Affaires Diack : le CIO demande à Macky Sall « l’engagement de son gouvernement »

Pressé par la justice française qui enquête sur l’attribution des JO de Rio-2016 et de Tokyo-2020, le président du CIO Thomas Bach a officiellement demandé la coopération du Sénégal, où s’est réfugié l’un des acteurs clés de ces dossiers, Papa Massata Diack.

Papa Massata Diack, le fils de l’ex-président de la fédération internationale d’athlétisme Lamine Diack, dans sa maison à Dakar, le 7 février 2017. © Sylvain Cherkaoui / Jeune Afrique

Papa Massata Diack, le fils de l’ex-président de la fédération internationale d’athlétisme Lamine Diack, dans sa maison à Dakar, le 7 février 2017. © Sylvain Cherkaoui / Jeune Afrique

Publié le 7 décembre 2018 Lecture : 3 minutes.

Le juge d’instruction Renaud van Ruymbeke, qui mène deux enquêtes sur la corruption dans le sport mondial, « nous a fait part des difficultés auxquelles il a été effectivement confronté pour l’exécution (de) deux commissions rogatoires internationales adressées au ministre de la Justice du Sénégal », écrit notamment Thomas Bach à « son excellence », le président du Sénégal Macky Sall, dans un courrier du 16 novembre .

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« L’engagement de votre gouvernement (…) serait particulièrement apprécié », ajoute le patron du CIO, espérant que ces demandes « puissent être exécutées dans les meilleurs délais », poursuit-il dans un courrier envoyé à Dakar quelques semaines seulement après l’attribution au Sénégal par le CIO des Jeux olympiques de la Jeunesse (JOJ) 2022, une première pour l’Afrique, le 8 octobre à Buenos Aires.

Deux enquêtes distinctes

Un mois plus tard, le 14 novembre, Thomas Bach a été entendu, comme partie civile, dans le bureau du juge van Ruymbeke. Depuis trois ans, le magistrat et ses collègues tentent, dans deux enquêtes distinctes ouvertes par le parquet national financier, de faire la lumière sur un système de corruption à la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) destiné à retarder des sanctions pour dopage en Russie, et sur des soupçons de corruption dans l’attribution par le CIO des Jeux olympiques de Rio-2016 et de Tokyo-2020.

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Au centre des dossiers, le Sénégalais Papa Massata Diack, fils de l’influent patron de l’IAAF (1999-2015) Lamine Diack, et lui-même puissant conseiller marketing de cette fédération. Il est soupçonné d’avoir touché plusieurs millions d’euros de pots-de-vins sur des contrats de sponsoring, ou pour favoriser les candidatures de Rio et de Tokyo aux JO 2016 et 2020. Dans la presse, il s’en est toujours défendu, mais n’a jamais été entendu par la justice française, alors que son père est mis en examen pour corruption et ne peut quitter le territoire français.

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Un mandat d’arrêt international toujours sans effet

Dès le début de l’audition, le juge Van Ruymbeke a rappelé la situation à Thomas Bach: « PMD », « réfugié » au Sénégal, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international resté sans effet, et sa demande pour étudier ses comptes bancaires est restée lettre morte. « Cette absence totale de coopération du Sénégal, constante, entrave le bon déroulement des investigations », a déploré le magistrat. Lamine Diack avait révélé aux enquêteurs que la Russie avait financé des campagnes électorales au Sénégal en échange de la mansuétude de l’IAAF sur les cas de dopage. La justice sénégalaise a ouvert sa propre enquête et a fait savoir qu’elle n’extraderait pas un de ses nationaux.

Je vous fais observer que j’ai délivré un mandat d’arrêt contre Papa Massata Diack, qui a toujours voyagé dans le monde entier

Depuis Buenos Aires, Thomas Bach disait avoir reçu des « assurances du Sénégal (…) que si les autorités françaises veulent entendre Papa Massata Diack, elles peuvent venir au Sénégal ». « Quelles sont ces assurances? », a demandé le juge. « Pensez-vous que cela soit suffisant ? », « que pouvez-vous faire maintenant (…) ? », a insisté le magistrat, en ajoutant cette pique : « Je vous fais observer que j’ai délivré un mandat d’arrêt contre Papa Massata Diack, qui a toujours voyagé dans le monde entier, et que la justice française n’est pas à sa disposition ».

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Thomas Bach a assuré avoir toujours cherché à collaborer aux enquêtes et avoir suspendu les membres du CIO impliqués, tels Lamine Diack ou le Namibien Frankie Fredericks. Mais « je suis prêt à franchir une nouvelle marche » et, avec les JOJ attribués au Sénégal, « nous sommes dans une meilleure position pour insister ».

Deux jours, plus tard, le courrier avec les anneaux olympiques en en-tête s’est envolé, direction le palais de la République de Dakar. « Les faits reprochés par la justice française » aux Diack père et fils « constituent une atteinte à la crédibilité des organisations sportives, en particulier à l’organisation des Jeux olympiques de la Jeunesse 2022 », écrit-il notamment. « Le CIO veut montrer qu’il agit. La vérité, c’est qu’ils ont quand même attribué les JOJ au Sénégal », grince un proche du dossier. Interrogé sur ce point, le CIO n’a pas réagi dans l’immédiat.

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