinet McKinsey le soin de réaliser des études de diagnostic et de proposer des solutions. Principaux freins au développement : la prédominance des petites fermes (85 % des exploitations ont moins de 3 ha) conjuguée à la complexité des régimes fonciers, en particulier des terres collectives ou frappées de l’indivision. Le statut de quelque 750 000 exploitations mérite d’être clarifié avant que les banques s’engagent. L’argent est là, puisque l’excédent de trésorerie du Crédit agricole du Maroc s’est élevé à 12 milliards de DH en 2007 et pourrait atteindre 20 milliards en 2008.
Aziz Akhannouch a présenté à Meknès une ambitieuse réforme baptisée « Plan Maroc vert » en prélude à l’ouverture du salon. « L’agriculture doit être le principal moteur de croissance dans les dix ou quinze prochaines années », a-t-il expliqué. Le ministre s’est engagé à lever la contrainte foncière, à développer les cultures à haute valeur ajoutée (fruits et légumes, sucre, huile d’olive, produits laitiersÂ) et à favoriser l’organisation des producteurs. « Nous avons l’espoir de réussir, explique Brahim Zniber, à la tête du groupe éponyme, premier producteur de vins du pays. Comme en France au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le succès de la réforme dépend de deux grandes conditions : le remembrement des terres et la mise en place de crédits à long terme permettant la mécanisation des exploitations. »
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