MEDays 2018 : « En réalité, le Maroc est déjà un pays ouest-africain »
La 11e édition du Forum méditerranéen MEDays s’est ouverte jeudi 8 novembre à Tanger. Nouveaux partenariats, nouvelles stratégies, nouvelles politiques… les 150 intervenants réfléchissent aux mutations actuellement en cours sur le continent. Et notamment à la place qu’y occupe le Maroc.
Depuis la baie de Tanger, les rives de l’Europe sont si proches. À seulement quelques kilomètres, de l’autre côté du détroit de Gibraltar, elles se dessinent au-dessus de l’écume des vagues. À portée de main et pourtant jamais elles n’ont semblé aussi loin des regards des participants des MEDays. Les temps ont changé.
Alors que ce forum du think-tank marocain Amadeus, créé par Brahim Fassi-Fihri, le fils du conseiller royal et ex-ministre des Affaires étrangères Taïeb Fassi-Fihri, entre dans sa deuxième décennie d’existence, il se concentre cette année autour des nouveaux partenariats africains.
Quelle place pour le Maroc en Afrique ?
Nouvelles menaces, nouvelles opportunités, nouvelles perspectives… durant trois jours, les 150 intervenants évoqueront le partenariat avec la Chine ou les routes de migrations. Mais lors de cette première journée de réflexion, c’est autour de la place du Maroc en Afrique, et notamment au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) que se sont animés les débats, jeudi 8 novembre.
Le Maroc doit entrer dans la Cedeao. Pourquoi ? Car les Marocains et les Ouest-Africains le veulent
« Je lance un appel : le plus tôt possible, le Maroc doit entrer dans la Cedeao. Pourquoi ? Car les Marocains et les Ouest-Africains le veulent », s’est exclamé l’ancien président béninois, Thomas Boni Yayi. Sur les terres marocaines, les intervenants étaient unanimes. Deux ans après le retour du royaume chérifien au sein de l’Union africaine et dix-huit mois après l’accord de principe des chefs d’Etats ouest africains à son adhésion à la Cedeao, tous se félicitaient des nouvelles perspectives que cette arrivée pourrait engendrer.
« Le Royaume est le premier investisseur en Afrique de l’Ouest. Il est le pays qui y a le plus d’accords, le Roi a fait plus de vingt-cinq visites dans la région. Quel chef d’État peut en dire autant ? », a lancé Brahim Fassi-Fihri. « En réalité, le Maroc est déjà un pays ouest-africain. »
« Assainir les peurs »
« Les entreprises marocaines sont déjà très présentes, comme dans le domaine bancaire ou encore dans le bâtiment », a ajouté l’ancien Premier ministre malien Moussa Mara, voyant dans l’intégration du Maroc un renforcement de l’unité du continent. « Si le Maroc rejoint la Cedeao, cet espace sera la 15ème économie mondiale, la 10ème en 2030 », a pour sa part prédit l’économiste sénégalais Moubarack Lo.
Derrière l’affichage politique, il y a des inquiétudes en Côte d’Ivoire ou au Sénégal, par exemple
À la tribune, l’enthousiasme ferait oublié que, depuis l’accord de principe à l’adhésion du Maroc à la Cedeao donné par les chefs d’États ouest-africains lors de la Conférence de Monrovia, en juin 2017, le dossier peine à avancer.
Le Nigeria, mastodonte de la sous-région, ne cache pas ses réticences, tout comme certains milieux d’affaires. « Derrière l’affichage politique, il y a des inquiétudes en Côte d’Ivoire ou au Sénégal, par exemple. Les milieux d’affaires voient cette arrivée potentielle comme celle d’un concurrent déloyal et sont farouchement contre », confie un des intervenants, bien moins optimiste, lors d’une discussion informelle.
« Il faut assainir les peurs », lance ainsi Luis Filipe Lopes Tavares, le ministre des Affaires étrangères du Cap-Vert, reconnaissant aussi des difficultés juridiques. Comme beaucoup à Tanger, il a dit souhaiter une arrivée « au plus vite » du Maroc dans la Cedeao, « dès 2019, ou 2020… Inch’Allah ! »
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