Art contemporain : deux ventes aux enchères pour les artistes africains
Les maisons de vente parisiennes Cornette de Saint Cyr (23 octobre) et Piasa (14 novembre) organisent deux enchères successives consacrées aux artistes africains contemporains, avant et après la foire d’art Also Known as Africa (AKAA). Chacune dans leur style. Points communs et différences.
Il y a quelques années seulement, la plupart des artistes originaires du continent se récriaient dès que l’on évoquait le concept d’ « art africain contemporain ». Que l’on se souvienne simplement de la polémique soulevée par le plasticien camerounais Barthélémy Toguo contre le pavillon « africain » de la Biennale de Venise, en 2007, alors qualifié de « ghetto ». Onze ans plus tard, le terme est, sinon accepté par les artistes eux-mêmes, utilisé sans complexe.
Par les foires qui y sont spécifiquement consacrées comme 1-54 à Londres ou AKAA (Also Known as Africa) à Paris (du 9 au 11 novembre, au Carreau du Temple), par les galeristes comme par les maisons de vente aux enchères qui pour des raisons de marketing évidentes entendent cibler les collectionneurs intéressés par l’Afrique, avant d’atteindre les autres.
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Élargir le public
Même si ces artistes ont des particularités que nous ne nions pas, nous ne voulons pas les isoler, nous souhaitons au contraire les faire dialoguer avec leurs pairs
Aujourd’hui, alors que la Foire internationale d’art contemporain (Fiac) s’achève et que se profile l’ouverture d’AKAA, ce sont deux ventes aux enchères successives qui mettent à l’honneur l’art africain contemporain, organisées respectivement par les maisons Cornette de Saint Cyr (le mardi 23 octobre 2018) et Piasa (le mercredi 14 novembre 2018). Deux ventes, deux approches différentes, deux époques différentes et quelques points communs.
Chez Cornette de Saint Cyr, la vente intitulée « Dans l’intimité de l’art contemporain africain – La collection Kleine-Gunk » est intégrée dans un ensemble plus vaste consacré à l’art contemporain. « Nous ne voulons pas faire de ventes que l’on pourrait qualifier d’« éthniques », explique Arnaud Cornette de Saint Cyr. Même si ces artistes ont des particularités que nous ne nions pas, nous ne voulons pas les isoler, nous souhaitons au contraire les faire dialoguer avec leurs pairs. »
L’objectif poursuivi n’est pas commercialement aberrant. « Nous avons obtenu plusieurs records mondiaux pour des œuvres du Congolais Chéri Samba, et les combats d’enchères n’ont pas eu lieu seulement entre des collectionneurs d’art africain contemporain, poursuit-il. Le public s’élargit et il faut lui montrer d’autres choses, ouvrir le spectre. »
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Peu connue en France, la collection du médecin gynécologue allemand Bernd Kleine-Gunk a été constitué à partir de la fin des années 1980 – un peu avant l’exposition Les Magiciens de la terre – et rassemble des artistes comme Chéri Samba, Frédéric Bruly Bouabré, Bodo, Moké, George Lilanga, Cyprien Tokoudagba, Richard Onyango, Godfried Donkor, Twins Seven-Seven ou encore le rare Eduardo Saidi Tingatinga.
Bernd Klein-Gunk, qui a fait don d’une partie de sa collection au centre d’art Iwalewahaus (université de Bayreuth), était proche de la plupart des artistes qu’il achetait. « Il passait des soirées dans les boîtes de nuit avec Chéri Samba », précise même Cornette de Saint Cyr.
Samba en poids lourd de l’art
Ledit Chéri Samba sera sans nul doute le poids lourd de cette vente avec plusieurs œuvres estimées à plus de 15 000 euros, dont l’impressionnant Combat du siècle (1997, estimé entre 18 000 et 20 000 euros).
Les amateurs apprécieront aussi le portrait de groupe La planète de Chéri Samba (16 000 – 18 000 euros) où l’artiste a peint ses collègues Moké, Bodo, Pambu, Chéri Chérin, Chéri Benga, Maître Syms, Sim Simaro et Shula, et les plus grivois se régaleront avec La Crapule (14 000 – 16 000). Au total, ce sont 78 pièces d’artistes africains, dont 67 de la collection Kleine-Gunk, qui seront dispersées.
De son côté, la maison Piasa propose comme à son habitude une vente exclusivement consacrée aux artistes africains contemporains : c’est la huitième du genre. Organisée par Christophe Pierson, elle est beaucoup plus variée (à tous les niveaux : prix, époques, artistes, origines…) et offre un panorama très vaste de la création africain contemporaine.
Impossible de dresser une liste exhaustive, mais on y retrouve notamment des œuvres de Soly Cissé, Aboudia, Barthélémy Toguo, Bruce Clarke, Dominique Zinkpè, etc. Les prix s’échelonnent entre 1 000 et 50 000 euros, avec des estimations prometteuses pour une sculpture sans titre de Ben Enwonwu (entre 30 000 et 50 000 euros), pour L’Adorateur de Chéri Samba (20 000 à 30 000 euros) ou encore pour le puissant The telephone call, de l’Ougandais Ian Mwesiga (15 000 à 25 000 euros).
Avec deux ventes aux enchères de cet ordre, les collectionneurs devraient trouver de quoi se faire plaisir. Et même s’ils ne peuvent en aucun cas – et heureusement ! – dire à eux seuls la valeur d’un artiste, les résultats donneront une idée de l’évolution du marché de l’art contemporain dit « africain ».
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