Le maharaja de l’informatique

De la petite entreprise familiale d’huile végétale il a fait le principal groupe high-tech indien. Histoire d’une ascension fulgurante.

Publié le 3 janvier 2005 Lecture : 3 minutes.

On le présente comme le Bill Gates indien. Azim Premji possède la plus grosse fortune de son pays, mais, à la différence du patron de Microsoft, il conduit toujours une voiture ordinaire et voyage en classe économique. « Si l’on veut qu’une entreprise soit bien gérée, explique le patron de Wipro, le chef doit montrer l’exemple. » Derrière cette apparence savamment entretenue d’homme accessible et rigoureux se cache le profil d’un conquérant devenu, en quelques années, le maharaja des services informatiques.
Tout a commencé en 1966 avec le décès de son père. Il n’a alors que 21 ans et doit interrompre ses études pour reprendre la petite entreprise familiale d’huile végétale dans la région de Bombay. Conscient de l’impasse dans laquelle se trouve cette filière, le tout jeune patron se diversifie. Après les produits de soins, l’énergie et l’équipement médical, en 1977, c’est l’aubaine et la révélation.
Le géant américain IBM est expulsé du pays par les autorités, laissant le champ libre à quelques aventuriers audacieux. Azim Premji en fait partie. Il réussit à convaincre des ingénieurs informaticiens, achète la technologie d’une société américaine et se lance à corps perdu dans l’aventure des nouvelles technologies. En quelques années, il décroche le jackpot. En 2004, Wipro affiche un chiffre d’affaires de 1,3 milliard de dollars, contre 600 millions de dollars en 2000, et dispose d’une trésorerie estimée à 500 millions de dollars. Un véritable butin de guerre qui permet d’envisager sereinement des achats pour un groupe dépourvu de dettes.
Azim Premji a très vite compris que l’avenir était surtout dans les services pour le compte de sociétés étrangères. Finance, industrie, transports, électronique et téléphonie, grande distribution… Wipro travaille dans tous les secteurs et développe une gamme de produits très étendue. Cela va de la conception et la production de logiciels au multimédia, en passant par la création de systèmes informatiques et la gestion à distance. Autant d’activités en plein développement : l’Inde est considérée comme la deuxième puissance pour les services informatiques, après les États-Unis. Dans le sud du pays, la ville de Bangalore est même appelée « la Silicon Valley indienne ».
Avec des coûts inférieurs de 50 % à ceux de la concurrence européenne ou américaine, grâce aussi aux 275 000 ingénieurs formés chaque année en Inde, la force de frappe de Wipro a pu s’exprimer sans entrave. Aujourd’hui, ce géant emploie 40 000 personnes et a installé 33 bureaux ou filiales à travers le monde. Pour lever des capitaux, le groupe est entré en Bourse à New York. Sa valeur est estimée à 12 milliards de dollars. Azim Premji détient 84 % du capital.
Pas de quoi, cependant, lui faire perdre la tête. Descendant d’une lignée d’hommes d’affaires musulmans de la région du Gujerat, le milliardaire aime à rappeler « qu’il est issu d’une famille attachée à la discrétion et qu’il tient à conserver une vie simple ». Dans la saga Wipro, on souligne aussi l’intégrité du personnage qui a toujours refusé de corrompre un fonctionnaire pour faire avancer un dossier et qui préfère affronter une grève plutôt que de revenir sur le licenciement d’un employé convaincu de fraude. Une attitude suffisamment rare en Inde pour être soulignée.
Mais la plus grande fierté d’Azim Premji est certainement la Fondation pour l’éducation qui porte son nom et qu’il finance à hauteur de 5 millions de dollars par an. Dans un pays qui compte 400 millions d’illettrés, voilà de l’argent dépensé à bon escient !

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