Stéfi Celma : la révélation de la série Dix pour Cent

Rencontre avec Stéfi Celma, étoile montante du petit écran français, passée par quelques films grand public : de Case départ aux Profs.

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eva sauphie

Publié le 12 mai 2017 Lecture : 5 minutes.

Pétillante pendant notre séance de shooting, se prêtant au jeu des poses avec naturel et fraîcheur, Stéfi Celma, 30 ans, musicienne de formation et comédienne, ressemble à s’y méprendre à Sofia, le personnage qu’elle incarne dans la série qui cartonne sur France 2 : Dix pour Cent. Une création qui dévoile les coulisses du cinéma ayant rassemblé en moyenne 4 millions de spectateurs par saison.

Chevelure bouclée libre, robe-chemise parme irisée signée Floriane Fosso, baskets aux pieds, légèrement maquillée pour l’occasion, la Martiniquaise dégage un vent de simplicité. Elle rougit quand on lui dit qu’elle est l’une des dernières révélations du petit écran français, elle avoue être chanceuse d’avoir été repérée par un directeur de casting. Et d’avoir pu jouer pour le cinéma sans passer par une formation académique. On la sent réaliser elle-même tout ce qui lui arrive. Entretien dans l’un de ses fiefs, le Bar Berliner à Bastille, où siègent des strapontins de cinéma… Naturellement.

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Chanteuse, passée par le conservatoire, et actrice : deux casquettes que l’on retrouve chez Sofia, votre personnage dans la série Dix pour cent. Qu’est-ce qui vous a séduit chez elle ?

A la lecture des scènes, j’ai cerné tout de suite son personnage. J’aime son naturel. J’ai senti que derrière sa gentillesse, il y a avait aussi du caractère. Je savais que Sofia allait avoir une jolie trajectoire.

Puis, ce qui m’a donné très envie, c’est le fait que Cédric Klapisch, dont je suis fan, fasse partie des réalisateurs. A la suite du casting, j’ai été rappelée pour auditionner. Il y avait Grégory Montel – qui campe le rôle de Gabriel dans la série – pour me donner la réplique, la directrice de casting, son assistante, un des producteurs et Cédric Klapish, bref assez de monde pour que je me liquéfie sur place !

J’étais venue accompagnée de ma baby Martin, ces toutes petites guitares, ce qui a plu à Cédric. On a commencé à parler musique, et ça m’a détendue tout de suite. L’humanité que je ressentais dans ses films, je l’ai resentie en vrai. J’ai eu l’occasion de chanter une bossa nova, « Chega de saudade », de Joao Gilberto… Et une semaine après, je faisais partie de l’aventure.

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Avez-vous personnellement contribué à l’évolution du personnage de Sofia ?

A l’origine, l’équipe recherchait une jeune fille avec de l’énergie. Le côté musique est venu après. Même pas rapport à ma couleur de peau. Des femmes de toutes nationalités ont passé les essais. Puis les scénaristes ont eu l’idée géniale d’aborder la question des actrices noires ayant des difficultés à être visibles dans le cinéma français. Cela a été écrit de façon subtile et très intelligente.

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Dans la série, l’un des agents précise que le métier n’aime pas les artistes inclassables. Pourtant, mêler comédie et musique, cela semble plutôt vous réussir…

Mon activité principale aujourd’hui, c’est la comédie. Mais à chaque fois la musique m’a rattrapée. J’ai écrit la musique du générique de fin de Case départ, même dans le film de Maurice Barthélémy, ça dure dix secondes mais je chante ! Dans Dix pour cent, je me retrouve à chanter et à jouer de la guitare dans les deux saisons. Idem pour Les Profs où je chante le thème de mon personnage, Dona Summer. C’est fou.

Sofia souffre de discriminations par rapport à sa couleur de peau : tantôt jugée « trop blanche », tantôt « trop noire », quand on ne lui propose pas des rôles racisés : « esclave » ou danseuse hip hop. Vous, qui avez été repérée par un directeur de casting, vous semblez avoir échappé à ce déterminisme.

J’ai eu beaucoup de chance, oui. Hormis dans Case Départ, où c’est le thème du film, et dans Les Profs où le personnage d’Amina est noir parce que tiré d’une BD, il n’a jamais été question de couleur de peau dans les rôles que l’on m’a confié. Je suis très optimiste, il y a un vrai changement qui est en train de s’opérer.

Pour l’anecdote, dans Pas très normales activités de Maurice Barthélémy, mon personnage, Karine, était décrit à l’origine comme une Mona Lisa des temps modernes. On était assez loin de moi pour le coup !

Il y a encore du travail à faire sur la représentation des comédiens noirs, mais je pense que c’est à nous aussi d’être dans l’action. On ne peut pas toujours blâmer les réalisateurs qui créent des personnages d’après leur imaginaire, c’est presque inconscient finalement.

https://www.youtube.com/watch?v=XIn7wvddD60

Je rejoins le discours de Maimouna Doucouré lors de la dernière cérémonie des César. J’étais dans la salle ce jour-là, et j’ai été touchée de l’entendre parler de sa propre expérience sans agressivité ni revendication. Elle est parvenue à expliquer avec douceur que, nous aussi, on avait envie de se raconter. Et elle a délivré avant tout un message d’amour qui parle à tout le monde. Je me reconnais en cette génération qui veut réunir les gens.

J’imagine qu’on vous fait souvent des réflexions sur vos cheveux : qu’avez-vous envie de répondre à ça ?

J’assume et c’est moi. Cela ne m’agace pas du tout. Il va simplement falloir s’habituer à voir de plus en plus de femmes porter leurs cheveux au naturel.

Après il faut savoir que ce sont souvent « les miens » qui ont été les premiers à me faire des réflexions. C’est aussi lié à la période postcoloniale et au fait qu’il fallait « s’européaniser » en se défrisant les cheveux. Je suis moi-même passée par la case défrisage, comme beaucoup de jeunes filles. C’est comme si c’était un passage obligé. Le défrisage a longtemps été la solution de facilité, parce qu’à l’époque on avait ni les bons produits ni les bons réflexes. Mais aujourd’hui, on y a accès.

Je ne me sens pas chargée d’une mission, mais pour moi c’est important d’assumer mes cheveux. Je ne donne pas de leçons, mais quand je vois des gamines noires élargir leur perception de la beauté, en disant vouloir ressembler d’abord à la Reine des neiges puis à la petite fille aux cheveux afro dans le film d’animation En Route !, cela m’émeut forcément.

Je le constate aussi dans le métier. J’ai commencé avec les cheveux lisses. Et dès que j’ai arboré mes cheveux afro, j’ai eu beaucoup plus de propositions ! Tu es d’un coup plus identifiable.

Stéfi Celma sera à l’affiche du film de Maurice Barthélémy, Les Ex, dont la sortie est prévue le 21 juin prochain.

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