Kolélas : le grand pardon

Publié le 2 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

Que va faire Bernard Kolélas ? Au lendemain du retour d’exil de l’opposant le plus populaire et le plus controversé du Congo, le 14 octobre dernier, tout Brazzaville retenait son souffle. Deux mois plus tard, la réponse est là, et le soulagement perceptible : le vieux chef de 72 ans, revenu chez lui pour y enterrer son épouse Jacqueline, réapparaît en pèlerin de la paix touché par la grâce de l’autocritique. « Je demande pardon au peuple congolais pour les torts que j’ai pu lui faire », a déclaré « Ya Bekol » le 9 décembre lors de sa première conférence de presse. « À notre jeunesse, je demande l’abandon de la violence sous quelque forme que ce soit. » Sans doute n’est-ce pas un hasard si ce message, au demeurant courageux, d’apaisement a été prononcé au lendemain de l’audience d’une heure accordée par le président Denis Sassou Nguesso à Bernard Kolélas, en sa résidence privée de Mpila. Les deux hommes, dont les trajectoires politiques respectives se sont beaucoup plus heurtées que croisées, ne s’étaient pratiquement pas parlé depuis huit ans : ont-ils défini un nouveau terrain d’entente ?
Plus encore que le très médiatique pardon sollicité par Kolélas, l’annonce du retrait de son parti des rangs de l’opposition semble indiquer qu’une telle évolution est en cours, laquelle pourrait à terme déboucher sur un remake de l’éphémère axe Nord-Sud qui prévalait entre 1994 et 1997. Rendue publique le 19 décembre par son porte-parole Eloi MamPouya, la décision du Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral (MCDDI, fondé en 1990 par Kolélas) de suspendre sa participation au Code A, la plus significative des deux coalitions de l’opposition, semble préluder à une alliance gouvernementale avec la majorité présidentielle. Ce schéma aurait le mérite d’apaiser enfin la région du Pool, dont Kolélas demeure la figure de référence, et de marginaliser les irréductibles partisans du pasteur Ntoumi. Retranché l’arme au pied dans son fief de Vinza, ce dernier campe dans une position curieuse, mi-rebelle, mi-ralliée, dans l’espoir de négocier sa reddition au prix fort. L’état exact de ses relations avec Kolélas demeure un mystère. Tout juste sait-on qu’elles sont distendues, apparemment exemptes de sujétion – et que le retour de celui que ses fidèles appellent le Mandela du peuple kongo ne fait pas son affaire.
Reste que le Gandhi qu’est devenu « Ya Bekol » n’en a pas forcément fini avec la justice. Exonéré de toute poursuite pénale depuis le vote, le 23 novembre, d’une loi d’amnistie concoctée expressément pour lui, cet homme charismatique, au passé d’éternel résistant mais aussi de combattant impitoyable, fait l’objet de plaintes au civil avec demandes de réparations de la part de deux personnalités qui assurent avoir été torturées dans ses geôles privées pendant la guerre civile de 1997 : le journalise Adrien Wayi et le colonel à la retraite Étienne Ossebi. Pour eux, le pardon ne signifie pas l’absolution. Même si le service que Bernard Kolélas vient de rendre à la cause de la paix au Congo mérite assurément le respect.

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