Vous et Nous

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 6 minutes.

Appel à la jeunesse ivoirienne
Le naufrage menace le navire ivoirien qui prend l’eau de toutes parts. Et si l’on n’y prend garde, il ira se briser sur les récifs de la guerre civile. Il sera alors à la fois douloureux et onéreux d’en ressouder les morceaux. Je lance donc un appel à la jeunesse ivoirienne pour qu’elle se ressaisisse et fasse preuve d’abnégation, attitude qui marquera la différence entre nous, les jeunes, et nos aînés. La première génération au pouvoir, tout en installant les bases de la prospérité économique et du développement, a semé les grains du tribalisme, cultivé alors à petite échelle. La deuxième génération, quant à elle, est passée automatiquement à la phase « industrielle » de la production. Un rendement bien évidemment soutenu par une des plus grosses inepties de la fin du XXe siècle : l’ivoirité. Qui, à son tour, a accouché d’une bêtise baptisée « xénophobie ». Finalement, toute cette répugnante agriculture politique a conduit à un chamboulement tel que, désormais, la Côte d’Ivoire du Vieux se retrouve à feu et à sang. Le linge sale se lavant souvent en famille, j’apprécie, pour ma part, tous les pays africains qui, de près ou de loin, s’impliquent dans cette crise pour essayer de lui trouver un semblant de solution. J’espère de tout mon coeur que la jeunesse de Côte d’Ivoire se placera au-dessus de ces mêlées tribalistes, régionalistes et religieuses, et qu’au contraire, nous mettrons en commun nos idées et nos compétences pour oeuvrer dans le sens de la cohésion dans notre pays. Que les prophètes de la division aillent prêcher ailleurs. Vive la paix et la fraternité !
Theodore Lagoh New York, États-Unis

Afrique, prends les devants !
L’ignorance est une maladie. Si nous ne maîtrisons pas la connaissance de nos propres réalités et celles de notre environnement naturel, nous aurons beau avoir les yeux grands ouverts, nous irons tout droit vers le précipice. L’Afrique ne changera que le jour où elle cessera enfin d’être une vaste mine où tout un chacun peut puiser des produits bruts. L’émigration africaine de la misère est refoulée aux portes des pays européens… Or la fixation de quotas pour l’accès au riche banquet de l’hémisphère Nord, et les barrages juridiques et physiques contre le déferlement des sudistes ne servent à rien à partir du moment où les richesses sont concentrées au Nord. Le développement de l’Afrique est la seule réponse possible à ces contradictions structurelles du système mondial. Notre sous-développement provient de ce qu’on a fait des pays africains une table rase, une page blanche prête pour toutes les copies. Le développement n’est pas seulement une accumulation de projets parachutés de l’extérieur. Il faut que la société civile africaine ne soit pas seulement consommatrice de biens, de services et d’idées, mais qu’elle prenne – enfin – les devants.
Yamoussa Diarra Étudiant à l’Université de Bamako, Mali

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Arap Moi, le sage
Daniel arap Moi a tiré les leçons de l’Histoire. L’ex-président kényan s’est sans doute souvenu comment, avant lui, les autres autocrates ont fini… Moi a préféré bénéficier d’une retraite paisible que de faire face à la tourmente politique. Car la contestation commençait à gronder. En quittant ainsi le pouvoir, il s’est sûrement attiré la bienveillance des grands dirigeants des pays démocratiques. Peut-être deviendra-t-il un médiateur, à l’image de Mandela ? En tout cas, Moi a agi sagement. Souhaitons que les Bongo et Eyadéma tirent, eux aussi, les leçons de l’Histoire… Ajao Adewemi Viviane Waren-Müritz, Allemagne
J.A.I., ma seule référence

J.A.I. reste plus que jamais ma seule référence en matière d’information politique, culturelle et scientifique. Je vous félicite pour votre travail. Cependant, selon moi, vous ne parlez pas assez de Haïti et des Dom-Tom. Un petit effort !
Dr Samir Doghri
El Mourouj, Tunisie

Entêtement américain
Que veulent réellement les Américains et en particulier George W. Bush ? On a vraiment l’impression que l’Irak est la propriété des Bush, et qu’ils veulent à tout prix le défendre contre vents et cyclones. S’il est vrai que le peuple irakien vit sous une dictature inqualifiable, les États-Unis ont-ils le droit de faire ou de défaire un régime ? Leur entêtement à vouloir conduire seuls et selon leurs propres règles la « barque mondiale » a malheureusement eu pour conséquence le 11 septembre 2001. Si les Américains pouvaient méditer sérieusement sur cette journée, je crois qu’ils laisseraient le peuple irakien disposer de Saddam Hussein.
Yossa Y., Gabon

Mali : des élections prévisibles Un bon nombre de Maliens, dont l’auteur de ces lignes, souhaitaient voir se mettre en place la configuration actuelle du paysage politique. C’est chose faite. Après avoir écourté la période dite de « transition », notre général national est revenu au pouvoir de la plus belle des manières. Il faut dire que les Maliens sont moins stupides que semblent le croire leurs hommes politiques. Ainsi, les tractations mercantiles en vue de parvenir à des coalitions pour la bataille des législatives n’ont pas abouti. Aucun parti n’a pu obtenir la majorité absolue des sièges nécessaires pour former un gouvernement. Tout cela était prévisible. On a vu des gens clamer leur désir à travailler avec le général… Il semble néanmoins que certaines critiques soient partiellement fondées. Pour autant, le président Amadou Toumani Touré devait-il tenir compte de la majorité, même relative, sortie des urnes et former une équipe gouvernementale ? Du point de vue normatif et constitutionnel, la réponse est affirmative. Mais étant donné l’importance économique d’un changement de régime dans un pays du Tiers Monde, l’idée même d’entamer un quinquennat avec des sortants qui ont à leur passif des ratés aussi importants, comme le cas de l’école nationale, ne peut avoir l’adhésion de l’opinion nationale. Ceci explique sans doute son indifférence manifeste et l’attitude non belliqueuse observée par la classe politique tout entière. Le président Touré veut travailler, et la compétence de chacun de ses soi-disant « amis » est avérée, dit-on dans son entourage. Espérons-le !
Moustapha Siby Hong Kong, Chine

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Le Soudan,
une « terre d’amitié » ?
Vous avez publié dans le J.A.I. n° 2191, sous le titre « Le Soudan, terre d’amitié », un article du père Lelong. Certes, je partage son analyse : le conflit soudanais n’est pas essentiellement une guerre de religion. Mais le reste de son article fait preuve d’un manque d’information regrettable. Je ne citerai que quelques exemples. La guerre est due, écrit-il, « à des tensions ethniques » : non, mais au racisme du gouvernement soudanais, « aux interventions étrangères », « aux problèmes économiques ». Oui, la Russie et la Chine arment Khartoum (ce n’est pas dit). Mais on aurait aimé que le père Lelong précise, là aussi, qu’il s’agit du contrôle de l’exploitation de pétrole sis au Sud, au seul profit du gouvernement, et assorti d’un nettoyage ethnique. « Il reste encore bien du chemin à parcourir, écrit-il, pour qu’au prosélytisme [des missionnaires chrétiens], succède un véritable respect mutuel entre chrétiens et musulmans… » Or, si, jusqu’à 1882, il y eut peu de prosélytisme chrétien à l’égard des musulmans, il n’y en eut jamais depuis. Le prosélytisme musulman à l’égard des chrétiens a été constant. Et il est soutenu par l’État. « Il est heureux que l’actuel gouvernement soudanais ait affirmé et prouvé sa volonté de dialogue avec tous », ajoute-t-il. Je suis la première à souhaiter le succès des pourparlers de paix actuellement en cours. Mais les dirigeants ont accédé au pouvoir après un coup d’État, alors même qu’ils venaient d’être battus aux élections (avec moins de 10 % des voix). Ils ne représentent même pas le Nord. Quelques personnes, surtout des musulmans nordistes, que l’on peut compter sur les doigts de la main, ont une certaine liberté de parole. Mais je mets au défi le père Lelong de donner l’exemple d’un cas où le gouvernement aurait tenu compte de leurs avis. « Les relations interreligieuses y sont fraternelles. » Le sénateur Danforth, envoyé du président Bush, a voulu tester la volonté de paix des Soudanais. Il a convié ensemble les principaux responsables religieux musulmans et chrétiens. « Avez-vous des problèmes ? » demanda-t-il. « Aucun » répondirent les musulmans. Et les chrétiens : « Qu’en savez-vous ? Est-ce que l’un de vous connaît le nom ou la fonction de l’un d’entre nous ? » Le silence fut alors assourdissant. Le père Lelong a célébré la messe dans la cathédrale de Khartoum. C’est l’un des rares espaces de liberté cultuelle : des diplomates y vont à la messe. Eût-il parcouru une dizaine de kilomètres, il aurait atteint les bidonvilles et on lui aurait montré les emplacements de la quarantaine de chapelles de fortune détruites par l’État. Simone Dumoulin Présidente du Comité de vigilance pour les droits de l’homme et les libertés au Soudan
Paris, France

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