Retrait de l’Opep : « Le Qatar veut se libérer des interférences extérieures »

À trois jours du sommet de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) à Vienne, le ministre qatarien de l’Énergie Saad al-Kaabi a annoncé le retrait de son pays de l’organisation. La décision, qui prendra effet en janvier 2019, est fortement symbolique.

L’émir du Qatar Tamim Ben Hamad Al-Thani, lors d’un sommet du Conseil de coopération du Golfe, le 5 décembre 2017. © Jon Gambrell/AP/SIPA

L’émir du Qatar Tamim Ben Hamad Al-Thani, lors d’un sommet du Conseil de coopération du Golfe, le 5 décembre 2017. © Jon Gambrell/AP/SIPA

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Publié le 3 décembre 2018 Lecture : 2 minutes.

Le retrait aura un impact économique limité. Avec près de 600 000 barils produits par jour – contre près de 10,5 millions pour l’Arabie saoudite – le petit émirat est loin des poids lourds du secteur. Il est tout simplement le plus petit exportateur des pays membres de l’Opep. Ses réserves sont modestes, le Qatar s’appuyant surtout sur son immense potentiel gazier (troisième réserves mondiales, premier exportateur mondial) pour financer son économie.

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« Ce retrait reflète le désir du Qatar de concentrer ses efforts sur le développement et l’augmentation de sa production gazière, de 77 millions de tonnes par an à 110 millions de tonnes dans quelques années », a notamment déclaré Saad al-Kaabi. « C’est à mon sens lié à la volonté du Qatar de se libérer des contraintes régionales qui pourraient entraver son développement économique. Le secteur gazier est le centre de gravité du Qatar et il se donne ainsi une plus grande marge de manœuvre pour atteindre ses objectifs sans être contraint par des intérêts extérieurs », décrypte Andreas Krieg, spécialiste du Moyen-Orient au King’s College.

Influence saoudienne

Cette surprenante décision revêt une forte connotation symbolique. Membre depuis 1961, le Qatar avait été le premier pays à rejoindre l’institution dans la foulée des cinq fondateurs (Arabie saoudite, Iran, Irak, Koweït et Venezuela). Il est cependant le premier État moyen-oriental à la quitter.

En froid prolongé avec Doha, Riyad, qui dirige de fait l’Opep vu son poids sur le marché mondial, a depuis quelques semaines orienté la production à la hausse pour faire baisser au forceps le prix du baril, suite aux demandes répétées de Donald Trump. Après avoir atteint plus de 75 dollars début octobre, le prix du baril est ainsi redescendu à 53 dollars aujourd’hui. Les décisions de l’Opep sont donc intrinsèquement liées aux objectifs politiques saoudiens, ce qui ne passe pas toujours auprès des autres pays exportateurs, notamment l’Algérie – où le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane est en visite depuis dimanche 2 décembre.

Le Qatar a le sentiment que la domination saoudienne sur les institutions régionales a entravé ses objectifs de développement

En se retirant de l’Opep, Doha signifie ainsi qu’elle n’entend pas demeurer au sein d’une institution dominée par son voisin hostile. « Il y a le sentiment au Qatar que la domination saoudienne sur les institutions régionales a entravé les objectifs de développement du Qatar. C’est pour l’émirat l’occasion de s’affirmer comme un marché indépendant et de se libérer des interférences extérieures. Le blocus de ses voisins a rendu cette décision possible », analyse Andreas Krieg.

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Le poids de l’Opep sur les cours mondiaux s’est trouvé relativisé ces dernières années par l’intégration dans le top 10 d’États exportateurs non membres, dont la Russie, le Canada et le Kazakhstan. Les États-Unis, premier consommateur et devenu en quelques années le premier producteur mondial, sont également moins dépendants du pétrole saoudien.

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