[Chronique] « Bololo » : Edouard Philippe en « tchadien » dans le texte

Le Premier ministre français a employé mercredi 14 novembre un mot énigmatique tiré de la géographie africaine. Avec ou sans arrière-pensée ?

 © Damien Glez

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Publié le 14 novembre 2018 Lecture : 2 minutes.

La technique est éprouvée par les politiciens français : distrayez l’auditoire grognon en jetant en pâture un mot inattendu, que la plèbe rongera comme un os linguistique. Jacques Chirac a eu son « abracadabrantesque » et son « pschitt », tandis qu’Emmanuel Macron se gargarise de désuets « Perlimpinpin », « croquignolesque » ou très récemment « bibi ».

Sans doute l’actuel Premier ministre français souhaitait-il créer une telle diversion en employant, ce mercredi, l’expression « mettre le bololo ». Il évoquait les risques de désordre liés aux manifestations programmées par le mouvement des « gilets jaunes »…

Édouard Philippe a interloqué, l’expression employée étant largement méconnue – même des dictionnaires

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Pas sûr qu’Édouard Philippe réussisse à distraire, au sens de « détourner l’attention ». Il a tout de même distrait les réseaux sociaux, au sens d’  » amuser « . Il a surtout interloqué, l’expression employée étant largement méconnue – même des dictionnaires.

Celle-ci ne semble utilisée que par quelques militaires gardant en mémoire certaines OPEX, ces fameuses opérations extérieures de l’armée française. Le mot commun « bololo », argotique pour ne pas dire « jargonique », a pour origine le nom d’un des cinq quartiers du deuxième arrondissement de la capitale tchadienne, non loin de Djamba Ngato et Mardjandaffack.

Mercredi matin, au milieu des pastiches de l’expression « philippéenne », le journaliste politique Geoffroy Clavel expliquait sur Twitter que le mot désignait « un capharnaüm, une situation confuse et désordonnée » qui « tire son origine d’un quartier délabré de N’Djamena ».

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Quelle mouche a piqué le Premier ministre français ? Peut-être un psychanalyste nous apprendrait-il que « bololo » fait partie d’un phrasé entendu par Édouard Philippe dans son enfance. Peut-être un communicant nous révèlera-t-il que la créativité ministérielle du jour faisait partie d’une construction d’éléments de langage.

Qui osera y détecter un dédaigneux relent françafricain ? Aux habitants de Bololo de dire s’ils sont honorés de l’intrusion de leur nom de quartier dans le vocabulaire français, ou s’ils en ont soupé des lieux communs associés à des rues moins chaotiques qu’il n’y paraît…

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