ITC- [Reportage] N’Zassa Mode festival : l’Afrique rassemblée

L’afro-optimisme était au rendez-vous de la 2e édition du festival N’Zassa mode de Treichville. Avec des designers venus d’Afrique centrale, d’Afrique de l’Est, comme d’Afrique du Sud, la mode du continent est bel et bien tournée vers l’avenir.

Show Hair Queen by nadeenmateky pour le festival N’zassa Mode 2017 à Abidjan © Capture d’écran (Youtube)

Show Hair Queen by nadeenmateky pour le festival N’zassa Mode 2017 à Abidjan © Capture d’écran (Youtube)

eva sauphie

Publié le 16 mars 2017 Lecture : 5 minutes.

Pionniers de la mode sur le continent et nouvelle génération de stylistes réunis, Afrique anglophone et francophone représentées, méthodes artisanales séculaires et mouvance pop internationale associées, une harmonie et un élan de solidarité sere sont fait sentir lors de cette 2e édition du festival N’Zassa Mode de Treichville organisé sous la houlette du designer ivoirien, Ciss Saint Moïse.

Si l’on ne peut pas encore parler de révolution, l’idée d’une nouvelle Afrique, tournée vers l’extérieur et le futur, est bel et bien en marche. Retour sur la soirée des Cultures Métissées et sur son défilé, qui a rassemblé un beau panel de designers sur l’esplanade de Cap Sud, à Abidjan, venus défendre une vision commune de la mode basée sur l’afro-optimisme : thème de la manifestation.

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Les anciens et la relève

La querelle des anciens et des modernes ? Trop peu pour la plateforme N’Zassa Mode et son fondateur Ciss Saint Moïse. Ce maître de l’élégance africaine n’a plus grand-chose à prouver. La parfaite exécution de ses créations parle d’elle-même, lesquelles sont plébiscitées par la Princesse Kamatari, marraine de cette 2e édition, qui ne sort jamais sans sa kiba blanche confectionnée par celui que l’on surnomme « El professor ». Un sobriquet que le designer ivoirien ne porte pas par hasard.

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Ciss Saint Moïse n’hésite pas à transmettre son savoir-faire en formant la nouvelle génération dans ses ateliers. Si ce dernier a clôturé le défilé avec un show teinté de spiritualité, inauguré par l’appel à la prière suivi de l’Ave Maria de Schubert, il a accordé une place de choix à ses petits protégés, Abib Sangaré, Barros Coulibaly et Ousmane Doumbia, qui ont livré un spectacle digne du nom de l’écurie Moïse.

Mais les précurseurs du genre n’étaient pas en reste. Preuve avec Gilles Touré, et le pape de la chemise tie and dye : le styliste Pathé’O, que l’on ne présente plus. L’habilleur de Nelson Mandela, qui recevait il y a quelques jours le Roi Mohammed VI – dans le cadre de sa visite officielle à Abidjan – en tenue étonnamment casual et colorée, n’est pas prêt de quitter la scène.

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« Comme disait Paco Rabanne, tous les couturiers vont mourir la paire de ciseaux en main. Il n’y a pas de retraite pour un couturier » a-t-il confié, backstage, après son show. Les mannequins ont fait virevolter leurs robes à volants, et danser leurs vêtements. Un défilé d’une vitalité et d’une modernité inouïes.

« Plus la mode vieillit, mieux elle se porte », a rappelé le Burkinabé d’origine. Parce que Pathé’O ne cesse de se réinventer. Il a conservé la sève de son label, à savoir les couleurs, « mais [il est allé] vers des matières qui épousent plus le corps, vers la fluidité ». Parce que  « le vêtement est vivant » ! Et ce soir-là, la mode aussi l’était.

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La jeunesse s’est distinguée par son audace et sa créativité, tant à travers la mise en scène que les thèmes des collections présentées. Le show de la Française d’origine congolaise, Nadeen Mateky, reine de la coiffure artistique, a redonné aux cheveux afro ses lettres de noblesses en réhabilitant les coiffes ancestrales des reines africaines. La « hair designer», comme elle se plait à se définir, a fait défiler une armada de souveraines africaines, mères et future maman, ventre bien arrondi de sortie. La création était synonyme de vie ici aussi.

Tandis que la jeune styliste ivoirienne, Nackissa, pro du batik, a également rendu hommage aux femmes africaines sur fond de pop française. Un brassage culturel raccord avec l’ADN du festival.

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La diversité africaine

« L’Afrique centrale, du Sud, les Etats-Unis, on a proposé un vrai brassage culturel », s’est enthousiasmé Ciss Saint Moïse. Le festival N’Zassa a réussi le pari d’offrir à la Côte d’Ivoire une plateforme d’échanges entre des stylistes et les différents pays d’Afrique.

Le Sud-Africain David Tlale est arrivé tout droit de Cape Town, quartier de Johannesburg en pleine effervescence, pour représenter les couleurs de son drapeau à Abidjan. Pourtant installé sur le marché depuis près de 15 ans, et élu designer de l’année 2014 à New York par Applause Magazine, il a tenu à faire le déplacement.

« C’est génial d’être en Côte d’Ivoire, nous avons la possibilité de voir ce que les autres pays d’Afrique font dans la mode. En tant que seul designer sud-africain représenté ici, c’est un honneur », a-t-il avoué, ravi. Parce qu’il croit en une communion de la mode entre les pays d’Afrique. « L’unité entre l’Afrique anglophone et francophone, c’est le pouvoir, particulièrement dans l’industrie de la mode et du design. Et nous devons amener l’Afrique au monde entier. Je crois au fait que l’Afrique est le futur. Et la mode africaine aussi » !

Et quand on regarde le show qu’il a livré, on ne peut que s’en laisser convaincre. Pantalon en dentelle, micro short vert à paillettes et turbans dans les cheveux pour les mannequins hommes, la mode du futur est no gender pour le sud-africain. Quant à la femme, elle est tantôt reine du désert en tenue aérienne, tantôt queen du dancefloor en tenue disco chic. Un style qu’il qualifie d’intemporel, mais non moins impertinent. Tout simplement magique.

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« Ma source d’inspiration pour cette collection : les belles femmes ayant grandi en Afrique. Je propose une vision globale de l’Afrique à travers la mode, c’est pourquoi j’ai utilisé les tissus ankara – plus connus sous l’appellation wax, ndlr -, ou la soie, essentiellement des matières nobles, explique David Tlade. Je voulais vraiment réinterpréter ce que l’Afrique a de mieux à offrir » !

Une évolution qui passe par la connaissance de la culture africaine, comme le show de la Ghanéenne basée à New York, Mimi Plange, et sa réinterprétation de la poupée Ashanti. « Je pense que l’Afrique se connaît mal, alors qu’il y a tellement de diversité. Culturellement, il y a tant de choses à exploiter que l’on se doit de prendre le temps d’explorer tout ce dont l’Afrique recèle », admet Pathé’O. A l’exemple de la styliste camerounaise Anna Ngann Yonn, créatrice de la marque Kreyann, toujours escortée de son mentor et conseiller, le Sud-Africain Jan Malan, fondateur de Face Of Africa.

Connaître l’histoire des « Afriques » pour continuer à l’écrire et mieux réinventer la mode du continent…

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