Vous avez dit politique ?

Publié le 28 février 2006 Lecture : 2 minutes.

Les trois films qui ont fait le plus parler d’eux au dernier festival de Berlin avaient pour titre The Road to Guantánamo, Les discours de Hambourg et Syriana. Leur point commun : tous des films politiques et liés à l’actualité récente.
Le premier, de l’Anglais Michael Winterbottom, mélange de fiction et de documentaire, raconte la terrible aventure vécue par trois jeunes Anglais d’origine pakistanaise partis se marier au pays au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Se trouvant au mauvais endroit au mauvais moment, ils sont arrêtés, livrés aux Américains puis envoyés à Guantánamo, où ils seront détenus « par erreur » jusqu’en mai 2005. Les discours de Hambourg, du cinéaste allemand Romuald Karmakar, est un film très original qui fait entendre sur un mode théâtral, lus par un acteur, deux prêches de l’imam intégriste Mohamed Fazazi prononcés en 2000 en présence de plusieurs des futurs kamikazes du 11 Septembre. Syriana, enfin, qui vient de sortir à Paris, produit par George Clooney et Steven Soderbergh, est une sorte de film de suspense au rythme échevelé qui a pour cadre le Moyen-Orient et pour « héros » un agent secret américain, un consultant en énergie, des dirigeants d’entreprises pétrolières et une famille régnante dans un émirat gorgé d’or noir. Le tout, bien sûr, distillant une « morale » anti-corruption et anti-impérialiste pour ne pas dire anti-Bush.
Dans la course aux oscars qui seront bientôt décernés à Hollywood, les films dits politiques occupent également le devant de la scène, si l’on en juge par le choix des « nominés », où trônent en haut de liste Good Night, and Good Luck, la charge contre le maccarthysme de George Clooney, North Country, qui raconte le combat féministe d’une ouvrière (interprétée par Charlize Theron) qui osa la première déposer une « plainte collective » pour harcèlement sexuel sur le lieu de travail, et, bien sûr, Syriana.
Même en France, où le cinéma politique s’est fait très rare depuis plusieurs décennies, le film qui fait l’événement en cette fin du mois de février est le dernier Chabrol, L’Ivresse du pouvoir, qui, de façon à peine masquée, raconte le volet judiciaire de l’affaire Elf. Avec pour personnage principal une femme magistrat remarquablement interprétée par Isabelle Huppert en Eva Joly plus vraie que nature, et, face à elle, les dirigeants de la compagnie pétrolière accusés de corruption, qui vont devoir quitter leur vie de luxe pour celle des prisons de la République. Des hommes qui sont autant victimes de leur propre ivresse du pouvoir que de celle de la juge, prête à sacrifier sa vie privée sur l’autel de sa mission purificatrice.
Ce retour du cinéma politique peut sembler rassurant en cette période où les sujets à traiter dans ce domaine ne manquent pas. On peut cependant remarquer que, dans la plupart des cas – c’est évident pour Syriana et même L’Ivresse du pouvoir -, et cela marque une différence avec la plupart des longs-métrages équivalents d’autrefois, il s’agit moins d’uvres destinées à faire réfléchir que de films-spectacles dans un décor politique. C’est plus agréable à regarder, mais il n’est pas certain que cela fasse beaucoup avancer les questionnements des citoyens.

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