3 questions à… Ndiogou Fall

Président du Réseau des organisations paysannes et des producteurs agricoles de l’Afrique de l’Ouest (Roppa)

Publié le 2 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique/L’intelligent : Avant la conférence de Hong Kong, vous aviez déclaré que vous n’attendiez « pas grand-chose » des négociations (voir J.A.I. n° 2344). Qu’en est-il aujourd’hui ?
Ndiogou Fall : Globalement les résultats sont décevants. Sur le coton, c’est même un échec. Les Américains maintiennent leurs aides internes et menacent donc toujours le coton africain qui risque de disparaître. Quant à la suppression des taxes douanières, elle n’a aucun sens, car les 10 millions de producteurs africains exportent très peu vers les États-Unis. D’une manière générale, l’ouverture des marchés ne nous intéresse pas, car l’Afrique n’a pas d’offres à l’international, exceptées quelques niches comme les fleurs et les haricots du Kenya. Nous voulons en revanche une protection de nos marchés face aux importations massives qui font chuter les prix locaux et donc les revenus paysans.
J.A.I. : Européens et Américains ont tout de même accepté de supprimer leurs subventions agricoles à l’exportation d’ici à 2013, qui leur permettent d’écouler à bas prix leurs surplus…
N.F. : Oui, mais c’est une infime partie du volume total des aides agricoles. En plus, Européens et Américains font preuve de mauvaise foi. Ils sont en train de modifier les soutiens accordés à leurs producteurs pour qu’ils ne soient plus considérés comme sources de distorsion du marché. C’est la fameuse question des « boîtes » distinguant les différentes formes d’aides. Et sur cette question, Européens et Américains ont mis leur veto. Il y a eu un deal.
Quant au « paquet développement », c’est en apparence une bonne chose mais, en fait, l’exemption des tarifs douaniers accordée par les pays riches aux pays les moins avancés (PMA) profite aux entreprises du Nord qui délocalisent au Sud pour revendre au Nord. Nous allons assister à l’apparition d’une nouvelle race d’affairistes. Et puis je rappelle que Bruxelles et Washington multiplient les normes phytosanitaires pour limiter leurs importations dans l’agroalimentaire.
J.A.I. : Alors, il n’y a eu aucune avancée…
N.F. : Si, une seule, elle concerne le dossier des « produits spéciaux ». Les pays en développement vont pouvoir choisir vingt produits sur lesquels ils pourront augmenter les taxes à l’importation. C’est un bon outil pour protéger nos marchés. Reste à savoir ce que vont en penser la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Cela va aussi nous permettre d’évaluer la volonté de nos gouvernants de défendre leurs paysans au détriment des intermédiaires et des commerçants.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires