La démocratie selon Abdallah

Ce que le régent saoudien propose à ses pairs.

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 2 minutes.

Qu’est-ce qui a poussé le prince héritier saoudien, qui dirige l’État arabe le plus réactionnaire et le plus farouchement opposé au changement démocratique, à proposer à ses pairs arabes un projet de charte de bonne gouvernance ? Est-il animé par une réelle volonté de réforme, comme le prétendent ses partisans, ou cherche-t-il seulement à gagner du temps pour ne pas avoir, justement, à mettre en route les réformes politiques revendiquées par les élites modernistes de son pays et exigées par… les Américains ? Les avis, à ce sujet, sont très partagés.
Le journal saoudien Arab News a évoqué, dans son édition du 15 janvier, le contenu de ce qu’il a appelé « un projet de charte panarabe », que le prince héritier Abdallah voudrait présenter (et faire adopter) au cours du sommet arabe qui se tiendra en mars prochain à Manama, capitale de Bahreïn. Aux termes de cette charte, les dirigeants arabes devront s’engager à renforcer la participation de leur peuple dans la gestion des affaires publiques, à rejeter toute ingérence dans les affaires intérieures des pays arabes et toute agression extérieure contre l’un de ces pays, à favoriser la mise en place de réformes intérieures dans tous les domaines et à créer les conditions d’une renaissance arabe globale.
Sur le fond, ces propositions n’apportent rien de nouveau, car elles ont déjà été adoptées par les précédents sommets de la Ligue et consignées dans diverses conventions, notamment celles relatives à la « défense arabe commune » et au « marché arabe commun », demeurées lettre morte.
Dans le contexte actuel, l’initiative saoudienne, loin d’exprimer une volonté d’ouverture politique, viserait plutôt à desserrer, par son seul effet incantatoire, la pression américaine sur les régimes arabes. En affichant ainsi sa volonté de réforme, le régime saoudien espère faire d’une pierre deux coups : améliorer son image aux yeux des Américains et des Occidentaux et donner une lueur d’espoir à son peuple, qui aspire à une plus grande participation à la gestion des affaires publiques.
Selon Abdelaziz el-Khamis, président du Centre saoudien des droits de l’homme, basé à… Londres, « cette nouvelle sortie du prince héritier Abdallah est un leurre visant à légitimer un pouvoir dynastique qui se sent très affaibli. Dès qu’il n’y aura plus de menace à l’horizon, le projet de charte de bonne gouvernance sera relégué aux oubliettes. »
Pour être crédibles, Abdallah et ses pairs devront donc apporter la preuve du contraire. Par les actes plutôt que par les paroles.

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