Afrique subsaharienne : blâmes tous azimuts

Publié le 29 mars 2005 Lecture : 3 minutes.

Si l’on en juge par le nombre de pages que leur consacre le département d’État, le Zimbabwe, le Soudan, la RD Congo et la Côte d’Ivoire sont les quatre pays d’Afrique subsaharienne les plus concernés par les violations des droits de l’homme. À certains égards, le rapport apparaît même comme un réquisitoire assorti d’un verdict sans appel.
« Le gouvernement zimbabwéen, écrivent par exemple ses auteurs, a mené une campagne concertée de violence, de répression et d’intimidation, qui se caractérise par un mépris complet pour les droits fondamentaux, l’État de droit et le bien-être des citoyens. » Ils dénoncent notamment les brutalités à l’encontre des opposants politiques et des dirigeants syndicaux, les multiples interdictions de journaux privés et la mise en uvre d’une réforme agraire qui s’est traduite par la confiscation des terres des fermiers
blancs. Lentement mais sûrement, Robert Mugabe devient « l’un des ennemis intimes » des États-Unis. Logiquement, le texte a été accueilli à Harare comme l’expression d’un acharnement impérialiste. Il n’est pas sûr que cet échange stérile ait beaucoup contribué
à l’amélioration de la situation avant les élections législatives qui devaient avoir lieu le 31 mars. Les autorités zimbabwéennes ont refusé la présence d’observateurs américains et européens.
Deuxième « cible » américaine : le Soudan. « Les autorités, note le département d’État, continuent de restreindre toutes les libertés, qu’il s’agisse de la liberté d’expression, de réunion ou d’association, de la liberté de la presse et de la liberté religieuse ou de la liberté de déplacement des citoyens. » Si le rapport salue les accords de paix conclus entre les autorités et l’Armée populaire de libération du Soudan (SPLA), après vingt et un ans de conflit dans le sud du pays, il s’attarde avant tout sur la situation dans le Darfour. Bref, le président Omar al-Béchir est plus que jamais un paria.
Le verdict est plus contrasté s’agissant de la RD Congo. Engagé dans une tâche titanesque de réunification du pays et de redressement économique, le gouvernement de Joseph Kabila bénéficie d’une certaine indulgence. Les exactions perpétrées par les forces de sécurité ne sont pas passées sous silence, mais le département d’État attire surtout l’attention sur le « danger représenté par les groupes armés et les milices qui se déplacent d’un pays à l’autre dans la région des Grands Lacs et s’en prennent aux civils ».
En Côte d’Ivoire, les protagonistes de la crise sont renvoyés dos à dos, forces gouvernementales et rebelles étant accusés de se livrer à des « abus ». L’enchaînement des événements du mois de novembre 2004 est soigneusement reconstitué, depuis l’attaque lancée par l’armée ivoirienne contre les Forces nouvelles et le cantonnement de l’opération Licorne jusqu’aux manifestations antifrançaises. Le département d’État revient également sur la répression des rassemblements de l’opposition, les 25 et 26 mars à Abidjan (au moins cent morts, selon l’ONU): la responsabilité des forces de sécurité est
clairement mise en cause. Du côté de l’ex-rébellion, les affrontements entre les partisans de Guillaume Soro et ceux du sergent-chef Ibrahim Coulibaly sont évoqués. Autre dossier: l’assassinat de Jean Hélène, le correspondant de RFI, et la disparition de Guy-André Kieffer.
Pour le reste du continent, le rapport s’apparente, d’un pays à l’autre, à une sorte de catalogue d’exactions : brutalités policières, entraves aux libertés, conditions de détention détestables, impunité judiciaire, discriminations religieuses, travail des
enfants, trafic d’êtres humains, etc. Le Nigeria est particulièrement visé. Au Cameroun, le rapport cite plusieurs cas de torture et d’arrestations arbitraires d’opposants. À un degré moindre, le recours à la violence par les forces de l’ordre gabonaises est également dénoncé. En Guinée équatoriale, où les réserves pétrolières suscitent bien des convoitises, le président Obiang Nguema est néanmoins invité à démocratiser son régime.
Au Congo-Brazzaville, l’accent est mis sur les agissements de certains éléments de l’armée et sur la situation dans la région du Pool, où se trouvent les miliciens du pasteur Ntoumi. En Sierra Leone et au Liberia, Washington prend acte des progrès enregistrés après des années d’une effroyable guerre civile, mais souligne que les
populations sont toujours localement harcelées par des chefs de guerre.
Quelques bons élèves, parmi lesquels le Sénégal et le Mali, sont néanmoins distingués : dans ces deux pays, « les gouvernements respectent les droits de leurs citoyens », même si les conditions d’arrestation et de détention pourraient être sensiblement améliorées.

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