Législatives au Gabon : le parti d’Ali Bongo accentue sa majorité à l’Assemblée nationale
Les résultats du second tour ont confirmé la large victoire du parti présidentiel PDG, l’opposition ayant réussi à sécuriser 17 élus à l’Assemblée. Une opposition dont aucun leader n’a réussi à conquérir de sièges.
Sans surprise, l’écrasante victoire du Parti démocratique gabonais (PDG) s’est confirmée lors d’un second tour sans réel enjeu. Le parti au pouvoir était assuré d’avoir la majorité à l’issue du premier tour. Sur les 59 circonscriptions qu’il restait à attribuer, le PDG a remporté 25 sièges, selon les résultats proclamés lundi 29 octobre en début de soirée par le Centre gabonais des élections (CGE), en charge de l’organisation du scrutin. Le parti au pouvoir compte, au total, 98 députés dans le nouvel hémicycle.
Les Démocrates (LD), le parti de Guy Nzouba-Ndama sera la principale force d’opposition représentée au Parlement. La formation de l’ancien président de l’Assemblée nationale – sorti au premier tour dans le Koulamoutou – , qui avait déjà obtenu trois membres élus à l’issue du premier tour, comptera onze de ses représentants dans la future assemblée.
L’Union nationale (UN) a obtenu deux sièges, tandis que le Rassemblement héritage et modernité (RHM) sera représenté par quatre députés. Le président du parti, Alexandre Barro-Chambrier, menait un des duels les plus attendus du second tour face au jeune pdgiste Séverin-Pierre Ndong Ekomi. Arrivé en tête au premier tour avec 59 voix d’avance sur son adversaire direct, ABC n’a pas réussi à l’emporter au second tour.
ABC battu par le « jeune du mapane »
L’affrontement entre le RHM et le PDG a finalement penché en faveur du candidat du parti au pouvoir, Séverin-Pierre Ndong Ekomi qui a obtenu 51,91% des voix. Placardé dans tout le quartier avec le slogan « Le changement, c’est maintenant », celui qui se présente comme un « jeune issu du mapane (habitation de fortune des quartiers populaire) », en opposition à celui qu’il qualifie de « fils de » et de « baron », fait partie des nouveaux visages que le PDG a propulsé en politique.
« Le nom de Barro-Chambrier est synonyme d’arrogance dans nos quartiers. Rien n’a changé sous les différents mandats de la famille », avait estimé Séverin-Pierre Ndong Ekomi auprès de Jeune Afrique, quelques jours avant le vote du second tour.
Ça fait 30 ans que les Barro-Chambrier règnent en maître ici, et on a toujours les mêmes problèmes
« Ça fait 30 ans que les Barro-Chambrier règnent en maître ici, et on a toujours les mêmes problèmes. On veut autre chose, un visage nouveau », expliquait une militante du PDG, parapluie du parti dans une main, venue assister au dépouillement samedi 27 octobre.
« Regardez les rues, les ordures qui s’entassent, les maisons qui s’inondent parce que les réseaux d’évacuation sont bouchés. Ce n’est pas la faute d’un député si tout est comme ça. Ce n’est pas le seul quartier de la ville dans cet état », dénonçait de son côté un habitant du quartier d’Akébé.
Fort taux d’abstention
Le vote, qui devait permettre aux Gabonais de tourner la page de la présidentielle de 2016, a surtout été marqué par une abstention importante. Fortement mobilisés il y a deux ans, les électeurs ne se sont pas déplacés pour ce premier scrutin depuis la victoire contestée d’Ali Bongo. Le taux d’abstention, qui oscillait entre 14 et 34% à Libreville au premier tour, s’est grandement accentué au second. Certaines circonscriptions de Libreville ont enregistré d’inquiétants taux de participation, comme dans le premier siège du 5e arrondissement de la capitale, où seulement 9,63% des électeurs se sont rendus aux urnes.
« On a échoué à mobiliser », glissait un soutien d’ABC dans un soupir, au moment du dépouillement. Au premier tour, seul 34,47% des électeurs s’étaient rendus aux urnes dans l’arrondissement. « ABC » avait alors critiqué de nombreuses fraudes du PDG. Des critiques qu’il a réitéré le jour du second tour, après avoir déposé son bulletin.
Avec autant d’abstention, je ne pense pas que le terme de raz-de-marée soit approprié
« Il va falloir faire l’autopsie de ce fort taux d’abstention, comprendre pourquoi nous n’avons pas réussi à convaincre nos concitoyens », estime Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi, candidat de l’UN, sorti au premier tour dans la commune d’Akanda, au nord de Libreville. « Les gens pensent que nous, les politiciens, roulons pour nous-mêmes. Je pense qu’il faut aussi s’interroger sur la valeur d’une victoire de l’opposition avec autant d’abstention. Je ne pense pas que le terme de raz-de-marée soit approprié », ajoute-t-il.
2023 en ligne de mire
Rien d’inquiétant pour le secrétaire du parti au pouvoir, qui a raflé la majorité dès le premier tour. « Il y a toujours une forte abstention lors des scrutins intermédiaires », défend pour sa part Éric Dodo Bounguendza, le secrétaire général du PDG. « Je pense aussi que ce taux d’abstention s’explique par la confusion causée au premier tour par l’organisation simultanée des élections locales », estime-t-il.
Installé dans son QG de campagne à Bikele, en banlieue de Libreville, Paul Biyoghe Mba, ancien Premier ministre d’Ali Bongo élu au premier tour, dresse un bilan un peu plus nuancé. « Peut-être que les gens ne sont, en ce moment, plus très intéressés par la politique, qu’ils se demandent ce qu’ils y gagnent », explique-t-il. « Il faut que l’on corrige ça pour être prêt à mobiliser les gens en 2023 ».
Dans les allées de l’école d’Akébé, pendant le dépouillement, le sujet occupait plusieurs discussions. Assis sur les marches d’un des escaliers de l’établissement, Arnaud et Éric-Simon ont cessé de suivre le dépouillement. « Quand vous regardez les chiffres des différents bureaux, il y a à chaque fois un tiers des gens inscrits qui ont participé, s’agace Éric-Simon. Ce n’est pas tout de claironner que l’on veut sanctionner le PDG. Si on ne se rend pas au bureau de vote, ça n’a aucun intérêt. »
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