Un précédent fâcheux ?

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 2 minutes.

Qu’on se le dise : les armes sont désormais, tout comme les urnes, sinon mieux qu’elles parfois, un moyen de conquérir le pouvoir et de se voir conférer une légitimité internationale. C’est, sans doute, parmi d’autres, l’un des enseignements que l’on pourrait tirer de la tragédie ivoirienne et des efforts diplomatiques en cours pour y mettre fin.
Il y avait, en effet, quelque chose de surréaliste dans les pourparlers qui viennent de s’achever à Marcoussis, en région parisienne, entre les partis politiques ivoiriens et les différents groupes rebelles armés qui occupent, depuis plusieurs mois, plus de la moitié du pays de Félix Houphouët-Boigny. À la même table, et autour de l’ancienne puissance coloniale, longtemps prophète du droit, se retrouvaient légalistes et insurgés, les uns et les autres traités sur le même pied et bénéficiant des mêmes égards.
À l’évidence, la réunion de Marcoussis sur la Côte d’Ivoire marque un tournant dans les relations entre la France et l’Afrique. Elle inaugure une nouvelle façon de faire de la politique sur le continent. Qu’on se comprenne bien ! Il n’est pas question de mettre en cause le bien-fondé de discussions dont l’objectif est de ramener la paix dans un pays déchiré. À cet égard, la paix n’a pas de prix et sa concrétisation vaut bien tous les sacrifices.
Il n’en reste pas moins que la crise ivoirienne risque de balayer bien des certitudes dans l’esprit des Africains. En effet, depuis une dizaine d’années, les discours répétés sur l’État de droit et la démocratie, les pressions exercées par la communauté internationale pour faire prévaloir le suffrage universel avaient fini par convaincre les plus sceptiques que le citoyen africain était « arrivé » et que les élections étaient – enfin – devenues un passage obligé.
Las ! Voilà que des groupes armés administrent la preuve que pour peu qu’on soit déterminé et soutenu militairement par des forces parfois mystérieuses, et pour peu qu’on s’empare d’une portion du territoire national, on peut imposer sa loi à un pouvoir démocratiquement élu. Et à l’ensemble de la communauté internationale.

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