Taro Aso

Ministre japonais des Affaires étrangères

Publié le 28 février 2006 Lecture : 3 minutes.

Sera-t-il le successeur de Junichiro Koïzumi, à l’issue des élections de septembre prochain ? Taro Aso, ministre des Affaires étrangères, est considéré en tout cas comme un prétendant sérieux au poste de Premier ministre. Connu pour son franc-parler, cet homme de 65 ans qui apparaît comme l’un des principaux dirigeants conservateurs de son pays se démarque des autres dirigeants nippons. Le chef de la diplomatie a en effet participé en 1976 aux épreuves de tir lors des jeux Olympiques d’été de Montréal. Il a aussi dirigé pendant plusieurs années l’entreprise familiale de ciment avant de se consacrer à la politique. Par atavisme ? Taro Aso n’est autre que le petit-fils de l’ancien Premier ministre Shigeru Yoshida (chef du gouvernement à deux reprises, entre 1946 et 1954). Celui dont les admirateurs louent toujours la rigueur et le sens du devoir aura donc de qui tenir s’il accède un jour aux plus hautes fonctions.

Jeune Afrique : Vous avez vécu deux ans en Sierra Leone où vous représentiez l’entreprise familiale. Quels souvenirs gardez-vous de cette période ?
Taro Aso : J’ai effectivement vécu deux ans en Sierra Leone, où je travaillais dans le secteur du diamant. Lorsque j’y suis arrivé en 1970, j’avais 30 ans et j’étais encore célibataire. À cette époque, il n’y avait ni ambassade ni consulat japonais dans le pays, et les infrastructures n’étaient guère développées. Je puisais l’eau moi-même et la faisais chauffer pour prendre ma douche. J’ai dû installer un générateur électrique pour avoir du courant. Malgré ces conditions de vie précaires, je n’ai jamais souffert de la malaria ou de la dysenterie. Grâce aux bonnes relations que nous entretenions avec les chefs de tribus, la mine que nous exploitions n’a jamais subi d’attaques. Nous fournissions régulièrement des médicaments à la population locale et nous lui avions installé un générateur électrique. Durant mon séjour, j’ai remarqué que parmi les Européens et les Américains qui se trouvaient dans le pays, peu d’entre eux allaient sur le terrain travailler avec les locaux, contrairement aux Japonais. Je constate que, des décennies après, cette approche typiquement japonaise se perpétue.
Vous êtes un homme d’affaires respecté, un politicien confirmé et surtout un sportif qui a participé aux jeux Olympiques. Avez-vous l’impression que ce parcours atypique vous avantage en politique ?
Je ne sais pas si c’est un avantage d’avoir participé aux jeux Olympiques. En revanche, le fait que j’ai dirigé une entreprise m’a permis de bien connaître l’économie réelle. Et cette expérience peut être un avantage par rapport aux autres députés.
Croyez-vous que le ministère des Affaires étrangères soit le poste idéal pour accéder au poste de Premier ministre ?
Je suppose que l’expérience acquise comme ministre des Affaires étrangères peut se révéler utile si, un jour, on devient Premier ministre. En revanche, je ne pense pas que ce poste soit un avantage pour briguer celui de Premier ministre, tout simplement parce que, n’étant pas souvent dans le pays, je n’ai donc pas beaucoup de temps pour rencontrer les autres députés.
Le gouvernement apporte un soutien inconditionnel à Washington. Cela ne risque-t-il pas de distendre ses liens avec les pays voisins ?
Les relations internationales sont comme les relations humaines. Ceux qui disposent à la fois d’une puissance économique et militaire et d’un certains rayonnement culturel figurent parmi les pays les plus respectés. Le Japon, puissant économiquement mais pas militairement, avait donc besoin de renforcer ses liens avec les États-Unis. J’ajouterais que, sur le plan économique, seuls les États-Unis se situent au même niveau que le Japon. Il était donc assez naturel que ces deux pays se rapprochent, d’autant plus que nous partageons les mêmes valeurs en matière de libéralisme et de démocratie. Concernant les relations avec nos voisins, il faut souligner que les pays asiatiques, longtemps sous-estimés sur le plan économique, se sont développés de manière impressionnante à partir de la fin des années 1980. Le Japon pense qu’il est maintenant plus facile de travailler avec eux. Nous avons toujours privilégié les relations économiques avec nos voisins, mais elles sont désormais beaucoup plus denses et nécessaires.
Quelle est aujourd’hui la place du Japon en Asie ?
L’Asie regroupe 60 % de la population mondiale. L’Inde, la Chine et l’Indonésie comptent, à elles trois, environ 3 milliards d’individus. Au nom de la prospérité économique, nous devons uvrer ensemble pour contribuer à la lutte contre la pauvreté, qui est à l’origine du terrorisme. À cet égard, je pense que le Japon est un leader pragmatique en Asie et qu’il doit continuer à occuper cette place.

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