Un fléau africain

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 3 minutes.

Le 7 mars 2000, Jeune Afrique/l’intelligent publiait un dossier de six pages sur le paludisme dont l’attaque était : « L’Organisation mondiale de la santé [OMS] a lancé en juillet 1998 un plan à cinq ans baptisé « Faire reculer le paludisme » [« Roll Back Malaria », RBM]… L’objectif est de « réduire de manière significative la charge du paludisme dans le monde par des interventions adaptées aux besoins locaux et par le renforcement du secteur de la santé » et, plus précisément, de faire baisser le taux de mortalité par paludisme « d’au moins 50 % d’ici à 2010 « . »
Le 25 avril 2000 se réunissait à Abuja, au Nigeria, le Sommet africain sur la campagne « Faire reculer le paludisme ». À cette occasion, le 9 mai, J.A.I. saluait le plan de l’OMS dans un article d’une page titré « Enfin, un projet réaliste ». J.A.I. rappelait que l’OMS « avait, en 1955, affiché une grande ambition : l’éradication mondiale du paludisme grâce au DDT, mais qu’en 1977 un comité d’experts devait constater que « la maladie était loin d’avoir disparu ».
La déclaration d’Abuja reconnaissait, en effet, que le paludisme continuait à faire un million de morts par an en Afrique. Elle poursuivait :
« Neuf cas sur dix de paludisme dans le monde sont concentrés en Afrique au sud du Sahara.
« Le paludisme coûte plus de 12 milliards de dollars par an à l’Afrique, et pourrait être contrôlé pour une petite fraction de ce montant.
« Ceux qui en souffrent le plus sont certaines populations parmi les plus pauvres du continent, que le paludisme, en plus, maintient dans la pauvreté.
« Une famille pauvre vivant dans des régions touchées par le paludisme peut dépenser 25 % ou plus de son revenu annuel dans la prévention et le traitement.
« Le paludisme a ralenti de 1,3 % par an la croissance économique dans les pays africains. Conséquence de l’effet cumulatif sur trente-cinq ans, le Produit intérieur brut des pays africains est aujourd’hui inférieur de 32 % à ce qu’il aurait été sans le paludisme.
« Le paludisme peut réapparaître dans les régions où il est sous contrôle. »
Le 4 novembre 2002, soit deux ans après le Sommet d’Abuja, l’Assemblée générale des Nations unies mettait à son ordre du jour un bilan de la campagne « Faire reculer le paludisme ». À cette occasion, l’économiste américain Jeffrey Sachs, conseiller spécial du secrétaire général Kofi Annan, directeur de l’Institut de la Terre à l’université Columbia et auteur de la grande enquête de référence sur les conséquences économiques du paludisme, constatait que les promesses d’Abuja n’avaient pas été tenues.
– Promesse numéro 1 : les taxes sur les moustiquaires imprégnées seront allégées ou supprimées.
Dans les faits, dix-sept pays d’Afrique subsaharienne ont effectivement allégé ou supprimé les taxes sur les moustiquaires et sur le matériel pour les fabriquer. Vingt-six continuent de les taxer.
– Promesse numéro 2 : en 2005, les moustiquaires protégeront 60 % des personnes à risque, en particulier les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans. Dans les faits, à l’heure actuelle, les moustiquaires imprégnées sont utilisées seulement par 5 % ou moins de 5 % de cette cible.
– Promesse numéro 3 : en 2005, au moins 60 % des impaludés auront accès dans les vingt-quatre heures à des médicaments appropriés.
Dans les faits, dans dix-sept pays, la principale forme de traitement de la fièvre reste les analgésiques, qui sont sans effet sur la malaria.
– Promesse numéro 4 : la Banque mondiale fournira 500 millions de dollars supplémentaires.
Dans les faits, aucune trace de ces dollars.
Un mois plus tôt, le 8 octobre, le Wall Street Journal rendait compte d’un rapport d’un panel de sept experts présidé par Richard Feachem, directeur de l’Institute for Global Health californien, qui estimait que la campagne RBM avait besoin d’une « relance vigoureuse » et qu’il lui fallait « concentrer ses efforts sur les huit à douze pays qui ont la volonté politique de faire rapidement des progrès ».
Le professeur Edmond Bertrand, doyen honoraire de la faculté de médecine d’Abidjan, a eu l’occasion, en Côte d’Ivoire, de se battre contre l’anophèle et le Plasmodium falciparum. Il fait ici un point complet sur la situation actuelle : conditions de lutte, médicaments utilisés et utilisables, recherches sur les vaccins, raisons paradoxales des défaillances… Des encadrés confirment que le succès, pourtant, serait possible face à une maladie qui touche 500 millions de personnes par an et fait 1 million de morts. Une double page, supervisée par l’Institut Pasteur et reproduite avec l’autorisation du magazine Planète Enfants, indique en termes simples comment on peut se protéger.

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