[Tribune] Le destin de l’éléphant se trouve dans les mains des Africains

Les pays africains de l’Initiative pour la protection des éléphants ont participé jeudi 11 octobre à la Conférence sur le commerce illégal d’espèces sauvages, à Londres. Le président gabonais, dont le pays est membre de cette alliance depuis sa création, revient sur les enjeux de ce combat.

Un groupe d’éléphants dans le Delta du Okavango, au Botswana, en 2013. © Charmaine Noronha/AP/SIPA

Un groupe d’éléphants dans le Delta du Okavango, au Botswana, en 2013. © Charmaine Noronha/AP/SIPA

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Publié le 16 octobre 2018 Lecture : 4 minutes.

Le trafic illégal d’espèces sauvages et de produits dérivés est un fléau pour l’humanité. C’est cruel, poussant les espèces à l’extinction et privant les pays en développement de leur patrimoine naturel et d’opportunités futures de prospérité.

Ce commerce – estimé par la Commission européenne à environ 19 milliards d’euros par an – est un important business, géré par des réseaux impitoyables qui prospèrent et créent l’anarchie. Il est lié au trafic d’armes, de drogue et à la propagation de la terreur. Mon pays, le Gabon, est en première ligne de la bataille pour mettre fin à ce commerce. C’est pourquoi je me suis rendu à Londres pour la Conférence sur le commerce illégal d’espèces sauvages (IWT) convoquée par le gouvernement britannique [jeudi 11 octobre, ndlr].

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Les éléphants sont bien évidemment l’une des espèces les plus menacées. Environ 55 éléphants d’Afrique sont tués chaque jour pour leur ivoire, dont la majeure partie est exportée illégalement en Asie. Si cela continue, les éléphants pourraient disparaître d’Afrique d’ici une génération.

Nous avons perdu 25 000 éléphants dans un seul parc national

Dans les forêts d’Afrique centrale, y compris dans certaines régions du Gabon, nous avons assisté à un terrible massacre ces dix dernières années. Nous avons perdu 25 000 éléphants dans un seul parc national. Le désespoir est souvent la solution de facilité. Pourtant, ces revers n’ont fait que renforcer notre détermination à inverser la tendance.

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En 2014, quand le Royaume-Uni accueillait la Conférence IWT, je m’étais joint à quatre autres dirigeants africains pour former une alliance nommée l’Initiative pour la protection des éléphants, ou EPI. Nous nous sommes unis autour d’un but commun : mettre un terme au commerce de l’ivoire et sauver nos éléphants. Quatre ans plus tard, notre groupe initial de cinq pays en comporte dix-neuf.

Nous couvrons l’ensemble du continent, du Sahel aride à la corne de la Somalie, des prairies du Kalahari aux forêts denses du bassin du Congo. Nous incluons des pays qui tentent de se relever après des années de guerre civile et d’autres, comme le mien, qui ont connu des décennies de paix. Nous sommes francophones, anglophones et lusophones.

Notre détermination à mettre fin au commerce de l’ivoire et à fermer les marchés nationaux de l’ivoire a porté ses fruits

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De manière significative, la plupart des éléphants d’Afrique survivants se trouvent aujourd’hui dans les pays de l’EPI. Non seulement nous avons grandi – et de plus en plus de pays souhaitent nous rejoindre – mais nous avons accompli beaucoup de choses.

Notre détermination à mettre fin au commerce de l’ivoire et à fermer les marchés nationaux de l’ivoire a porté ses fruits. Nous sommes ravis que la Chine ait interdit l’ivoire au cours de cette année. Hong Kong suivra bientôt. Nous nous félicitons de la nouvelle législation britannique limitant les ventes d’ivoire et des signaux selon lesquels le reste de l’UE et l’Australie suivront.

Nous sommes en train de créer un monde où il n’est plus acceptable de considérer l’ivoire comme un produit pouvant être échangé contre un gain financier. Nous utilisons une nouvelle technologie et des protocoles de sécurité communs pour empêcher le vol de nos stocks d’ivoire nationaux. Plusieurs pays de l’EPI, tels que le Gabon, le Kenya et le Malawi, ont introduit de nouvelles lois strictes sur la protection de la faune afin de garantir l’arrestation d’un nombre accru de braconniers et de les mettre en prison plus longtemps.

Nous devons maintenant regarder vers l’avenir. Le Gabon et d’autres pays de l’EPI se sont rendus à Londres avec des plans décrivant la manière dont les éléphants peuvent être conservés pendant des décennies.

Nos plans ne se concentrent pas uniquement sur la lutte contre le braconnage, mais également sur la promotion des emplois et des revenus en lien avec le tourisme

Nos Plans d’action nationaux pour les éléphants (NEAP) sont conçus pour sauver nos éléphants et protéger les environnements naturels, mais également pour améliorer la vie de nos populations humaines en développement.

Nos plans ne se concentrent pas uniquement sur la lutte contre le braconnage, mais également sur la promotion des emplois et des revenus en lien avec le tourisme. Nous devons convaincre les agriculteurs qui vivent aux côtés des éléphants, et dont les récoltes sont souvent endommagées par ces derniers, que ces animaux ne sont pas seulement des destructeurs mais surtout des créateurs de richesse économique.

Nous reconnaissons notre responsabilité. En fin de compte, le destin de l’éléphant se trouve dans les mains des Africains. Nous avons montré que nous étions prêts à faire des sacrifices.

Mon propre pays, le Gabon, a classé environ 11 % de son territoire en parcs nationaux au début de ce millénaire, parfois en faisant face à une opposition locale. En Afrique, plus de 300 rangers ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions au cours des dix dernières années, souvent en luttant contre des braconniers mieux armés.

Nous poursuivrons notre lutte, mais nous avons besoin de soutien pour relever le défi. Pour l’EPI, c’est le moment de vérité. Si nous pouvons financer nos plans de conservation, nous pouvons sauver nos éléphants. La Conférence IWT nous offre une opportunité unique, en s’appuyant sur un exemple de réussite en matière de conservation en Afrique tout en portant un coup sérieux au commerce illégal d’espèces sauvages

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