Pas très catholique, ce hammam

Publié le 27 mars 2006 Lecture : 2 minutes.

Une jeune Algérienne habitant à Amsterdam décide de faire quelque chose pour ses soeurs maghrébines qui n’ont pas la chance d’être éduquées et indépendantes. Elle veut leur faire connaître leurs droits et leurs possibilités dans la société néerlandaise. Petit problème : où entrer en contact avec des femmes, la plupart des Rifaines, qui sont cloîtrées dans leur maison ?
C’est alors que Malika a une idée de génie. Elle imagine de créer un hammam un peu particulier. Il s’agirait d’offrir aux clientes, à côté du bain lui-même, toutes sortes d’activités culturelles, d’alphabétisation, de cours sur la législation, la société, etc. Malika monte donc un business plan, comme on dit, et va demander une subvention à la mairie. En principe, pour un projet pareil, il y a toujours de l’argent à la mairie.
Malika est reçue courtoisement par une fonctionnaire. Madame Smit écoute attentivement l’exposé de Malika, elle examine son projet puis, avec un grand sourire, elle lui demande de revenir la semaine suivante.

La semaine suivante, Malika revient à la mairie, pleine d’espoir. Mais, hélas, elle doit rapidement déchanter : madame Smit la prévient que sa demande de subvention n’a aucune chance d’aboutir. Et, à sa profonde stupéfaction, madame Smit explique :
– J’ai appelé l’imam de la mosquée. Et il trouve votre idée de hammam culturel absurde.
Malika manque de s’étrangler de fureur.
– Mais qui vous a dit d’appeler l’imam ? Mon projet n’a rien à voir avec lui !
Madame Smit la regarde sans comprendre :
– Mais enfin, c’est votre culture, non ? Vous devez demander la permission à l’imam, non ?

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Folle de rage, Malika exige que le projet soit examiné par le supérieur hiérarchique de madame Smit. Elle fait tellement de scandale qu’on accepte de revoir sa demande de subvention. La semaine d’après, Malika revient à la mairie. Cette fois-ci, elle est reçue par le supérieur hiérarchique de madame Smit. Celui-ci est un peu embêté, car il ne peut que donner raison à sa subordonnée. En effet, dit-il à Malika éberluée, il s’est plongé dans des livres relatifs à la culture islamique. Et il a découvert qu’historiquement les hammams ont souvent été des sources de revenu pour les mosquées. Par conséquent, affirme-t-il avec l’aplomb des autodidactes, si les hammams sont des sources de revenu pour les mosquées, madame Smit a eu raison de consulter l’imam. Et le refus de celui-ci entraîne le rejet de la subvention.
Ce qui est le plus extraordinaire dans cette histoire, c’est que madame Smit et son supérieur sont tous les deux de bonne foi. Ils veulent sincèrement aider les femmes immigrées. Mais ils ont tellement de respect pour ce qu’ils croient être leur culture qu’ils confondent celle-ci avec leurs propres préjugés. Avec des amis comme ceux-ci, qui a besoin d’ennemis ?

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