RD Congo : sale temps pour les rebelles
Les crimes commis en République démocratique du Congo pourraient être parmi les premiers cas soumis à la Cour pénale internationale. Le gouvernement de Kinshasa, qui a reconnu la compétence de la Cour, a déjà introduit une demande en ce sens, suggérant même que soit créé un tribunal ad hoc chargé de juger tous les crimes commis depuis l’éclatement de la guerre.
La Cour pénale internationale ne peut juger que les crimes commis depuis sa création en juillet dernier. Par contre, un tribunal international pourrait être chargé d’examiner toutes les violations du droit de la guerre et les crimes contre l’humanité commis en territoire congolais depuis 1996, début de la première guerre, où des milliers de réfugiés hutus furent traqués et massacrés après le démantèlement des camps du Kivu. Faisant un rapport à l’ONU à propos de son voyage en Afrique centrale, le commissaire aux droits de l’homme, Sergio Vieira de Mello, a insisté pour que l’impunité ne soit pas tolérée. Et, à Bruxelles, le sénateur Georges Dallemagne a déposé une résolution demandant au gouvernement belge de saisir la CPI pour les crimes commis en RDC et relevant de sa compétence. Il a rappelé « le coût humain effroyable dû à ces atrocités qui comprennent des milliers d’assassinats, d’infanticides, de viols de femmes et d’enfants, de tortures, de persécutions ».
La perspective de voir la justice internationale traiter des méfaits commis sur le terrain inquiète visiblement les principaux protagonistes. C’est ainsi que Roger Lumbala, un allié de Jean-Pierre Bemba, qui dirige le RCD-National, nous a appelée depuis Kampala non seulement pour nier les accusations de cannibalisme qui pèsent sur ses troupes, mais pour mettre en cause les enquêtes menées sur le terrain par la Mission de l’ONU au Congo : « Trois jours sur le terrain ont suffi pour formuler des accusations aussi accablantes, ce n’est pas sérieux. »
Choisissant l’offensive, à l’instar de Jean-Pierre Bemba, M. Lumbala demande que soit créée une Commission Vérité et Réconciliation et que la justice internationale s’intéresse à tous les crimes commis depuis 1996.
Les lourdes accusations qui pèsent sur les mouvements rebelles et qui risquent de rendre certains de leurs dirigeants inéligibles à des fonctions officielles entraînent également des défections. C’est ainsi que, depuis Bruxelles, « Papy » Kibonge, l’un des fondateurs du Mouvement pour la libération du Congo, dénonce aujourd’hui Jean-Pierre Bemba et annonce la création d’un mouvement dissident, le MLC réformé, qu’il lance en compagnie d’autres vétérans du MLC, le capitaine Solo et le commandant Second Karawa, ainsi qu’avec Étienne Tshisekedi, neveu du célèbre opposant. Tous accusent Bemba de « gérer comme sa propriété privée » tant le MLC que les territoires qu’il contrôle. On le constate : la seule perspective d’une intervention de la justice internationale délie les langues et suscite des défections parmi des rebelles qui craignent d’être mis hors jeu !
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