Qui a tué Deida Hydara ?
C’est par une marche de protestation, le 22 décembre, et « une semaine sans presse », débutée le 20, que les médias privés de Banjul ont exprimé leur colère à la suite de l’assassinat, dans la nuit du 16 au 17 décembre, du journaliste Deida Hydara, 58 ans, copropriétaire du trihebdomadaire privé The Point. Quarante-huit heures auparavant, l’Assemblée nationale avait adopté deux lois sur la presse contre lesquelles il s’était élevé : la première établit que tous les délits de presse sont passibles d’une peine d’emprisonnement ; la seconde exige des propriétaires de journaux le versement d’une caution de 16 000 dollars pour l’obtention d’une licence de publication.
Hydara a été abattu de trois balles dans la tête par des tireurs embusqués, alors qu’il raccompagnait deux de ses collaboratrices, Ida Jagne-Joof et Nyang Jobe, toutes deux blessées. Les meurtriers ont pris la fuite à bord d’une Mercedes sombre à la plaque d’immatriculation aveugle.
Malgré les dénégations des autorités, dont celle, notamment, du ministre de l’Information, certains voient dans ce meurtre la main du régime. L’inspecteur général de la police, Landing Badjié, a annoncé la suspension de toutes les enquêtes criminelles en cours pour se consacrer à la recherche des assassins. La version officielle comporte cependant des zones d’ombre. Par exemple, sur le nombre des tueurs : la police parle d’un seul tireur, quand des témoins indiquent qu’il y en avait au moins deux. Les autorités évoquent « un crime crapuleux », alors que les médias et des ONG affirment qu’il s’agit « d’un assassinat », le journaliste ayant reçu, selon ses proches, des menaces de mort.
Hydara était le correspondant de l’Agence France-Presse (AFP) et le représentant de Reporters sans frontières (RSF). Réputé pour son engagement en faveur de la liberté d’expression, « le doyen », comme ses confrères aimaient à l’appeler, s’était opposé, en 2003, à la tête d’un collectif de journalistes, à l’instauration d’une Commission des médias, sorte de tribunal de la pensée, finalement dissoute le 13 décembre 2004.
Le Sénégalais Alioune Tine, secrétaire général de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho), révèle que tous les journalistes qui ont critiqué les deux « lois liberticides font l’objet de menaces, d’intimidations et de harcèlements ». La Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), RSF, la Raddho et des médias gambiens ont exigé l’ouverture d’une enquête indépendante.
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