De père en fille

Noura Mint Seymaly évolue à la frontière du chant traditionnel et de la world music.

Publié le 27 mars 2006 Lecture : 2 minutes.

« Depuis quand chantes-tu ? » La question lui paraît farfelue, mais Noura accepte d’y répondre. « Depuis toujours », lance-t-elle gentiment moqueuse. C’était pourtant évident. Drapée dans son voile vert sombre, la jeune femme de 28 ans déroule en hassaniya la généalogie familiale. Grand-mère griotte (Mounina Mint Eleia), père compositeur (Seymaly Ould Mohamed Vall), sans oublier qu’une diva mauritanienne – Dimi – a été sa belle-mère. Noura Mint Seymaly fait partie de ces familles où le goût de la musique se transmet d’une génération à l’autre et s’impose naturellement comme une destinée. On est pour ça, c’est tout.
Choriste dans des formations traditionnelles, la chanteuse à la voix rauque et au visage poupin a résolument repris le témoin. Mais depuis deux ans elle le porte vers des zones musicales que ses grandes surs ont rarement explorées, excepté l’incontournable Malouma. Des éclairs jazz et rock viennent galvaniser ses chansons. Ils n’écornent pas la tradition, Noura n’y tient pas, ce n’est pas la rébellion qui l’anime. Elle souhaite plutôt utiliser les possibilités d’adaptation de la coutume aux sons venus de l’Occident. Et réciproquement. « Fusion », c’est le terme que l’on emploie pour qualifier sa musique. Pour évoquer un mariage heureux, une complémentarité harmonieuse. À l’origine, une rencontre décisive. En 2004, un Français mélomane à Nouakchott propose une collaboration à la jeune griotte. De leurs veillées régulières avec des musiciens traditionnels et d’autres « internationaux », emmenés par l’ancien batteur de Youssou Ndour, Youssou Camara, naît Tarab (« la musique »). Sorti à la fin de 2004, l’album enchaîne les compositions world music (musique du monde) et les morceaux classiques. La guitare électrique vient soudain s’enchevêtrer avec l’ardin, une harpe pour femmes dont Noura jouait déjà enfant. Tandis que, sur le même disque, l’enchaînement des morceaux respecte parfaitement l’ordre des cinq modes prescrit par les règles des ancêtres. Du Karre (mode de la vie) au Lebteit (mode des anciens) en passant par le Khal, le troisième mode, celui de l’amour que Noura dit affectionner tout particulièrement. Il est impensable de chambouler cette succession sacrée. Les sujets restent simples : un père désespéré par la sécheresse auquel un fils redonne espoir, une histoire d’amour. Loin d’un folklore facile et délavé, Noura et ses huit musiciens ont toutes les chances de gagner les bacs des disquaires européens. C’est ce qu’ils souhaitent, à en croire la jeune femme, qui ajoute toutefois vouloir rester en Mauritanie, où vivent ses deux enfants.
« Les anciens ont aimé », assure-t-elle. Le public aussi. En 2005, la jeune chanteuse figurait parmi les vingt finalistes du concours RFI Musiques du monde. Ses créations ont déjà franchi la frontière mauritano-sénégalaise : en décembre, Noura a chanté au festival Africa Fête à Dakar. Prochaine étape, remporter le concours RFI avec un deuxième album, qui doit impérativement être prêt le 1er juillet prochain.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires