Union africaine : dernier espoir pour faire avancer la réforme institutionnelle

Les chefs d’État africains se rassemblent ce week-end à Addis Abeba pour un sommet extraordinaire de l’Union africaine (UA), où ils chercheront à s’accorder sur un projet de réforme institutionnelle de l’organisation porté depuis deux ans par le président rwandais Paul Kagame.

Paul Kagame à Kigali, lors de sa prestation de serment, le 18 août 2017. © Eric Murinzi/AP/SIPA

Paul Kagame à Kigali, lors de sa prestation de serment, le 18 août 2017. © Eric Murinzi/AP/SIPA

Publié le 15 novembre 2018 Lecture : 3 minutes.

Il reste peu de temps à Paul Kagame, qui a insisté pour que ce sommet soit convoqué, pour faire passer ces réformes destinées à rendre l’UA moins bureaucratique et plus efficace, mettent en garde les analystes.

En janvier, il cèdera son poste annuel de président en exercice de l’UA au chef de l’État égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, bien moins enclin que lui à défendre ces réformes.

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« L’inquiétude tient à ce que, même si elle ne devait pas chercher pas à revenir dessus, l’Égypte ne ferait très probablement pas la promotion de ces réformes », explique Elissa Jobson, du centre d’analyse International Crisis Group (ICG).

Pour elle, le sommet de samedi et dimanche est le « dernier effort » pour faire adopter autant de modifications que possible avant que Kagame ne passe la main au président égyptien.

Une réforme nécessaire

Longtemps critiquée pour sa lourdeur administrative et son inefficacité, l’UA avait chargé en 2016 le leader rwandais de réfléchir à une réforme visant notamment à garantir l’autonomie financière de l’organisation pour lui donner les moyens de sa souveraineté politique.

Kagame a cherché à tailler dans les dépenses de l’UA, en limitant le nombre de sommets et de commissions, et à réduire sa dépendance à l’égard des donateurs étrangers. Il a aussi suggéré qu’elle circonscrive ses priorités à la sécurité, la politique et l’intégration économique.

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Mais plus de deux ans et cinq sommets après, plusieurs Etats clés sont toujours extrêmement réticents et l’espoir de voir un accord global être conclu cette semaine dépend surtout de qui se rendra à Addis Abeba.

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« Il faudra voir combien de chefs d’État viennent, et ça déterminera le succès du sommet, (qui) déterminera d’une manière ou d’une autre le succès des réformes », remarque Liesl Louw-Vaudran, consultante auprès du centre sud-africain d’analyse Institute of Security Studies (ISS).

Pour l’instant, l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Botswana, les Comores, le Togo et le Ghana ont confirmé qu’ils enverraient leur président. Le Nigeria et le Mozambique délégueront leur ministre des Affaires étrangères. Les autres pays n’ont pas fait savoir qui se déplacerait.

Des réticences

Certaines réformes ont déjà été adoptées. En début d’année, les chefs d’État de l’UA avaient accepté de faire passer de deux à un le nombre de sommets annuels.

Selon Elissa Jobson, analyste à l’ICG, près de la moitié des 55 Etats membres ont accepté de payer une taxe de 0,2% sur les importations, pour réduire la dépendance de l’UA à l’égard des bailleurs étrangers, lesquels contribuent à son budget à hauteur de 50%, et l’autre moitié trouvera un autre moyen de payer.

Aucune décision n’a encore été prise sur les autres propositions du président rwandais, comme celle de charger le président de la Commission de l’UA, actuellement le Tchadien Moussa Faki Mahamat, de nommer le vice-président de la Commission et les autres commissaires.

La plupart des pays africains les plus puissants sont en effet réticents à donner à l’UA la capacité de prendre des décisions à leur place, observe Liesl Louw-Vaudran.

« Ils ne veulent abandonner aucune part de souveraineté à la Commission de l’UA. Ils la voient encore comme une sorte de secrétariat chargé de mettre en oeuvre ce que les chefs d’État décident », explique-t-elle.

Méfiance de l’Égypte

Elissa Jobson souligne que les réserves de l’Égypte tiennent à une sorte de ressentiment, le pays ayant été suspendu de l’UA un an après le coup d’État de 2013 ayant amené Al-Sissi au pouvoir.

« Il y a un sentiment général que cette décision avait été plus impulsée par la Commission que par les États membres. C’est une raison supplémentaire pour l’Égypte de vouloir voir les pouvoirs de la Commission réduits », pense-t-elle.

Un diplomate travaillant à l’UA et ayant requis l’anonymat ajoute que l’Égypte a publiquement soutenu les réformes, mais aimerait probablement qu’elles se concentrent sur d’autres aspects que ceux défendus par Kagame, comme la sécurité et la reconstruction post-conflits.

« Personne n’espère vraiment que ce sommet va permettre de résoudre quoi que ce soit, mais vous verrez peut-être quelques décisions prises », laisse-t-il entendre.

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