Démocratie numérique

Publié le 27 octobre 2003 Lecture : 2 minutes.

On peut dater le changement du paysage africain des télécommunications au milieu des années 1990. C’est alors la grande époque de la privatisation des opérateurs, de la libéralisation de la téléphonie mobile et, surtout, de la mainmise des multinationales sur les infrastructures. Une douzaine de pays africains décident d’ailleurs d’ouvrir la voie. En signant l’accord de 1997 préparé par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ils s’engagent à accueillir investisseurs nationaux ou étrangers. Aujourd’hui, le bilan est plutôt encourageant : tous disposent d’une connexion Internet, le marché de la téléphonie mobile a explosé, venant combler en partie un déficit en lignes fixes, et les équipements pour réseaux locaux sans fil devraient se développer à grande vitesse.

Mais si, comme le montre ce dossier, les entreprises et le grand public des pays occidentaux font leur entrée dans l’ère nomade, si la mode est aux appareils multifonctions, à la géolocalisation et à l’euphorie de la bulle Wi-Fi, il reste encore beaucoup à faire pour réduire la fracture numérique avec le continent africain. Il n’y a aucun doute à avoir sur les avantages de ces nouvelles technologies dans les secteurs de l’économie et du social. La structure spatiale du système cellulaire donne, par exemple, la possibilité de se connecter à des zones rurales auparavant marginalisées. Grâce à l’informatique, la décentralisation de certaines tâches change les procédures de travail, leur permettant de s’accomplir au plus près des communautés. On a pu ainsi mieux unifier les indicateurs d’utilisation des pompes à main en Éthiopie, qui variaient fortement selon les régions. Au titre du développement multimédia, l’expérience de l’État indien de l’Andhra Pradesh donne une idée du potentiel des pays africains. Intitulé E-Seva, son projet permet à de nombreux services gouvernementaux d’être accessibles en ligne avec pour principal résultat une réduction des délais de prise de décisions et de traitement des dossiers. Mais cet e-gouvernement peut aussi devenir un excellent antidote contre la corruption en court-circuitant notamment les chasses gardées de certains fonctionnaires véreux. Un indéniable moteur de démocratie.

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Seul inconvénient de cette irruption du numérique en Afrique, la plupart de ces nouvelles technologies jouent la carte de la dématérialisation, du contournement des opérateurs nationaux. Bref, elles s’arrogent des prérogatives qui jusque-là relevaient de l’État. C’est déjà le cas de l’offre mobile via satellites sur orbites basses, ce sera demain le cas de la téléphonie par Internet. Aussi convient-il d’introduire un minimum de contrôle de cette dérégulation sauvage. De permettre aux États d’anticiper le grignotage des privés, y compris dans des domaines où on ne les attendait pas comme l’éducation, la santé ou la justice. De tout faire pour que les pays du continent conservent un véritable pouvoir de décision sur ces secteurs clés. Voilà à quoi devrait ressembler la nouvelle démocratie numérique.

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