Cécilia, admirable et pitoyable

Publié à la mi-janvier par Flammarion, le Cécilia d’Anna Bitton a déplu à Cécilia ex-Sarkozy, qui a tenté d’empêcher sa diffusion et n’a fait qu’attiser la curiosité des lecteurs et propulser le livre au premier rang des best-sellers.
C’est pourtant un petit ouvrage de 175 pages écrit un peu vite par une jeune journaliste qui cherche son style mais a su tendre l’oreille à une Cécilia désemparée.
Et qui avait besoin de parler sans craindre de se répéter. Ni de se contredire.
Anna Bitton a pris des notes au vu et au su de Cécilia, sans que celle-ci trouve à y redire, mais sans aller jusqu’à faire de la journaliste une amie ni même une confidente.
Et celle-ci n’a pas résisté à la tentation de rassembler ses notes, pour tenter de composer le portrait d’une Cécilia au cur de l’actualité.
Sans surprise, on découvre une femme admirable et pitoyable, courageuse et gâtée, désintéressée mais ayant besoin d’argent, d’amour et de considération : un concentré de contradictions et d’irrationalité.
Lisez ces pépites, vous saurez qui est Cécilia, pourquoi elle a quitté son deuxième mari, avant de revenir, puis de repartir.

Je suis revenue parce que Nicolas a besoin de moi [dit-elle à Anna Bitton]. Je ne sais pas si je vais tenir. Je suis mal dans ma peau. Mais je suis là. J’aiderai Nicolas. Je ne suis pas une folle. J’ai beaucoup de respect pour Nicolas. C’est vraiment quelqu’un de formidable, mais, de mon côté, il n’y a plus la flamme.
C’est par respect pour la fonction que je suis revenue ! Je me sentais responsable ! Le chemin de ma destinée passait par le fait d’emmener Nicolas là. Je devais revenir pour l’y emmener. C’était mon devoir.
Pendant toute ma vie avec Nicolas, pendant dix-huit ans passés avec lui, jamais, à la maison, il n’a mangé avec nous. Je mangeais avec les enfants, lui mangeait un plateau-repas en travaillant. C’est une belle mécanique. Quel bonhomme ! Nicolas, c’est un homme politique, il n’est pas de la même espèce que nous, il n’a pas les mêmes codes, pas la même morale. C’est pour cela qu’il est arrivé là où il est. »

Philippe Séguin dit qu’elle a du « cran ». Elle est la femme qui a quitté un président de la République au faîte de sa gloire, de sa popularité, de son pouvoir.
[Cécilia ne dit pas autre chose :] « La totalité des femmes rêveraient d’être à ma place, et moi, je rêve de me tirer. »
Jean-Michel Gaillard, ancien conseiller de François Mitterrand, scénariste et ami du couple (mort en 2005) : « Quand on les voit ensemble, on sent l’attention extrême qu’elle lui porte. Cécilia est très urbaine et très réservée, mais en même temps, elle observe. Elle ne la ramène pas, mais elle jauge, elle toise.
Nicolas passe son temps à dire : « Tu es d’accord, Cécilia ? « Qu’en penses-tu, Cécilia ? » Il l’interroge tout le temps du regard, il cherche son approbation. Elle n’est pas forcément équanime : elle a des perceptions et des sentiments qui peuvent être tranchés. »

Avant d’être une midinette, une femme fantasque ou une faiseuse de rois, Cécilia est une maman. C’est sa première vocation. Quand ça ne va pas, elle prend ses « poussins sous le bras », comme elle aime à dire, et elle s’en va. C’est ce qu’elle fit quand elle quitta Jacques Martin. Ce qu’elle refit récemment. Son clan à elle, c’est celui-là. Ses enfants.

Une femme d’exception. Nul ne le conteste, même ceux qui ne comptent pas parmi ses plus fervents thuriféraires, à l’instar du ministre Brice Hortefeux. « Je pense qu’elle est très déséquilibrée, voilà, point. Les déséquilibres conduisent à l’exception », estime-t-il désormais, sûr de son diagnostic. Et l’ami de trente ans du président de s’enflammer : « On n’a pas le recul mais c’est inouï, c’est exceptionnel, ce qu’elle lui a fait, à Nicolas. Une femme qui ne va pas voter pour lui ; une femme qui refuse de venir fêter la victoire de son mari ; une femme qui quitte le G8 en disant qu’elle va faire le gâteau de sa fille ; une femme qui refuse d’aller chez le président de la première puissance du monde, après avoir dit oui ! C’est grave et c’est exceptionnel ! »

[Cécilia raconte ses rencontres avec Mouammar Kadhafi : c’est un morceau de bravoure.]
« Très vite, j’ai eu la mainmise sur Kadhafi, j’ai senti que j’avais un pouvoir sur lui. Au bout de quarante minutes, il a demandé à me parler seule. Mabrouka, sa femme, est venue me voir : « Vous ne pouvez pas savoir le bonheur de vous rencontrer. » Elle m’emmène dans une pièce, claque la porte. Je suis seule. Et là, je le vois. Je lui dis : « Moi, je vous offre une ouverture démocratique sur le monde. » Il me dit : « Je vous demande de rencontrer ma fille Aicha. Tu es une femme courageuse et formidable, je voudrais qu’elle te ressemble. » Et là, je me retrouve dans une propriété hollywoodienne, devant une grande blonde d’un mètre quatre-vingt d’environ trente ans. »

[Cécilia n’est pas une femme intéressée, mais cette divorcée a besoin d’argent :]
« Est-ce vrai qu’une photo de moi avec Richard vaut 500 000 euros ? Parce que si c’est vrai, je veux bien partager avec le paparazzi ! »

[Conclusion de l’auteur de ce livre-portrait :]
Elle ne sait pas, Cécilia, qu’à elle seule, elle incarne merveilleusement la quintessence de la contradiction féminine. Et que c’est pour cela qu’on l’aime ou qu’on la déteste, au choix. Elle a en commun avec « Nicolas » une fascination pour le monde de l’argent et des m’as-tu-vu, le monde des Rolex et des grands couturiers.
Le jour de la signature de sa convention de divorce, le 15 octobre, au volant de sa mini, elle roulait vers son déjeuner dans les couloirs de bus. Les policiers la dévisagèrent et la laissèrent passer. « Ils n’osent pas m’arrêter, elle s’esclaffa, ravie ! Parfois, ils m’arrêtent et me laissent repartir. » Elle s’en amusait. Elle n’avait pas envie que cela change. Elle ne pensait même pas que cela pourrait changer : « On ne peut pas dire qu’elle n’aimait pas le pouvoir ou les effets du pouvoir », commente à présent Brice Hortefeux.