Coup de sang à Benghazi
Renforts militaires, interpellations en série, fermeture des cybercafés et limitation des communications par téléphone portable Depuis le 20 février, Benghazi est de facto en état de siège.
Trois jours auparavant, la seconde ville de Libye a été le théâtre d’une violente manifestation de protestation contre le soutien affiché par Roberto Calderoli, le ministre italien des Réformes, à la publication des caricatures du Prophète dans un journal danois. Au moment où ils pénétraient dans le consulat italien, les manifestants ont été violemment chargés par des policiers et des membres des Comités révolutionnaires. Bilan officiel : onze morts (une quarantaine, selon l’opposition) et trente-cinq blessés.
Très vite, Mouammar Kadhafi prend conscience de la gravité de la bavure et tente d’en atténuer les conséquences. Dès le lendemain, Nasr al-Mabrouk, le ministre de l’Intérieur, pourtant un pilier du régime, est suspendu de ses fonctions. Et tous les responsables de la sécurité à Benghazi sont limogés. La Jamahiriya s’engage à prendre financièrement en charge tous les soins dispensés aux blessés et à verser de généreuses indemnités aux familles des victimes. Parallèlement, le « Guide » demande à Silvio Berlusconi, le président du Conseil italien, la tête du ministre islamophobe. Avec succès.
Tout cela ne suffit pourtant pas à apaiser la population de Benghazi, qui, il est vrai, n’a jamais porté Kadhafi dans son cur. Le jour même, des jeunes en colère scandant des slogans hostiles au régime prennent position dans les principales artères de la ville. Plusieurs bâtiments publics sont incendiés. Cibles privilégiées : les sièges des Congrès populaires et des Comités révolutionnaires, ainsi que les commissariats de police.
Moussa Koussa, Abdallah Snoussi et Seyd Kaddaf Eddam, trois fidèles parmi les fidèles du « Guide », débarquent à Benghazi le 19 février. Aussitôt, la ville passe sous le contrôle des unités d’élite de l’armée, appelées en renfort. Le 21 février, Libya Al Youm (La Libye aujourd’hui), un journal électronique lancé à Londres par des exilés libyens, est piraté : il avait multiplié les révélations sur « l’Intifada de Benghazi ». Le même jour, les responsables de la Jamahiriya clouent au pilori Gianfranco Fini, le chef de la diplomatie italienne, à qui ils reprochent d’avoir évoqué les « causes internes » des événements. C’était pourtant un secret de polichinelle
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