Les colonies ou la paix

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 3 minutes.

Les Palestiniens sont partisans de deux États égaux pour deux peuples égaux. Mais l’insatiable appétit que met Israël à implanter des colonies dans les territoires de la Palestine rend impossible cette solution, décourageant par là tout effort pour résoudre pacifiquement le conflit.
Un tel effort a été fait récemment à Washington par les représentants de l’Union européenne (UE), de la Russie, des États-Unis et de l’ONU – ce qu’on appelle le « quartet » – en discutant d’une « feuille de route » conduisant à la paix. Mais ce plan ne mènera nulle part s’il ne met pas un terme aux continuelles confiscations de terres par Israël.
Durant les deux dernières années, l’attention du monde s’est concentrée sur la violence du conflit israélo-palestinien, tout en ignorant largement les causes profondes de cette violence, alors même qu’elles s’aggravaient.
Au lieu de remédier aux conséquences de l’occupation, Israël s’est servi du temps écoulé depuis les accords d’Oslo, en 1993, pour doubler le nombre des colons, dont le total approche maintenant 400 000 – plus de la moitié vivant dans la partie occupée de Jérusalem-Est.
Depuis que le Premier ministre Ariel Sharon est entré en fonctions, voilà deux ans, plus de soixante colonies juives ont été créées dans les Territoires, en violation des lois internationales et des résolutions de l’ONU.
Selon un récent rapport d’une organisation israélienne des droits de l’homme, les colonies contrôlent désormais près de 42 % de la Cisjordanie, à l’exclusion de Jérusalem-Est. Ces colonies et leurs routes de contournement ont virtuellement encerclé cette partie occupée de la Ville sainte, empêchant les Palestiniens de développer leur plus important centre urbain – ridiculisant ainsi l’idée de faire de Jérusalem la capitale commune de deux États.
Quant au prétendu « mur de sécurité », dont certaines parties sont hautes de 7,5 mètres, il a moins à faire avec la sécurité qu’avec la saisie de nouvelles terres. Ce mur, en effet, n’est pas construit le long de la frontière d’Israël, mais plutôt à l’intérieur du territoire palestinien, de telle sorte qu’il sépare les Palestiniens de leurs terres cultivables et de leurs ressources en eau.
L’incessante construction de colonies et de routes réservées aux colons a conduit ainsi à la confiscation de terres, à la démolition de maisons, à la destruction de l’agriculture, au vol des ressources en eau, au déplacement des familles, à la rupture de la continuité territoriale de la Palestine et de sa cohésion sociale.
Le refus israélien d’arrêter ce processus détruit la confiance palestinienne dans les intentions d’Israël – un manque de confiance qui est au coeur de l’actuelle Intifada. Pourtant, selon une enquête du mouvement « La Paix maintenant », plus de la moitié des Israéliens sont favorables à la création d’un État palestinien dans le cadre d’un accord de paix définitif. Y compris Sharon, malgré les décisions contraires du Likoud.
Comment alors les Palestiniens peuvent-ils concilier un tel soutien à un État palestinien et l’édification permanente de colonies juives ? À beaucoup d’entre eux, il est devenu clair que Sharon et bien des Israéliens n’ont en tête qu’un « État » ghetto cerné par des colonies, sans aucune possibilité de se défendre, privé de ressources en eau et de terres, avec une présence insignifiante à Jérusalem et qui n’aurait donc de « souverain » que le nom. Jamais les Palestiniens n’accepteront un pareil avenir.
Sans un changement spectaculaire de la politique israélienne, la possibilité même de la solution de « deux États » sera reléguée aux livres d’histoire. En dépit des lois internationales qui proscrivent l’édification de colonies, malgré l’appel à un « gel des colonies » lancé en 1991 par une commission internationale présidée par l’ex-sénateur américain George Mitchell, malgré les demandes palestiniennes visant à prendre en compte les causes profondes de la violence – occupation et construction de colonies -, la communauté internationale n’a rien fait pour arrêter Israël.
Tout en réaffirmant son soutien à la solution de deux États, le président George W. Bush continue aussi à soutenir un gouvernement israélien qui rend cette solution impossible. Le quartet doit faire d’un gel complet des colonies, sous contrôle international, sa première priorité. Sans ce gel, le climat d’hostilité s’aggravera et ruinera tous les efforts pour arrêter la violence.

© The New York Times et J.A./l’intelligent 2003.Tous droits réservés.

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* Négociateur en chef de l’Organisation de libération de la
Palestine (OLP).

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