Air France condamnée au Sénégal

La compagnie française a été jugée coupable d’abus de position dominante au détriment des agences de voyages de la place.

Publié le 28 janvier 2003 Lecture : 2 minutes.

Air France est coupable d’abus de position dominante et de concertation illégale avec d’autres compagnies pour procéder à une baisse unilatérale du taux des primes accordées aux agences de voyages sur les billets vendus. Telle est la décision rendue le 27 décembre dernier par la Commission nationale de la concurrence du Sénégal.
L’affaire remonte au 5 février 2001. Ce jour-là, les agences de voyages du Sénégal reçoivent une lettre de la direction commerciale d’Air France leur notifiant que la compagnie a revu à la baisse les taux de commission sur les billets.
Dans son argumentaire, Air France explique que sa décision procède de la nécessité d’adapter ses coûts de distribution « aux nouvelles réalités mondiales ». La compagnie tricolore ajoutera, comme élément confortant sa décision, le fait que celle-ci « vise l’ensemble des pays de l’Afrique de l’Ouest ». Ainsi qu’il apparaît dans une correspondance de Laurent Giscard d’Estaing, directeur régional d’Air France, en date du 19 avril 2001.
Cette décision provoque le courroux des agences de voyages locales. Par l’intermédiaire du Syndicat des agences de voyages et de tourisme du Sénégal (SAVTS), elles saisissent la Commission nationale de la concurrence. Accusant Air France d’abus de position dominante et de concertation illégale. Les requérants font noter que, depuis la disparition d’Air Afrique, au vu des statistiques relevées dans les agences de voyages, la compagnie française représente 50 % de leur chiffre d’affaires.
La mesure décriée fait passer le taux de la prime sur le billet vendu de 9 % à 7 %. « La pratique est abusive, notent les requérants dans leur mémorandum, car le taux a été appliqué d’autorité et en rejetant toutes les demandes de concertation des structures nationales ou internationales. La pratique est anticoncurrentielle, elle fausse le jeu de la concurrence car d’autres compagnies comme Alitalia et Iberia ont appliqué le même taux, ces trois compagnies représentant plus de 65 % de notre chiffre d’affaires. Les agences qui ont essayé de travailler avec d’autres compagnies pour compenser leur manque à gagner n’ont pas été suivies par leur clientèle. »
Il n’y a pas, poursuivent-ils, de solution alternative pour eux, du fait de la demande vers la destination France sur laquelle Air France a une position dominante. « On peut, dès lors, considérer que la dépendance des agences de voyages est avérée », concluent-ils.
Air France comme Alitalia sont membres de la Sky Team, un pool de compagnies comprenant en outre Aeromexico, CSA Czech Airlines, Delta Air Lines et Korean Air. Là où la compagnie française avance que la baisse du taux touche tous les pays de l’Afrique de l’Ouest, les agences de voyages sénégalaises ont opposé qu’au Nigeria, par exemple, le taux de 8,1 % est appliqué par Air France et d’autres compagnies représentées dans ce pays.
L’abus de position dominante et l’exploitation abusive d’un état de dépendance économique invoqués visaient l’article 27 de loi 94-63 du 23-8-1994 sur les prix, la concurrence et le contentieux économique. La religion de la Commission nationale de la concurrence étant ainsi faite, sa décision est tombée : « II est enjoint à la compagnie Air France de faire cesser les pratiques anticoncurrentielles incriminées. Faute d’exécution de l’injonction qui lui est faite dans un délai d’un mois après la notification de la présente décision, la compagnie Air France payera une amende de vingt millions de F CFA. »

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires