Centrafrique : résurgence de violences dans le centre et l’ouest
La Centrafrique est le théâtre d’une résurgence de violences meurtrières ces derniers jours, dans le centre du pays où des combats entre groupes armés ont fait au moins 37 morts jeudi, et dans l’ouest où un Casque bleu a été tué vendredi.
Vendredi soir à 21H00 (20H00 GMT), des hommes armés ont attaqué une base avancée de la mission de l’ONU (Minusca) à Gbambia, à une centaine de km de Berberati, dans l’ouest du pays, selon un rapport interne de l’ONU samedi.
Un Casque bleu a été blessé dans les affrontements et est décédé à l’hôpital de Berberati à la suite de ses blessures, selon le texte.
L’identité des assaillants n’est pas connue. Dans l’ouest du pays où l’attaque a eu lieu, le groupe armé Siriri est présent.
Ce groupe, dont les effectifs ne dépasseraient pas la centaine d’hommes et qui a été créé en 2018, est constitué en majorité d’éleveurs peuls, prétendant lutter contre les vols de bétail, très fréquents dans cette région de transhumance.
Des affrontements entre les Casques bleus et les combattants de Siriri sont fréquents dans cette région du pays, où un Casque bleu avait été tué en juin.
Cette nouvelle attaque porte à six le nombre de Casques bleus tués en République centrafricaine cette année.
Église et camp de déplacés brûlés
Vendredi soir, une explosion a été entendue dans le quartier qui abrite la majorité des musulmans de Bangui, le PK5, au niveau de la maison d’un chef de milice.
Plusieurs sources concordantes ont indiqué que l’explosion a été causée par un drone, sans qu’il soit possible de vérifier cette information.
Jeudi, d’autres combats ont eu lieu dans le centre du pays, à Alindao, durant lesquels au moins une quarantaine de personnes dont deux prêtres ont été tuées.
Un bilan vendredi soir d’un rapport interne de l’ONU faisait état de 37 morts, mais d’autres chiffres plus élevés sont avancés, sans qu’il soit possible samedi midi de les confirmer.
Ces combats ont opposé des milices antibalaka, autoproclamées d’autodéfense, à des combattants du groupe armé Union pour la paix en Centrafrique (UPC).
L’Eglise catholique, le couvent et le camp de déplacés de la ville ont été brûlés, et des milliers de civils ont dû de nouveau fuir en brousse.
Alindao a longtemps été la principale base de l’UPC, un groupe armé dirigé par Ali Darassa, un des principaux groupes de l’ex-coalition Séléka qui avait renversé le régime de François Bozizé en 2013.
En mai 2017, des combats entre antibalaka et UPC avaient déjà fait une centaine de morts dans cette zone charnière du centre de la Centrafrique sur la principale route qui mène au sud-est du pays.
Plus tard dans l’année, une alliance de groupes armés contre l’UPC avait mené à de violents combats dans cette zone qui regorge de mines d’or et de diamants.
« Valse des médiations »
Jeudi, le Conseil de sécurité de l’ONU a débattu à New-York du renouvellement de la mission onusienne en Centrafrique, la Minusca, présente depuis 2014 et qui fait l’objet de nombreuses critiques en raison de son incapacité à faire face aux violences.
A ces critiques s’est ajoutée une querelle entre la Russie, les Etats-Unis et la France à propos d’un projet de résolution déposé par Paris.
Celui-ci dénonçait les récentes tentatives russes d’organiser des accords de paix parallèles à l’initiative de l’Union africaine (UA), qui est « le seul cadre » possible pour une parvenir à une solution.
En réponse, Moscou a estimé que la France devait laisser de côté ses « intérêts nationaux paroissiaux » en Centrafrique, ancienne colonie où Paris a toujours été présent militairement depuis l’indépendance en 1960.
Moscou, en pleine offensive diplomatique dans le pays depuis début 2018, a engagé durant l’été une médiation entre groupes armés, parallèle sinon concurrente de celle de l’Union africaine, avec une réunion fin août à Khartoum.
Le projet de résolution n’a pas été adopté, et le Conseil a voté à l’unanimité pour étendre d’un mois le mandat de la mission, en attendant un nouveau vote le 15 décembre pour l’adoption d’une nouvelle résolution.
Dans un rapport début novembre, le centre d’analyses Enough Project a dénoncé une « valse des médiations » qui a lieu « sans qu’aucune solution durable et cohérente ne voie le jour ».
Ces médiations, une dizaine depuis le début de la crise, ont pour l’heure échoué à stopper la « frénésie du pouvoir », selon Enough Project, des groupes armés opérant sur le territoire.
Selon l’ONG, ces derniers cherchent à attiser les violences sectaires pour « légitimer leurs crimes » et piller les nombreuses richesses naturelles du pays.
En Centrafrique, un quart des 4,5 millions d’habitants ont fui leurs domiciles.
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