Empowerment féminin : qui sont les Guinéennes du collectif « Pas sans elles » ?

Parce qu’elles revendiquent une représentation équitable des femmes guinéennes dans toutes les fonctions dirigeantes, elles ont créé le mouvement féministe, Pas Sans Elles, à la fin du mois de mai. Un collectif aux multiples visages féminins qui va certainement impacter tout le pays.

EMPOWERMENT FÉMININ

EMPOWERMENT FÉMININ

Publié le 8 juin 2018 Lecture : 4 minutes.

Le groupe se réunit aujourd’hui au bureau de Madina Thiam, la fondatrice et directrice du magazine Madina. C’est la troisième réunion de la semaine. Des femmes entrepreneures, ouvrières, politiques, dirigeantes ou encore journalistes venues de toutes les couches sociales vont échanger, nommer des portes-paroles, structurer leurs idées et mettre en place des initiatives concrètes pour l’avancement de leur pays.

« Ce qu’on fait n’est pas pour renverser les hommes mais je reste convaincue – et je le dis depuis toujours – qu’il n’y aura pas de développement sans la participation des femmes », nous affirme par téléphone Maimouna Diakhaby, 32 ans,  diplômée de l’Université de Montréal en Sciences politiques.

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Un mouvement nécessaire 

Tout a commencé par son post publié sur Facebook le 29 mai suite au remaniement du gouvernement guinéen. Celui-ci est dorénavant composé de quatre femmes sur un total de 33 ministres. Elles ne représentent que 12% de l’administration du pays.

« Nous savons pertinemment qu’il y a des femmes qualifiées pour officier en tant que ministre et elles n’ont pas été appelées. En plus de cela, on a retiré celles qui étaient déjà en place comme Oumou Camara [ex- ministre  des TP] et Malado Kaba [ex -ministre de l’économie] » expose-t-elle.

Pour dénoncer cette sous-représentation, elle a créé un groupe Facebook nommé Pas Sans Elles, dans lequel elle invite des femmes de son réseau : Zeinab Camara (fondatrice de l’organisation Women In Mining Guinée) , Madina Thiam, Fatima Camara (politicienne), Salématou Sako (PR & COM Manager), Elise Koeavogui (Présidente de l’Association des Jeunes Intellectuels de Guinée), Aminata Diallo (Journaliste et gérante du groupe Facebook de plus de 20 000 membres LES FEMMES D’ABORD), Binette Teliwel Sow ( co-fondatrice de Ifrica360.com), Khadija Diaby ( Spécialiste en acquisition de talents).

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Unies pour la même cause et déterminées à faire entendre leurs voix, elles ont réussi à fédérer des milliers de femmes guinéennes (diaspora comprise) sous le hashtag PAS SANS ELLES. Aujourd’hui, plus de 4 000 personnes aiment la page.

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« La lutte des femmes guinéennes transcende le genre »

Ensemble, elles ont publié le 3 juin un manifeste adressé au président de la République de Guinée, Alpha Condé :

« Soyez assuré, Monsieur le Président de la République, qu’il existe en Guinée un vivier de femmes répondant aux qualifications requises pour assumer un leadership égalitaire dans l’organigramme de l’État. Elles ne demandent pas une discrimination positive mais la juste reconnaissance de leur mérite personnel. Elles ne demandent pas une promotion du genre et de l’équité, comme elle est dans l’air du temps, mais leur pleine égalité avec les hommes à compétences égales.

La lutte des femmes guinéennes transcende le genre. Elle s’inscrit dans la nature même de la société humaine, qui est d’être le fruit des deux sexes, certes différents mais pas inégaux, plutôt complémentaires et unis ».

Le président, qui s’était engagé – notamment le 8 mars dernier au Palais du peuple – à œuvrer en faveur de la majorité silencieuse et de composer un gouvernement à l’écoute de la population, dit les avoir entendues et à présenté ses excuses. Sans mesures concrètes. Le projet de loi de parité à l’assemblée n’est encore jamais passé.

Après l’élan provoqué grâce à la participation de chaque femme, la mise en ligne d’une pétition pour une Guinée égalitaire et un travail effectué en collaboration avec le NDI (National Development Institute), le collectif Pas Sans Elles ne compte pas s’arrêter là : « Nous défendons les droits des femmes et nous voulons la pleine participation des femmes dans les différents domaines d’activité de la société. Nous souhaitons une gestion participative et l’accès égalitaire à ces fonctions à partir du moment où il existe un vivier de femmes expertes ».

À lire : « Femmes du Rwanda », Sonia Rolland rend hommage aux femmes entreprenantes de son pays natal

Pas Sans Elles passe à l’action

Cela fait une dizaine de jours qu’elles enchaînent les réunions, car leur combat va plus loin. Si l’actualité politique du pays a été l’élément déclencheur de ce rassemblement, ces femmes avaient déjà l’habitude de défendre les causes féminines à travers l’art, des conférences, des organisations ou associations.

Alors naturellement, elles ont décidé d’unir leur force afin de traiter des problématiques spécifiques aux femmes. « On a créé douze commissions portant sur plusieurs thèmes tels que la santé, l’éducation sexuelle qui n’est pas réellement enseignée en Guinée. Cela entraîne des décrochages scolaires en raison des grossesses précoces. Comment ne pas parler d’excision ou de problèmes d’accès à l’éducation, les questions liées à la justice des femmes ou leur présence dans les secteurs prioritaires ? Ce n’est que le début du travail. On est prêtes à s’y mettre ensemble », affirme Maimouna Diakhaby.

Le groupe s’organise autour de différentes thématiques et rencontre des icônes de mouvements féministes guinéens comme Hadja Saran Daraba, première femme candidate aux élections présidentielles.

«Elles sont contentes de voir que la jeune génération a pris le relais. Elles nous donnent des conseils et nous guident. Le mot d’ordre est de ratisser large, on rencontre tous les jours des institutions, les femmes des marchés, les jeunes filles dans les universités. Sans la force et la participation de toutes les femmes, on n’y serait jamais arrivé », conclut Maimouna en rappelant que « la femme est le baromètre de la société ». Un adage populaire et bien connu de la population guinéenne… Comprendra qui pourra.

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