Après Konaré, Konaré…

Si les prérogatives du président de la Commission de l’UA venaient à être renforcées lors de la prochaine rencontre d’Addis-Abeba, l’ancien chef de l’État malien pourrait accepter une prolongation de son mandat. Au grand dam des quatre candidats déjà lanc

Publié le 28 janvier 2008 Lecture : 4 minutes.

La Commission de l’Union africaine (UA) disposera-t-elle d’un nouveau patron à l’issue du 10e sommet des chefs d’État de l’organisation, prévu du 31 janvier au 2 février prochains ? La question, qui tient en haleine le microcosme diplomatique africain depuis des mois, reste entière. Deux des six candidats déclarés à la succession du Malien Alpha Oumar Konaré, qui n’a pas sollicité le renouvellement de son mandat, viennent de déclarer forfait : la ministre burundaise des Relations extérieures, Antoinette Batumubwira, et l’ancien président mauricien, Cassam Uteem. Ces désistements pourraient bien profiter à Jean Ping, le vice-Premier ministre gabonais chargé des Affaires étrangères, qui fait figure de favori. Fortement soutenu par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (Ceeac) et par le bloc francophone, ce diplomate chevronné et plein d’entregent est, sur le papier, le candidat qui a le plus d’envergure. Car ni le juriste sierra-léonais Abdulai Osman Conteh, ni l’ancien Premier ministre du Swaziland Barnabas Sibusiso Dlamini, ni l’ambassadrice zambienne Inonge Mbikusita-Lewanika – ses challengeurs -, ne peuvent se prévaloir de l’expérience internationale de ce très proche du chef de l’État gabonais, Omar Bongo Ondimba, qui a présidé, de septembre 2004 à septembre 2005, la 59e session de l’Assemblée générale des Nations unies.

Tractations en coulisses
« Le seul vrai handicap de Ping réside dans son statut, analyse un diplomate en poste à Addis-Abeba. Il n’est pas ancien chef d’État, à la différence de Cassam Uteem. Or, pour marquer la rupture avec la défunte Organisation de l’unité africaine [OUA], les dirigeants de l’Union africaine [UA] avaient porté leur choix sur un ex-président, en la personne de Konaré. Certains auraient pu être tentés, par souci de cohérence, d’appuyer le Mauricien. » Pour le Gabonais, l’horizon se dégage donc peu à peu. Son déplacement à Alger, mi-décembre, a été payant. Le pays d’Abdelaziz Bouteflika, assez réticent au départ, en raison du tropisme promarocain de Libreville, paraît mieux disposé à son égard. Les Algériens souhaitent conserver le poste de commissaire Paix et Sécurité, qu’occupait Saïd Djinnit, en présentant la candidature de Ramtane Lamamra. Ils auront besoin des votes de l’Afrique centrale pour barrer la route au Nigérian John Kayode Shinkaiye, qui convoite également ce prestigieux département de la Commission.
Jean Ping sait qu’il ne jouit pas des faveurs de l’Afrique du Sud, l’autre puissance qui compte sur la scène continentale. Pretoria estime en effet que le tour de l’Afrique australe est venu et que la présidence de la Commission doit échoir à un représentant de cette région, traditionnellement lésée dans la répartition des maroquins. Mais, avec les candidatures concurrentes de la Zambie et du Swaziland, les pays de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) vont à la bataille en ordre dispersé. Et Inonge Mbikusita-Lewanika et Barnabas Sibusiso Dlamini sont d’une pointure inférieure au Gabonais. Pour autant, et même si ce dernier est bel et bien en pole position aujourd’hui, les jeux sont loin d’être faits.

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« Laisser une maison en ordre »
Déjà deux fois reportée, la désignation du président de la Commission pourrait l’être une nouvelle fois, et Alpha Oumar Konaré se voir contraint de prolonger de six mois son bail à la tête de l’organisation. Cette hypothèse, évoquée depuis plusieurs mois avec insistance dans les milieux diplomatiques, a pris encore davantage de consistance après la remise du rapport du panel des treize hautes personnalités chargées, en septembre 2007, par le président ghanéen John Kufuor d’auditer le fonctionnement de l’UA.
Le Malien n’a jamais fait mystère de sa volonté de « laisser une maison en ordre » à son successeur. Et n’a cessé de plaider pour une réforme profonde de l’organisation et du fonctionnement de la Commission ainsi que pour un renforcement des pouvoirs de son président. Si son idée d’un mandat unique de six ou sept ans n’a pas été retenue par les panélistes, les autres conclusions du groupe présidé par le Nigérian Adebayor Adededji, ancien patron de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), vont globalement dans le sens des recommandations de Konaré. Les sages se sont ainsi prononcés pour la désignation, sur un même ticket, du président et du vice-président de la Commission, six mois avant l’élection des huit commissaires. Le président aura toute latitude pour leur confier une affectation, alors que, jusqu’à présent, ils étaient élus à la tête d’un département, et étaient de facto inamovibles.
D’autre part, les treize ont proposé de porter à deux ans le mandat du président en exercice de l’Union, contre un an actuellement, de ramener à un – contre deux actuellement – le nombre de sommets annuels ordinaires de l’UA, et d’organiser systématiquement ces derniers à Addis-Abeba, pour des raisons d’économie. Des suggestions de bon sens, sur lesquelles le Conseil exécutif de l’UA, également appelé à réunir d’autres ministres que les seuls chefs de la diplomatie, devrait se pencher sans tarder : il se réunissait, du 27 au 29 janvier, dans la capitale éthiopienne. Si ces pistes de réformes devaient être entérinées, puis avalisées par les chefs d’État, Konaré pourrait alors accepter une nouvelle prolongation de mandat sans donner l’impression de se renier ni de céder à la pression de ses anciens pairs

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