[Tribune] Africains, réclamez ce qui vous est dû !
Le mouvement de restitution du patrimoine africain amorcé par la France est une avancée importante, à mettre au crédit du Bénin. Il doit aussi ouvrir la voie à d’autres demandes légitimes, comme par exemple sur le Franc CFA, plaide le politologue béninois Oswald Padonou.
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Oswald Padonou
Docteur en sciences politiques. Enseignant et chercheur en relations internationales et études de sécurité
Publié le 6 décembre 2018 Lecture : 2 minutes.
La décision du président français Emmanuel Macron de restituer 26 biens culturels pillés pendant la colonisation et réclamés par le gouvernement béninois est une grande source de satisfaction. Deux trônes, trois statues géantes, des récades et des portes sacrées de palais seront ainsi rendus, en attendant le retour d’un plus grand nombre de ces milliers d’objets emportés hors d’Afrique au cours des conquêtes coloniales.
Il s’agit d’une avancée importante dans le processus de reconstruction et de renouvellement des rapports entre la France et ses anciennes colonies d’Afrique. Au-delà des symboles, cette restitution engage le solde du contentieux postcolonial. Et ce à l’initiative du gouvernement du Bénin.
L’audace des pionniers ! – Oh oui, un peu de chauvinisme ! Une audace qui avait déjà conduit, en février 1990, à l’organisation de la Conférence nationale du Bénin, en prélude au processus de démocratisation du pays.
Les États africains francophones ne s’accommodent d’ailleurs plus du statu quo, les lignes bougent…
Une audace qui, plus récemment, a entraîné la suppression de la gendarmerie, une institution héritée du modèle français mais trop complexe, pas toujours efficace et finalement coûteuse pour des États africains francophones aux moyens limités.
>>> À LIRE – Culture : ce qu’il faut retenir du rapport commandé par Macron sur la restitution du patrimoine africain
Ces quelques exemples pour dire quoi ? Que le passage du livre de Matthieu dans le Nouveau Testament, au septième verset du chapitre VII, répété par les prêtres, les pasteurs et autres prêcheurs de bonne parole, particulièrement actifs en Afrique subsaharienne, n’a jamais été si adapté : « Demandez, et l’on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira. » La responsabilité de l’initiative incombe à celui qui ressent le besoin, au bénéficiaire de l’action attendue.
Les États africains francophones ne s’accommodent d’ailleurs plus du statu quo, les lignes bougent… Après le Bénin, le Sénégal et la Côte d’Ivoire ont demandé la restitution de leurs biens.
Et ces avancées peuvent être obtenues dans beaucoup d’autres domaines. Les rapports des États africains avec la France, mais également avec l’ensemble de leurs partenaires extérieurs, peuvent évoluer.
Prenons l’exemple du franc CFA : si cette monnaie partagée par quatorze États essentiellement francophones est défavorable à leurs économies, c’est bien à eux de prendre les devants pour changer la donne. Le supposé bénéficiaire de la situation ne peut pas être celui qui la remet en cause.
Gouvernements africains, osez donc ! Demandez, exigez, travaillez à obtenir… et l’on vous remettra ce qui vous est dû.
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